En cinéma non plus la taille ne compte pas toujours: l’une des meilleures chances françaises aux Oscars 2014 est un court métrage, “Avant que de tout perdre”, de Xavier Legrand qui, au côté des autres français de la sélection («Ernest et Célestine », « Moi, Moche et Méchant 2 » ou encore « Mr Hublot »), tentera de faire oublier l’absence de La Vie d’Adèle, pas retenu par le comité de sélection.
Le sujet d’ “Avant que de tout perdre” est pourtant très loin du glamour hollywoodien habituel : le court métrage tourné dans un supermarché de Franche-Comté, raconte l’histoire d’une caissière et mère de famille, incarnée par Léa Drucker, qui tente de fuir avec ses enfants un mari violent.
La violence conjugale, sujet universel
Xavier Legrand, comédien récemment passé derrière la caméra, a appris la nomination de son court dans les coulisses d’un théâtre, alors qu’il s’apprêtait à monter sur scène. «J’ai dû jouer pendant les deux heures suivantes avec cette nouvelle en tête ! C’était irréel. Je crois que je n’ai vraiment réalisé qu’une fois la pièce terminée» raconte cet admirateur d’Alfred Hitchcock et de Claude Chabrol, venu promouvoir son court métrage à Los Angeles, quelques jours avant la cérémonie des Oscars. “C’est la première fois que je viens à L.A et même aux Etats-Unis tout court ! Entre les interviews, les projections, les rencontres avec le public, ça n’arrête pas ! C’est une grande découverte pour moi”.
Pour ce jeune réalisateur autodidacte, il est «toujours compliqué d’expliquer pourquoi tel ou tel film est choisi, mais je pense qu’Avant que de tout perdre traite d’un sujet universel qui parle absolument à tout le monde. La violence conjugale touche tous les milieux sociaux, sans distinction. De la caissière de supermarché de province aux professionnels d’Hollywood. Cette histoire ne peut laisser personne indifférent. J’ai rencontré plusieurs femmes qui sont venues me voir à la fin des projections pour me raconter qu’elles avaient elles-mêmes déjà vécu ce genre de drames ».
Ce court métrage de 30 minutes, thriller social subtil, au rythme haletant, où la violence se devine mais n’est jamais montrée, a été acclamé l’année dernière tant par la critique que par le public. En France comme à l’international. Il a notamment raflé quatre prix lors du prestigieux festival du court métrage de Clermont-Ferrand (l’équivalent du festival de Cannes pour les formats courts), a été récompensé aux festivals de Melbourne, Bruxelles, Leeds ou encore Valence, et nominé aux Césars le 28 février prochain.
Une sélection plus internationale
« La reconnaissance que nous avons obtenue l’année dernière était un atout de taille pour pouvoir être sélectionnés aux Oscars. En général, il faut avoir reçu pas mal de prix pour avoir la chance de faire partie des nominés» explique Xavier Legrand, qui garde toutefois la tête sur les épaules.«Les employés du supermarché de Franche-Comté qui ont participé au film sont tellement heureux et fiers de faire partie de cette aventure ! Je leur suis très reconnaissant car ce n’est jamais évident d’avoir toute une équipe de cinéma qui débarque sur son lieu de travail !».
Pour le réalisateur d’Avant que de tout perdre, « l’avantage du court métrage aux Oscars, par rapport au long métrage, c’est que la sélection est souvent beaucoup plus internationale (ndlr : son court métrage est nominé aux côtés de films anglais, finlandais, espagnol et danois). Un film français a donc davantage de chances d’être sélectionné, puis de se faire remarquer en cas de victoire. D’autant que cette année, aucun long métrage français n’est nominé». Plusieurs grands noms du cinéma français ont d’ailleurs reçu par le passé la prestigieuse statuette pour leur court métrage : d’Alain Resnais à Claude Berri, en passant par le réalisateur Edmond Séchan (l’oncle du chanteur Renaud) ou encore Pierre Etaix.