Chaque année, nombreux sont ceux qui tentent leur chance aux États-Unis. Peu importe leur domaine de prédilection, ils rêvent d’une success-story digne du célèbre mythe du self-made-man. Pour les start-ups françaises désireuses de lever des fonds au pays de l’oncle Sam, l’investisseur américain est souvent synonyme d’espoir et de chimères.
On l’imagine parfois à tort comme le super héros qui pourra résoudre tous les problèmes à coup de chèques à plusieurs zéros. En réalité, ce n’est pas si simple. Depuis 2010, seulement une soixantaine d’entreprises françaises spécialisées dans la technologie sont parvenues à lever des fonds aux US selon Maxence Drummont, ancien membre du French Tech Hub. Lors d’un webinar sur le financement des start-ups françaises aux Etats-Unis le 7 novembre, il a cité parmi les entreprises qui ont réussi Blablacar, Gooded et Price Match pour les plus connues. Pour relever ce défi, elles ont dû réunir plusieurs critères.
L’art du réseautage
Les Français qui cherchent des financements à l’étranger n’ont pas à se lancer en solo dans cette aventure. Être capable de développer son réseau outre-Atlantique est l’une des conditions sine qua non pour réussir. En s’entourant des bonnes personnes, vous optimisez ainsi vos chances de trouver rapidement un Business Angel. Parmi les aides externes que vous pouvez solliciter figurent les incubateurs de start-ups. Via différents programmes d’insertion, ils proposent des services adaptés au projet de chacun. Le French Tech Hub, lui, s’est donné pour mission depuis 2012 de faciliter l’installation d’entreprises françaises aux US. Elle propose ainsi un coaching permettant à ses clients de se préparer efficacement au marché américain. Cela passe par le peaufinement d’un projet à la mise en relation avec d’éventuels investisseurs.
Pas de recette miracle, seulement un projet qui tient la route !
L’entrepreneur doit aussi avoir un projet viable et innovant, défiant toute concurrence. L’investisseur américain veut que son placement lui rapporte vite et gros sans se faire du souci pour la survie du projet. En plus de l’offre, le “Business Angel” comme on l’appelle ici recherche également une personnalité.
Pour Sylvia Gallusser, responsable du programme “Funding Access” de la French Tech Hub San Francisco, cela doit impérativement passer par le storytelling. “Ici, on aime la personnification de l’entreprise par son leader. On dit souvent que c’est l’exécutif qui compte et c’est à ce moment-là que l’individu rentre en jeu. On attend du futur entrepreneur d’être l’avenir de l’entreprise, mais aussi d’être celui qui va la faire prospérer et élever ses coéquipiers.” Si celui-ci n’a pas le profil escompté, il peut se faire évincer par un des nombreux contacts de son investisseur. C’est l’une des multiples concessions que le fondateur de la start-up devra faire. Dans le même esprit, il se peut qu’il ait également à délocaliser son bureau aux États-Unis.
Selon Sylvia Gallusser, c’est presque une obligation : “Lorsque l’on discute avec des personnes souhaitant être financées par des investisseurs américains, une question revient régulièrement : “faut-il oui ou non s’installer aux États-Unis?” Les chiffres le prouvent, c’est quasi-inévitable. La plupart des entrepreneurs font ce choix et ceux qui ne l’ont pas fait totalement le font au moins partiellement en mutant leur PDG.”
Connaître son investisseur et le défier
Il n’existe pas un mais plusieurs profils-types de l’investisseur américain. Tous ont un point commun : ils s’intéressent aux compagnies françaises sans être pour autant des spécialistes du marché français. Une fois qu’ils placent leur argent, ils peuvent soit véritablement s’investir dans l’entreprise ou bien opter pour un partenariat “fantôme”.
Pour Baptiste Grégori, manager stratégie et ventes à la French Tech Hub, c’est souvent quitte ou double. “Il existe deux profils d’investisseurs: l’investisseur qui a été entrepreneur et qui va accompagner celui sur qui il mise. Il est souvent tenté de gérer la société dans laquelle il place son argent. Le second profil est l’investisseur financier qui prône une distance. Dans tous les cas, l’investisseur américain est très actif. Il appelle très régulièrement, demande des chiffres…”
Pour garder le contrôle sur son entreprise, il ne faut pas hésiter à jouer les fins stratèges, notamment là où la concurrence fait rage. C’est le cas de la Silicon Valley, leader en termes d’investissement étranger aux États-Unis. Comme nous le rappelle Baptiste Grégori, “c’est 10 fois plus de fonds levés qu’à New York et Boston, qui occupent les deuxième et troisième places en termes de placements de fonds.” Avant de se lancer dans un partenariat financier, il faut analyser méticuleusement ses options et prendre le temps d’y réfléchir. Rares sont les deals qui se signent en trois mois.