Vous avez peut-être remarqué qu’il existe aux États-Unis de nombreuses traditions inconnues en France : prom night, engagement party, baby shower, celebration of life, etc. Mais d’où viennent ces rituels et, pourquoi les Américains en sont-ils si friands ?
L’anthropologue Robbie Davis-Floyd a défini le rituel comme « un acte ou une série d’actes régulièrement répétés qui incarnent les croyances d’un groupe de personnes et créent un sentiment de continuité et d’appartenance ». Qu’il soit religieux ou non, Émile Durkheim, père fondateur de la sociologie française, les considérait même indispensables à la création du lien social. Partager les mêmes traditions, c’est partager les mêmes valeurs, et nous avons besoin de ce sentiment pour nous relier les uns aux autres. Dans un pays immense comme les États-Unis, peuplé par plus de 330 millions d’habitants, aux origines diverses, pas étonnant donc de voir émerger des rituels qui dépassent les différences culturelles ou religieuses.
D’après Jack Santino, folkloriste, ancien directeur du Centre d’études de culture populaire de l’université de Bowling Green, Ohio : « Ces rituels, qui sont tous laïques, font aujourd’hui partie intégrante de l’identité américaine ».
Si certaines apparaissent dès la fin du XIXe siècle, c’est réellement après la Seconde Guerre mondiale que ces traditions se généralisent aux États-Unis. « L’émergence de la société de consommation et l’essor de la classe moyenne ne sont pas étrangers au phénomène » selon le professeur Jack Santino.
C’est le cas des baby showers qui se généralisent dans les années 50 sous l’effet du baby-boom. Plus qu’un nouveau-né, c’est l’entrée d’une femme dans la maternité que l’on vient célébrer. À la même époque, le bal de promo devient « la version démocratisée du bal des débutantes », selon la sociologue Amy Best, dans son livre Prom Night : Youth, Schools and Popular Culture.
Une soirée festive qui obéit à des codes bien précis, popularisés par Hollywood : smoking pour les garçons, robe de soirée et corsage (petit bouquet de fleurs) pour les filles. Plus qu’un bal, c’est une tradition « qui marque symboliquement le passage de l’enfance à l’âge adulte » selon Candace Chen, historienne, auteure de « Prom : how a high school ritual brought youth closer to adulthood, 1890-1970 ». Pour Jack Santino, c’est bien là le dénominateur commun : « ces rituels viennent marquer une étape de vie, symboliser une transition ».
Autant d’occasions de se réjouir… Et de sortir sa carte bleue. Les parents débourseraient en moyenne 1 000$ pour le bal de promo de leur ado (tenue, coiffure, limousine); pour un baby shower, comptez plusieurs centaines de dollars ; quant à une bachelor party digne du film « Very Bad Trip », la facture peut s’envoler.
Dernier phénomène en date, la gender reveal party. Les sociétés évènementielles spécialisées surfent sur la tendance et proposent des prestations toujours plus spectaculaires, pour quelques centaines ou quelques milliers de dollars.