Pierre & Antonin, c’est avant tout l’histoire d’une rencontre fortuite qui a changé la vie de ces deux Français, sur un rooftop. En 2010, Pierre Caizergues et Antonin Bonnet sont chacun représentants de vins à New York et se rencontrent à une fête de voisins pour le 4 juillet. Entre ces deux fils d’œnologues, une belle amitié naît. Lorsque Pierre Caizergues rentre en France deux ans plus tard et qu’il lance son entreprise de production et négoce de vins, Antonin Bonnet décide de lui donner un coup de main depuis New York, tout en continuant son activité d’importateur de vin.
C’est pendant la pandémie que les deux amis décident de franchir le pas : Antonin Bonnet rentre dans l’aventure, et ils lancent ensemble la marque Pierre & Antonin. Les deux associés décident de croiser des vignes locales avec des vignes sauvages américaines, résistantes aux maladies, et s’installent au Domaine de Stricou, non loin de Carcassonne. « Nous possédons six hectares et produisons près de 200.000 bouteilles par an. Notre particularité est que nos vins sont issus de cépages hybrides résistants, ils sont naturellement immunisés contre les maladies comme le mildiou et l’oïdium. Ils sont aussi le fruit d’une fermentation spontanée, sans utilisation de soufre ni de cuivre », explique Antonin Bonnet. Des vins dans leur forme la plus pure en somme, grâce à cette démarche qui va encore plus loin que la certification bio (qui interdit les pesticides et herbicides mais autorise le soufre et le cuivre).
Pour arriver à ces vins super naturels, le duo utilise des cépages hybrides plus résistants, qui n’ont donc pas besoin d’être traités. Des noms moins connus comme le souvignier gris, le cabernet cortis ou encore le grenache bouquet. Cela signifie moins de passages en vigne avec le tracteur, et une empreinte écologique bien moindre. Par rapport aux exploitations traditionnelles, Pierre & Antonin affiche une consommation d’eau divisée par trois et un impact carbone total divisé par quatre à cinq, fait valoir Antonin Bonnet. Ils ont lancé un mouvement : les deux jeunes hommes ont aussi réussi à rassembler dix vignerons locaux autour de cette ambition, et leur achètent du raisin pour le vinifier eux-mêmes.
L’engagement écologique se poursuit jusque dans la bouteille. Le bouchon en liège est 100 % français et fabriqué dans le Roussillon ; la bouteille allégée (395g) est encapsulée avec de la cire naturelle et non avec de l’aluminium industriel, et elle est fabriquée à Albi, à moins de 80 kilomètres des vignes ; l’étiquette est en fibres alternatives et recyclées (fibres de canne, chanvre et lin).
Cette méthode de production fait des amateurs dans les pays qui ont pris des engagements pour diminuer leur empreinte carbone, comme les pays nordiques et le Canada, et dans les arrondissements parisiens les plus consommateurs de vins naturels (9e, 10e, 11e, 12e), mais c’est à New York qu’ils sont le plus implantés, grâce à la présence d’Antonin Bonnet. « Brooklyn est notre plus gros marché, il représente 50% de notre chiffre d’affaires », en particulier les quartiers de Williamsburg, Greenpoint, Bed-Stuy, Bushwick, et ceux en pleine gentrification, très friands de ces vins naturels. Ils produisent du vin blanc, rosé, orange – « Vigne Rebelle », qui a le vent en poupe -, et du rouge, pour un chiffre d’affaires de 800.000 euros, en croissance de 20% par an depuis quatre ans aux États-Unis. Mais leur best-seller est probablement le pétillant naturel, dit « pet-nat », qui pétille aussi grâce à une fermentation spontanée en bouteille, et connaît un franc succès.