En un an, les prix des billets d’avion au départ de la France ont, selon la Direction générale de l’aviation civile, augmenté de quasiment 20%. L’inflation touche en fait l’ensemble du marché aérien. Pour Thomas Renault, responsable des ventes aux Etats-Unis pour la compagnie aérienne French bee, le phénomène s’explique notamment par « la hausse de la demande dans un contexte de reprise post-pandémie et l’envolée incroyable du prix des matières premières couplée à une parité euro-dollar défavorable aux transporteurs européens ».
« Comme toutes les compagnies aériennes présentes sur le marché transatlantique, French bee a énormément de réservations pour cet été », explique Thomas Renault. « La demande est très forte et le marché français n’est pas le seul à être impacté : peu importe la destination européenne, les vols sont pleins. Sur les chiffres industrie, on se rapproche du trafic de 2019 », constate-t-il. En vacances scolaires ou congés annuels – et depuis la levée des restrictions de déplacement –, un grand nombre de passagers souhaitent voyager au même moment. La demande, nettement plus forte que l’offre (plusieurs compagnies aériennes ont fait faillite pendant la pandémie), fait donc monter les prix.
« Le meilleur moyen d’obtenir des prix bas est de réserver à l’avance », rappelle le responsable des ventes. « Les promotions de dernière minute dans l’aérien existent très peu. La règle veut plutôt, au contraire, qu’une réservation de dernière minute aille de pair avec un prix élevé. » Il en profite pour faire la promotion du « service à la carte » proposé par French bee : « notre clientèle peut construire le produit qui lui convient le plus, en achetant par exemple un billet sans valise ou en choisissant de ne pas prendre d’option menu sur un vol de nuit, ce qui permet aussi d’économiser. »
« La guerre en Ukraine a également impacté le cours du pétrole, et le prix du kérosène a doublé en l’espace d’une année », poursuit Thomas Renault. « L’achat de kérosène représente environ 30% des coûts pour une compagnie aérienne long-courrier comme la nôtre, et la parité euro-dollar nous est actuellement défavorable. » Le prix du baril fluctue en ce moment autour de 100$, contre environ 40$ en juillet 2020 et 75$ en juillet 2021. La devise officielle du cours du pétrole étant le dollar, les compagnies françaises doivent dépenser plus qu’avant pour se fournir. L’Association du transport aérien international (IATA) avertissait déjà le mois dernier de l’impact négatif généré par la force record du dollar américain, qui « freine la croissance en général » et alourdit« le fardeau du paiement des importations de carburant ».
Les compagnies aériennes sont par ailleurs encouragées à substituer au kérosène d’origine fossile des carburants durables, jusqu’à quatre fois plus chers, afin de réduire les émissions de CO2 et de particules fines et espérer décaborner l’aviation d’ici 2050. Les coûts de ces biocarburants (que la Commission européenne prévoit de taxer prochainement) sont directement répercutés sur le prix des billets d’avion. Air France, par exemple, a augmenté ses prix en début d’année pour compenser une partie de ce surcoût. « Les prix French bee augmentent aussi, mais ils seront toujours, dans la mesure du possible, inférieurs à ceux de nos concurrents », souligne Thomas Renault. « La pression devrait se relâcher en septembre », conclut-il. Il encourage les voyageurs à surveiller les ouvertures de ligne, pour lesquelles les prix d’appels sont plus faibles que sur les routes établies depuis plus longtemps. « Il y aura de bonnes affaires en décembre sur les vols entre Paris et Miami », promet-il.
Les mouvements de grèves et le manque de personnel, à la fois au sein des compagnies aériennes et dans les aéroports, perturbent en plus le transport aérien. Dans un communiqué publié le 13 juillet, l’IATA s’est dite préoccupée suite à l’annonce de la Commission européenne de revenir à la règle d’utilisation des créneaux aéroportuaires d’avant la pandémie, qui oblige les compagnies aériennes à exploiter au moins 80% des créneaux de décollage et d’atterrissage qui leur sont alloués, sous peine de perdre leurs droits. « L’incapacité de plusieurs aéroports clés à répondre à la demande, associée à l’augmentation des retards de contrôle du trafic aérien, signifie qu’un retour prématuré à la règle “80-20” pourrait entraîner d’autres perturbations pour les passagers », estime Willie Walsh, directeur général de l’organisation. « Le chaos que nous avons vu dans certains aéroports cet été s’est produit avec un seuil d’utilisation des créneaux de 64%. Nous craignons que les aéroports ne soient pas prêts à temps pour desservir un seuil de 80% d’ici à fin octobre. » Il appelle la Commission à être flexible et réaliste.
Dans un rapport récent, l’IATA estime les pertes de l’industrie à quelque 9,7 milliards de dollars cette année. Mais Willie Walsh considère que la rentabilité est « à l’horizon pour 2023. L’heure est à l’optimisme, même s’il reste des défis en matière de coûts, en particulier de carburant, et des restrictions persistantes sur quelques marchés clés. » Le nombre de passagers réguliers devrait atteindre 3,8 milliards d’ici la fin de l’année, et l’Amérique du Nord devrait continuer d’être la région la plus performante avec un bénéfice net de 8,8 milliards de dollars.