Dis, c’est quoi cette bouteille de lait? Aux Etats-Unis, c’est pas du UHT. Vous vous êtes souvent demandé pourquoi on trouve si peu de lait UHT de ce côté-ci de l’Atlantique? C’est la question bête de la semaine.
En France, plus de 90% du lait consommé est UHT (pasteurisé à Ultra Haute Température), qui est aussi très prisé dans la majorité de l’Europe du Sud. Aux Etats-Unis au contraire, 90% du lait vendu subit seulement une pasteurisation simple. Il doit donc être réfrigéré constamment et n’a une durée de vie qui n’excède pas deux semaines.
Le lait UHT a été développé dans les années 1960 notamment par Tetra Pak, l’inventeur de l’emballage en brique opaque et sous vide d’air qui, couplé à la pasteurisation à ultra haute température, permet de conserver le lait pendant des mois. Les pays qui l’ont adopté aiment le caractère pratique. Mais les Etats-Unis n’y ont jamais succombé.
L’Italien Parmalat a tenté de l’imposer à partir du milieu des années 1990, sans grand succès. Pourquoi? Une des pistes est l’histoire américaine du fameux “livreur de lait”. “Les Américains ont grandi avec cette tradition du lait frais livré chez soi” souligne Paul Bensabat, ancien président de Lactalis aux Etats-Unis, et fondateur de Saveur Food. Ce lait frais ne se conservait qu’au réfrigérateur et, depuis, l’imaginaire américain ne conçoit de consommer du lait que s’il sort du frigo.
Parmalat avait d’ailleurs identifié cette préférence, et demandé au milieu des années 1990 aux détaillants de mettre ses cartons UHT dans les rayons réfrigérés, pour rassurer les consommateurs américains. L’astuce n’a guère pris. Le lait UHT est toujours perçu comme étant “moins sain”. Le paradoxe est que l’immense majorité du lait “organic” (bio) aux Etats-Unis est lui vendu UHT. Le faible nombre de fermes qui en produisent oblige à employer cette technique pour permettre au lait de supporter de plus longs temps de trajet et de stockage.
La résistance américaine au UHT a été d’autant plus forte que le goût est différent. Le traitement UHT (porté à 138° C pendant deux secondes, contre 62° à 88° C pendant 15 à 20 secondes pour la pasteurisation) “donne un léger goût caramlisé en brûlant certains de ses sucres” note Craig Baumrucker, professeur de nutrition à Pennsylvania State University.
Les énormes réfrigérateurs américains, qui peuvent stocker plus facilement de grandes quantités de lait que les petits frigos français pourraient aussi avoir un joué un rôle dans la résistance américaine.
Le lait UHT n’est pourtant pas totalement absent du marché américain. “Il se développe, notamment en petit paquet pour les enfants (lait au chocolat), car c’est pratique pour les lunch boxes sans refrigération” note Paul Bensabat. Mais, malgré les efforts de communication de Tetra Pak, il reste pour l’heure cantonné à ce marché de niche.