C’est l’un des secrets les mieux gardés de San Francisco. Bordé par l’océan, blotti au creux des dunes d’Ocean Beach, l’Outer Sunset offre une facette paisible de la ville. Entre maisons pastel, surfeurs en goguette et adresses indépendantes, cap sur la good vibe de ce quartier méconnu.
Il est des lieux qui vous marquent à jamais et l’Outer Sunset en fait partie. Enclavé aux confins de la ville, à la lisière sud du Golden Gate Park, ce quartier, qui s’étire le long de la Great Highway, coule des jours heureux loin de l’effervescence urbaine, quelque part entre le grand bleu, le fog et l’au-delà. Par temps clair, on raconte que la silhouette énigmatique des Îles Farallons, ultime escale dans les eaux glacées du Pacifique avant Hawaï, se dessine à l’horizon, tel un mirage, enveloppé de mystères et de légendes. Depuis l’immensité d’Ocean Beach, l’aquarelle magnétique n’est jamais la même. Alors que la fougue des vagues emporte nos chagrins, le ciel se pare de bleu de soie, de gris, d’or cuivré et de miel. Les dunes vagabondes, balayées par le vent, deviennent le terrain de jeu des marcheurs emmitouflés et le paradis des chiens, joyeux et libres. Seule constante de ce nuancier mouvant : les surfeurs, infatigables dompteurs d’écume, fidèles au rendez-vous.
Si aujourd’hui l’Outer Sunset évoque une mer de brume roulante et des rangées de maisons pastel en stuc, parfaitement alignées, il n’en a pas toujours été ainsi. Autrefois un no man’s land dominé par les dunes et les broussailles, ce territoire isolé, surnommé « Grand Désert de Sable », ne comptait que quelques fermes et fabriques de dynamite. Ce n’est qu’avec l’extension du chemin de fer en 1883, suivie de l’exposition universelle de 1894, qu’il gagna en visibilité.
À l’aube du XXe siècle, un groupe d’artistes bohèmes s’installa, sous le regard ébahi des pionniers, dans d’anciens tramways transformés en habitations uniques, donnant naissance à Carville, une communauté créative et excentrique. Autre curiosité marquante de l’Ocean Side, l’ouverture en 1928 de Playland-at-the-Beach, au sud du légendaire Cliff House. Ce parc d’attractions, avec ses manèges, carrousels et maisons de rires, devint un lieu emblématique des Outer Lands avant de fermer en 1972, emportant avec lui une part d’insouciance et de magie.
Ce n’est qu’après le séisme de 1906 et le boom immobilier des années 1920 que le Sunset prit sa forme actuelle, devenant une enclave pour la classe ouvrière, d’abord majoritairement irlandaise, puis, dès les années 1960, marquée par une communauté chinoise florissante. Ironie du sort : ces maisons, autrefois à la portée de tous, se négocient aujourd’hui à prix d’or !
Apprécié pour sa tranquillité et son charme balnéaire, l’Outer Sunset attire une nouvelle génération de familles, d’artistes et de techies, conquis par l’esprit communautaire des Outer Lands. Ici, pas de grandes enseignes, mais des petits commerces de quartier et des épiceries communautaires où il fait bon se retrouver. Chaque matin, la terrasse de Devil’s Teeth Bakery devient le théâtre de retrouvailles conviviales entre voisins et habitués : on y savoure un biscuit fourré et une tasse de café, tandis que les enfants, cartables sur le dos, jouent sur le trottoir avant de filer à l’école. Une scène simple, vivante et chaleureuse, qui capture l’essence même de la culture du Sunset.
À l’approche d’Ocean Beach, il n’est pas rare de croiser, à toute heure de la journée, des surfeurs déambulant dans les rues, planche sous le bras, perchés sur leur vélo ou à bord de leur pick-up, tandis que des combinaisons de néoprène tentent de sécher sous un soleil timide noyé par le brouillard sur le parvis des maisons. Un décor presque irréel… Et dire que vous êtes à San Francisco, berceau de la tech et des robots-taxis !
C’est ici que la marque Mollusk a vu le jour, une véritable institution dans le quartier ! Fondée en 2005 par John McCambridge, cette adresse en vogue fusionne passion de la glisse, art et lifestyle. Depuis sa vitrine fleurie de succulentes, on aperçoit l’une des fabuleuses capsules nomades et cabanes de l’artiste de la culture surf Jay Nelson, figure incontournable de l’Outer Sunset. Il faut dire que les créatifs et les surf shops ne manquent pas par ici ! Woodshop, sur Noriega, offre un espace de travail collectif et un showroom partagés entre quatre amis, artisans et riders. Pendant que Danny Hess façonne des planches de surf en bois, Luke Bartels conçoit des meubles à partir de matériaux locaux, Jeff Canham peint des enseignes et des œuvres d’art, et Josh Duthie fabrique des chaises et des tabourets. « Comme beaucoup d’artistes et de créateurs de l’Outer Sunset, nous avons été attirés par la possibilité de vivre à la frontière de San Francisco, un pied dans l’environnement urbain et l’autre dans le froid Pacifique. »
Du côté de Judah Street, General Store et Blackbird Books forment un duo de boutiques indépendantes au charme indéniable. La première offre des créations artisanales de mode et de décoration, principalement locales, tandis que la seconde propose une sélection pointue de livres, agrémentée d’un café avec patio idéal pour feuilleter sa dernière trouvaille. Plus bas, Woods Outbound, avec sa chill vibe et sa jolie déco céladon, propose des vins naturels et des bières artisanales. Parmi les autres coups de cœur du quartier : le fish and chips de Hook Fish & Co. et Palm City, un caviste-épicerie fine où l’on déguste de délicieux hoagies et assiettes gourmandes. Pour une expérience authentique de la cuisine californienne, ne manquez pas Outerlands. Saluée par la critique, cette adresse séduit par ses brunchs du week-end, ses produits bio, régionaux et de saison, son pain au levain exceptionnel et son amour du fait-maison, le tout dans une ambiance typiquement Outer Sunset !