Le printemps, ses oiseaux qui chantent et ses jeunes qui boivent comme des trous. Une semaine de débauche attend les étudiants américains de début mars jusqu’à début avril : « Spring Break ». Mais d’où vient cette tradition ? C’est la question bête de la semaine.
En 1936, le coach de natation de Colgate University à Hamilton (New York) décide d’emmener son équipe s’entrainer pendant les vacances à Fort Lauderdale en Floride, car il y a une grande piscine olympique, la Casino Pool. En 1938, la ville renifle le filon marketing et décide d’accueillir le premier forum de natation universitaire. Dès la première année, plus de 300 étudiants s’inscrivent à cette compétition.
L’essor de Fort Lauderdale comme destination des “Spring Breakers” est facilité par les circonstances. Au début des années 40, les rumeurs sur la présence de sous-marins allemands au large des côtes américaines incitent les étudiants américains à se détourner de leur destination favorite de l’époque, Bermuda, et à rester sur le sol américain. Fort Lauderdale profite de ce mouvement. “On retrouve à Fort Lauderdale du soleil, des activités aquatiques et un contrôle parental inexistant. Il ne faut rien de plus pour attirer les jeunes” explique Nuno Ribeiro, professeur assistant au sein du Department of Recreation, Sport, and Tourism de l’Université de l’Illinois, qui a étudié le phénomène.
La situation dans la petite ville de Floride, pas adaptée à recevoir autant de nouveaux arrivants en si peu de temps, empire rapidement. En 1954, quelque 20.000 étudiants débarquent. Le chaos qui en résulte fait deux morts et entraine l’arrestation d’onze personnes. Fort Lauderdale fait les gros titres et inspire les écrivains. En 1959, Glendon Swarthout publie Where the boys are, un roman sur quatre étudiants qui explore leur sexualité pendant leur Spring Break à Fort Lauderdale. L’année suivante, un film du même nom sort.
En 1983, le film « Spring Break » montre les vacances de quatre jeunes dans la ville de Floride. Les concours de t-shirts mouillés, les litres de bière avalés et les autres activités illégales renforcent la réputation de la ville, si bien qu’en 1985, plus de 370.000 étudiants descendirent dans ce qu’ils avaient rebaptisé « Fort Liquordale ». Excédé, le maire déclare à la télévision que les étudiants ne sont désormais plus les bienvenue dans sa ville. Il renforce également le contrôle des ventes d’alcool et renforce les lois contre la consommation d’alcool en public. Avec succès. À la fin des années 80, les étudiants migrent vers des destinations encore plus ensoleillées du sud ou quittent carrément les États-Unis vers des pays plus tolérants en matière d’alcool.
Aujourd’hui, les “Spring Breakers” se retrouvent à Panama City (100.000 en 2015), Cancún au Mexique (43.000 en 2013), South Padre Island au Texas (au moins 80.000 par an) ou encore en Californie. La manne financière de Spring Break pour ces villes se chiffre en plusieurs millions de dollars – cela vaut bien quelques semaines de souffrance – et les opportunités pour les annonceurs (sociétés de cartes de crédit, marque d’alcool et même l’armée) sont nombreuses.
Mais selon le professeur Ribeiro de l’Université de l’Illinois, la réputation de débauche du Spring Break est surfaite. « Quand on étudie le comportement des étudiants sur les campus et durant le Spring Break, il est assez similaire: un étudiant qui fait beaucoup la fête sur son campus fera aussi beaucoup la fête lors du Spring Break. Ce n’est qu’une minorité d’étudiants qui va dans les excès. La plupart sont là pour profiter du beau temps, de la plage et pour s’amuser un peu. »