Jean-Christophe Mifsud est l’archétype de l’excellence scientifique française. Après un diplôme d’ingénieur en chimie, d’école de commerce à l’Essec, il est venu approfondir ses connaissances avec un post-doctorat de neurochimie aux États-Unis, à Princeton. Trente ans plus tard, il traverse à nouveau l’Atlantique pour y implanter la filiale de son groupe Rubix.
Le Toulousain est un entrepreneur dans l’âme : après avoir créé sa première société dans l’instrumentation pour la chirurgie au début des années 90, il a dirigé et développé Alpha MOS, spécialisé dans la mesure des sens humains, pendant 23 ans. Le groupe commercialise des langues et nez électroniques capables d’analyser la fraîcheur des poissons, le goût des médicaments pour l’industrie pharmaceutique ou encore l’odeur d’une crème pour la cosmétique. La société est introduite en Bourse à la fin des années 90, et en 2015, Jean-Christophe Mifsud décide de poursuivre dans cette voie avec sa nouvelle aventure entrepreneuriale : Rubix, également basé à Toulouse.
« Je voulais sortir du laboratoire et offrir cette capacité d’analyse pour chaque moment de notre vie, comme citoyen, employé ou encore comme client,» raconte-t-il. Rubix commercialise ainsi des objets connectés qui mesurent les nuisances sensorielles en temps réel et les identifient, qu’il s’agisse de gaz, d’odeurs, d’allergènes ou encore de bruits. Sa banque de données compte plus de 200 odeurs et 15.000 sons. En début d’année, le groupe a levé 7 millions d’euros, notamment auprès d’Airbus Ventures et ADP, portant sa collecte à 12 millions d’euros depuis sa création. Et ouvre aujourd’hui un bureau américain à New York, dirigé par Horacio Werner et qui va recruter rapidement des commerciaux.
« Nous sommes très présents dans les environnements intérieurs, comme les centres commerciaux, bureaux, hôtels et restaurants, où la mesure de la qualité de l’air et du bruit devient primordiale ». Le groupe ne vend pas en direct ses produits mais a développé des partenariats avec de grands groupes, comme Cisco pour les smart cities, Veolia pour les eaux usées, Bouygues dans la construction et bien sûr ADP, avec sa filiale HubOne. Pour Rubix, la crise de la Covid-19 a été un formidable accélérateur puisque ses produits peuvent suivre la salubrité des environnements, détecter la présence de détergents. Le groupe a ainsi suivi la désinfection du tristement célèbre Diamond Princess, ce bateau de croisière qui a connu une vague d’infections au coronavirus et a dû être placé en quarantaine au Japon. Rubix en a supervisé la désinfection.
Jean-Christophe Mifsud nourrit les meilleurs espoirs pour son développement outre-Atlantique, qui devrait rapidement dépasser la France. Après avoir enregistré 1,2 million d’euros de prises de commandes en 2019, il anticipe un triplement de l’activité cette année. L’objectif est bien sûr d’enrichir constamment ses banques de données, mais aussi d’appliquer sa technologie à de nouveaux objets connectés. Lors du CES à Las Vegas l’an dernier, Rubix avait par exemple présenté une « smart watch » qui analyse la sueur et l’haleine d’un individu.