Dans une élection marquée par les insultes et les retournements de vestes, difficile de s’y retrouver dans les propositions de Donald Trump, d’ “Hillary” et des autres. Pour sauver l’électeur américain, la start-up Voxe, étoile montante de la tech civique française, vient de lancer sa plateforme collaborative de comparaison de programmes politiques aux Etats-Unis.
Objectif: aller “au-delà du bruit médiatique” , selon sa présidente et co-fondatrice Léonore de Roquefeuil, et proposer un outil “user friendly” capable de confronter les propositions des candidats en quelques clics. L’utilisateur sélectionne deux candidats, les catégories (politique étrangère, immigration, éducation et recherche…) et sous-catégories (vétérans, Moyen-Orient, terrorisme…) pour afficher leurs mesures, toutes issues de sources officielles. “C’est attirant pour une frange de la population qui ne va pas lire de longs articles. Le comparateur est hyper clair. On est là pour parler des programmes. On n’entre pas dans l’analyse. Nous restons sur les faits.”
Voxe, c’est le pari d’un petit groupe de jeunes entrepreneurs pour rendre la politique accessible, notamment auprès de la génération des millenials qui “vit avec un téléphone dans les mains mais qui n’a pas l’information qu’elle cherche.” Edouard Schlumberger (VroomVroom.fr) et Pierre Valade (Sunrise, racheté par Microsoft l’an dernier) l’ont lancé pour l’élection de 2007 “comme un one shot” . En 2012, ils décident de remettre le pied à l’étrier avec une équipe plus large. Voxe est lancé comme association. Plusieurs médias s’emparent de la plateforme et le public suit. “En 2012, le comparateur a été copié sur plusieurs centaines de sites, ce qui nous a amené une traction de deux millions de personnes sur l’ensemble de la campagne” , souligne Léonore de Roquefeuil, qui a rejoint l’aventure en 2014. Auparavant, cette ancienne de Sciences po avait travaillé sur les questions d’engagement politique à l’ONU.
Voxe a depuis reçu la bénédiction de ses pairs. En 2013, elle repart du concours 101 idées, organisé par le trio Xavier Niel (Free), Marc Simoncini (Meetic) et Jacques-Antoine Granjon (Vente-Privée.com), avec 25.000 euros. Fin 2015, elle remporte 200.000 euros lors du Google Impact Challenge. Les fonds permettent à la petite entreprise d’emménager dans des locaux plus grands et de recruter une septième personne à temps plein.
Entre temps, la plateforme, accessible en open source, a été adoptée en dehors de France, dans des contrées aussi différentes que la Roumanie et la Guinée Conakri. Au total, Voxe a été utilisée lors d’élections dans 17 pays, l’Union européenne et même pour la Cop21. Outre les Etats-Unis, elle doit aussi être lancée au Pérou, où la campagne pour la prochaine présidentielle bat son plein. “Ce n’est pas normal que cela soit aussi complexe d’être citoyen. On demande à tout le monde d’avoir un avis sur tout, d’être de super hommes ou de super femmes. Dans le cas des jeunes, personne ne s’adresse à eux aujourd’hui. On pense que la jeunesse est apathique, paresseuse, qu’elle ne réfléchit pas. Il n’y a pas qu’en France que l’on raisonne comme ça. Dans le monde entier, les jeunes ne votent pas, sauf en Amérique latine.”
Pour préserver son indépendance, le comparateur conserve son statut de “non profit” . Des projets périphériques, comme une app conçue pour faciliter l’implication politique en trois étapes, doivent servir de sources de financement.
Aux Etats-Unis, le contenu de la plateforme est mis à jour par le partenaire américain de Voxe, The Tempest, un site d’information qui cible les millenials, et par le crowdsourcing. Les mesures des candidats annoncées en dehors des programmes figureront aussi dans le comparateur. “Contrairement à Hillary, Donald Trump a peu de contenu dans son programme officiel mais annonce des mesures sur twitter par exemple.” L’équipe pense aussi ajouter les dates des déclarations pour mettre en avant d’éventuels changements de position. “On ne supprime rien sur Voxe. S’il y a un mea culpa, on le met.”
La plateforme devrait monter en puissance après les conventions de cet été. “Voxe sera plus important en septembre ou en novembre, surtout sur si on couvre les sénatoriales, les questions référendaires et les élections des gouverneurs, poursuit Léonore de Roquefeuil. En ce moment, les Etats-Unis sont le pays où on est le plus consulté. On finalise des partenariats avec des gros médias pour offrir l’outil à plus de personnes. Il y a encore de l’espace pour faire plus grand. ”