Comme chaque année, la saison des taxes est un casse-tête pour les Français aux Etats-Unis. Alors que vous avez jusqu’au lundi 15 avril pour déclarer vos revenus à l’Internal Revenue Service (IRS), l’agence fédérale américaine chargée de collecter l’impôt, certains d’entre vous se demandent probablement s’ils ne font pas des erreurs en remplissant leurs formulaires fiscaux. Que risque-t-on en cas de mauvaise déclaration ? C’est l’objet de notre “qu’est-ce que je risque”.
On commence par les bonnes nouvelles: les contrôles sont assez rares, souligne Marc Trost, expert-comptable et directeur de l’agence Jade-Fiducial à Washington, spécialisée dans la gestion comptable et l’optimisation fiscale pour les Français des Etats-Unis.
L’IRS, qui accuse une baisse de budget de près d’un milliard de dollars en dix ans, indique dans ses derniers chiffres avoir audité seulement 0,5% des déclarations sur l’année fiscale 2017, dont 70% par correspondance contre seulement 30% sur le terrain.
Autre point soulevé par l’expert, pour les particuliers comme pour les entreprises, le trésor américain s’intéresse davantage aux revenus importants : plus de 10% des déclarations faisant état d’un million de dollars de revenus par an sont contrôlées contre moins de 1% pour les revenus de 200.000 dollars ou moins. « Mais bien sûr, ça ne veut pas dire que parce que l’on gagne 100.000 dollars par an ou moins et que l’on a moins de chances d’être contrôlé, il faut faire n’importe quoi », insiste Marc Trost, qui rappelle que l’IRS traque avant tout les incohérences, souvent dues à des erreurs de calcul ou à un manque d’information. Chaque Etat, qui nécessite une déclaration à part, conduit indépendamment de l’IRS ses propres contrôles (même si l’agence fédérale dit communiquer ses informations et assène par ailleurs ses propres pénalités).
Marc Trost cite trois cas fréquents qui risquent de déclencher un contrôle. Tout d’abord, ne pas déclarer tous ses revenus. « L’IRS a des moyens de savoir ce qu’un contribuable a gagné. Votre employeur envoie également à l’IRS votre formulaire W2 si vous êtes un salarié classique ou 1099 si vous êtes indépendant. Le système informatique recoupe ensuite les informations automatiquement », explique l’expert-comptable, qui précise que cette chasse aux incohérences est valable pour n’importe quel type de revenus.
Deuxième situation qui peut alerter l’IRS : les droits à certaines déductions. « Pour un auto-entrepreneur, les revenus d’un 1099 sont reportés dans un “Schedule C” de la declaration 1040 sur lequel il est possible de declarer vos “business expenses”, toutes les dépenses liées à votre activité, illustre Marc Trost. Si vous déclarez avoir gagné 30.000 dollars et dépensé 29.000 dollars de frais de déplacements ou de restaurants, l’IRS va probablement procéder à un contrôle de cohérence », poursuit-il, avant de préciser que l’agence traque également les écarts trop importants avec les marges moyennes du secteur d’activité concerné.
« Dans ce cas, l’IRS notifie souvent le contribuable par courrier et envoie une proposition de redressement pour “négligence ou méconnaissance des règles”. En général, les pénalités sont de 20% du montant de la déclaration plus des pénalités de retard en fonction du nombre de jours écoulés », précise Marc Trost. Dans des cas plus rares de « sous-évaluation substantielle », le redressement peut aller jusqu’à 40% ou même 75% de la dette lorsque l’IRS identifie une « civil fraud », ajoute-t-il.
Autre erreur courante : l’oubli de déclarer des actifs financiers, comme par exemple les comptes en banque ou les contrats d’assurances-vie en France qui ont dépassé les 10.000 dollars en cours d’année.
Dans le cadre des accords FATCA (Foreign Account Tax Compliance Act, entré en vigueur en 2010), les banques ont l’obligation de déclarer au Trésor des Etats-Unis leurs clients américains ou qui ont un “indice d’américanité”, ce qui est le cas des Français résidents aux Etats-Unis. Mais si le contribuable étranger oublie de remplir le formulaire FBAR demandé par l’IRS, ce dernier peut à nouveau relever une incohérence et déclencher un contrôle. « Il n’y a rien à payer, la déclaration des actifs est à titre informatif », rappelle en outre Marc Trost, qui invite à être vigilant sur la question, souvent négligée par les Français expatriés.
En cas d’oubli, le montant du redressement s’élève à 10.000 dollars par an et par compte non déclaré ou 50% de la valeur du compte dans certains cas, prévient l’expert-comptable. « Il ne faut pas oublier non plus que, sous la signature du contribuable, il est noté “under penalty of perjury” et que dans certains cas de fraude fiscale avérée, le contrôle peut aboutir à des pénalités criminelles », alerte Marc Trost qui conseille de bien se relire et vérifier ses calculs.