C’est le fruit de cinq années de travail que Zabou Breitman et sa co-réalisatrice Eléa Gobbé-Mevellec viennent présenter à San Francisco le mardi 22 janvier au Théâtre du Lycée Français. “C’est la première fois que nous allons parler du film depuis qu’il est terminé, alors on est comme des dingues, impatientes de découvrir la réaction du public“, s’enthousiasme Zabou Breitman.
Adapté du roman éponyme de l’écrivain algérien Yasmina Khadra, “Les Hirondelles de Kaboul” est un film d’animation dont l’histoire se déroule en 1998 en Afghanistan, alors sous domination des talibans. Il raconte l’histoire de deux couples dont les destins vont se croiser dans des circonstances dramatiques. Choisie par la maison de production Les Armateurs, Zabou Breitman s’est attelée à la construction et à la narration d’un film d’animation avec grand plaisir. “Dans ma jeunesse, je dessinais énormément et j’ai longtemps hésité à faire les Arts Déco, confie-t-elle. J’adore les films et les séries d’animation, en particulier américains comme “Family Guy” ou les films de Pixar, qui sont très forts dans la complexité des sentiments qu’ils décrivent.”
Soucieuse de ne pas bêtifier les sentiments et tenant à la justesse du jeu des personnages des “Hirondelles de Kaboul”, Zabou Breitman a totalement bouleversé les codes traditionnels de ce genre de réalisation. “En France, on fait d’abord le dessin, puis on fait venir les acteurs pour plaquer leurs voix sur les images. J’ai décidé de faire l’inverse et de commencer par les voix: on a fait jouer les acteurs en costume, comme au théâtre, et l’équipe d’animation s’est servie de leur gestuelle, de leur jeu sur scène pour faire le graphisme.”
Jean-Claude Deret, père de Zabou Breitman et connu du grand public comme scénariste de la série “Thierry La Fronde”, fait d’ailleurs la voix d’un des personnages. “Il avait 93 ans quand il a joué ce texte, et est décédé avant que le film soit terminé. Le personnage à l’écran ressemble à mon papa, mais en afghan. Le dessin retranscrit bien son jeu, quand il hésite, quand il se racle la gorge. L’abstraction du dessin le sublime un peu, et le rend perpétuel“, confie-t-elle.
Eléa Gobbé-Mevellec est l’autre réalisatrice de ce film: ancienne élève des Gobelins, choisie par Zabou Breitman, elle a beaucoup suivi la direction d’acteurs de sa partenaire. Avec une équipe de 50 animateurs, elle s’est appliquée à retranscrire les scènes dans leurs moindres détails. “Je voulais un jeu hyper réaliste avec un dessin hyper abstrait, explique Zabou Breitman. La beauté du travail d’Eléa est insensée: elle a soigné les moindres détails, avec un graphisme qui rappelle l’aquarelle. On croirait voir des tableaux, mais dans lesquels on reconnaît les sentiments. Elle a fait un travail de documentation de dingue pour recréer les ambiances de 1998 à Kaboul, et rendre la beauté de ce pays.”
On entend notamment en bruit de fond les commentaires de la Coupe du Monde, écoutés en cachette à l’époque. On distingue clairement le nom de “Zidane”. Certaines scènes sont dessinées de l’intérieur du tchadri, afin de montrer ce que voient les femmes afghanes à travers la petite grille de ce voile intégral.
La date de sortie des “Hirondelles de Kaboul” en France n’est pas encore arrêtée. “Peut-être réserve-t-on ce film pour un grand festival? Cannes, Berlin, Venise? Nous, on en rêve…“