Romain (dont nous ne donnerons pas le nom de famille) n’avait pas prévu d’exercer sa profession de coach sportif aux Etats-Unis. Mais quand sa copine a décroché un boulot et un visa, il a eu envie de passer un maximum de temps avec elle.
Depuis près d’un an, ce trentenaire utilise donc le programme d’exemption de visas, appelé communément ESTA (Electronic System for Travel Authorization), pour résider sur le sol américain. Et y travailler. “Au départ, j’ai trouvé un client que j’entraînais 4 ou 5 heures par jour. Ensuite, j’ai troqué ce deal pour d’autres clients. C’est difficilement quantifiable mais je travaille en moyenne 2 à 3 heures par jour“, détaille-t-il. Il se fait alors payer en espèces, n’ayant pas de compte en son nom aux Etats-Unis. “Ce n’est pas beaucoup d’argent, c’est pour subvenir aux besoins du quotidien“.
Louise était dans la même situation après une proposition professionnelle à New York qu’elle ne voulait pas refuser. “J’ai eu la réponse pour mon stage début août et je devais commencer début septembre. Je n’avais pas le temps de faire un dossier pour un visa”, explique-t-elle. Pendant huit mois, la jeune femme est restée aux Etats-Unis sous plusieurs ESTA successifs sans grande difficulté. “Ça ne dérangeait pas du tout mon employeur et j’avais un virement sur mon compte français sans numéro de sécurité sociale”, explique-t-elle.
Par ignorance, nécessité ou facilité, nombreux sont les ESTA qui exercent une activité rémunérée aux Etats-Unis. Une pratique risquée selon Julie Gharagouzloo, avocate spécialisée en immigration. “Une telle utilisation de l’ESTA pourra vraiment casser, plus tard, des opportunités personnelles ou professionnelles aux Etats-Unis”.
Pour rappel, l’ESTA est un formulaire de renseignement qui permet de venir aux Etats-Unis sans visas et sous certaines conditions.
Valable deux ans et ne coûtant que 14 dollars, l’ESTA autorise des séjours limités à 90 jours, soit trois mois. Le séjour ne peut pas être prolongé et il est strictement interdit aux voyageurs ESTA de changer leur statut sur place (en obtenant un visa par exemple).
Même avec un ESTA valable, l’officier d’immigration peut refuser votre entrée sur le territoire s’il perçoit que vous venez travailler. Seuls les voyages touristiques et d’affaires (par exemple, un séminaire, ou une mission sur la demande de et pour votre employeur français) sont autorisés.
Pour Julie Gharagouzloo, “le travail est vraiment défini au sens large. Même les ‘self-employed’ sont concernés. De manière générale, la définition du travail pour le droit de l’immigration américain regroupe toute activité à laquelle on peut donner une valeur marchande”.
Pour ne pas se faire “prendre”, Romain et Louise ont suivi les règles de l’ESTA, n’outrepassant jamais les trois mois prévus. Ils faisaient régulièrement des aller-retour vers la France. Et avant chaque passage à la frontière, ils suppriment leurs conversations téléphoniques et leurs e-mails professionnels. “Une fois, j’ai déchiré en urgence les pages de mon agenda avec mes rendez-vous professionnels juste avant la frontière”, se souvient Louise, qui vit aujourd’hui en France.
Bien qu’il ait envie de poursuivre son expérience, Romain ne craint pas la sanction. “Je n’ai pas de rêve américain“. Pourtant, il espère obtenir un visa en septembre : “ça risque de devenir problématique avec beaucoup d’aller-retour, d’autant que je ne peux pas passer plus de 6 mois dans l’année aux Etats-Unis“.
Et sur ce point, l’avocate Julie Gharagouzloo est claire : travailler avec un ESTA, “c’est vraiment une prise de risque quant à la possibilité de revenir aux Etats-Unis dans le futur”. Selon elle, ce n’est pas tant au passage à la frontière que le pot-aux-roses est découvert, mais plutôt lors d’une demande de titre de séjour. En effet, cette demande donnera lieu à une enquête qui mettra en évidence l’infraction.
“Si à un moment quelconque le gouvernement découvre que vous avez travaillé, ils vont refuser tout type de statut dans le futur, on ne vous fait plus confiance […] Sauf cas exceptionnel, comme pour les conjoints d’Américains ou les demandeurs d’asile, ça va vous empêcher plus tard d’avoir la carte verte. Parfois, on peut interdire à la personne de revenir sur le territoire américain”, précise maître Gharagouzloo.
Quels recours sont possibles ? Pour l’avocate, un étranger ayant travaillé avec un ESTA et souhaitant régulariser sa situation doit prendre contact avec un avocat spécialisé. “En fonction de la situation, on peut trouver une solution […] Mais même si on a violé son statut dans l’ignorance, il n’y a pas une sorte d’amnistie pour ces cas-là”.
0 Responses
Bonjour, je suis malheureusement dans ce cas là. Pendant 2ans je faisait de nombreux aller retour sous esta. Et, il y a 4ans (en 2013) je suis restée 91 jours sur mon esta au lieux de 90. Lorsque j’ai voulu y retourné je me suis vu refusé l’entrée aux us. Donc interrogatoire qui n’en finissait plus, j’ai fini par avouer avoir perçu de l’argent car j’étais model. Donc il mon gentiment rapatrié par le premier vol pour Paris mais l’officier m’avait informé que je ne serais plus éligible à l’esta mais qu’il me faudrait faire une demande de visa. Aujourd’hui, 4ans plus tard, je fais une demande de visa par le biais de mon employeur car je suis pnc et mon visa est refusé. Je me doute bien que ceci est en rapport avec mon passé mais j’ai à nouveau pris un rdv pour une nouvelle demande b1/b2 pensez vous que j’ai une restriction de plusieurs années ? Ou bien que je suis interdite à vie ? Ce qui serait totalement absurde.