La nouvelle a pris tout le monde de court, y compris les avocats d’immigration qui ont reçu de nombreux appels de clients paniqués. Cette nouvelle, c’est la décision de l’administration américaine de raccourcir de soixante mois (5 ans) à quinze la validité maximale des visas E-1 et E-2, attribués aux investisseurs, entrepreneurs et autres individus participant aux échanges commerciaux entre la France et les Etats-Unis. Seuls les Français sont concernés par ce changement soudain qui doit entrer en vigueur pour les demandes déposées à partir du 29 août.
Au vu de son timing, ce raccourcissement pouvait facilement être mis sur le compte des tensions commerciales actuelles entre les deux pays, déclenchées par la taxe française dite “Gafa” qui touche plusieurs géants américains du numérique. En réalité, il découle du controversé décret présidentiel 13780 signé par Donald Trump en mars 2017. Ce décret, qui avait suscité une vive polémique parce qu’il instituait une interdiction d’entrée sur le territoire pour les ressortissants de sept pays à majorité musulmane, “a enjoint au Département d’Etat d’entreprendre une révision mondiale des accords et des dispositions de réciprocité pour les visas non-immigrants, a confié le State Department à French Morning, mercredi 21 août. Pendant cet examen, le Département d’Etat a noté des décalages entre les régimes de visas français et américains“.
Les Etats-Unis ont donc procédé à un ré-alignement en vertu du principe de réciprocité. Inscrit dans la loi, ce principe veut que la politique américaine en matière de frais de visas et de période de validité soit basée sur celle pratiquée par le pays partenaire vis-à-vis des visiteurs américains utilisant des visas similaires. “Etant donné que la France n’a pas été capable de changer son régime de visa, les Etats-Unis ont été contraints par la loi de réduire la validité des visas pour s’aligner sur les pratiques françaises“, résume le Département d’Etat.
L’Ambassade de France aux Etats-Unis indique de son côté que les instructions relatives aux visas français attribués aux investisseurs étrangers n’ont pas été modifiées et met en avant la différence des conditions d’attribution entre les deux pays. Les investisseurs ou créateurs d’entreprises qui veulent s’implanter en France pour des séjours longs (plus de trois mois) doivent faire la demande d’un “visa de long séjour valant titre de séjour (VLS-TS)”, puis d’un titre de séjour pouvant aller d’un an à quatre ans selon les profils (investisseurs, fondateur d’entreprises, employés qualifiés…).
Selon la page “Welcome to France” de l’organisme de promotion économique de la France Business France, ce visa de long séjour valant titre de séjour “autorise l’entrée en France mais également la résidence du demandeur pour une période supérieure à 3 mois et inférieure à 12 mois, sans sollicitation d’un titre de séjour“.
Il est possible que les autorités américaines ont additionné la durée minimale des deux documents (visas et titres de séjour), respectivement trois et douze mois, pour établir la nouvelle durée des visas E de quinze mois, mais cela n’a pas été confirmé par le Département d’Etat. La période de validité sur laquelle se sont alignés les Etats-Unis continue de susciter des questions.