Si vous vous baladez dans les rues de New York ces jours-ci, vous croiserez probablement l’affiche des dix ans du Chelsea Film Festival. Dessus, deux visages souriants, celui d’Ingrid Jean-Baptiste et de sa mère, Sonia, les fondatrices françaises de ce rendez-vous cinématographique qui se tiendra du 13 au 16 octobre au Regal Union Square. « Ça fait bizarre de se voir », sourit Sonia, en posant à côté d’un poster visible sur un abri-bus de la 6e Avenue (ci-dessus).
Dix ans donc que le duo mère-fille régale les cinéphiles de New York avec ses premières de films internationaux engagés. Ingrid Jean-Baptiste, qui est actrice en plus de productrice du festival, a toujours du mal à le réaliser. « Quand on est en plein dedans, on a du mal à se rendre compte que cela fait une décennie, dit-elle. On a commencé avec dix-sept films. On en est maintenant à cent cinquante deux ! ».
Elle a eu l’idée de lancer cette manifestation annuelle à la suite d’un grave accident de la route dans lequel elle a failli trouver la mort. En se remettant de ses blessures physiques (côtes cassées, coma, lésions de la colonne vertébrale…) et du traumatisme, elle a revu ses objectifs de vie. Elle et sa mère, qui était également dans le véhicule, ont monté le premier Chelsea Film Festival en octobre 2013 avec l’ambition de mettre en avant les œuvres de cinéastes émergents et indépendants pour « rendre le monde meilleur ». « Depuis cet accident, j’ai clairement une force supplémentaire », glisse Ingrid Jean-Baptiste.
De la force, il a en fallu pendant toutes ces années. En 2016, les organisatrices ont lancé un appel aux dons pour éviter de baisser le rideau. Confrontées à la crise sanitaire et la fermeture des frontières quatre ans plus tard, elles ont dû faire l’événement intégralement en ligne – il est hybride depuis. Bon an mal an, le festival est parvenu à « trouver une assise dans la profession », poursuit Ingrid Jean-Baptiste. « Plusieurs membres de l’Académie des Oscars regardent et aiment ce qu’on fait. Certains font partie de nos jurys » et sont chargés de récompenser les meilleurs courts et longs-métrages dans leur catégorie (séries TV, documentaires, animations…).
Plusieurs pépites ont ainsi été repérées au Chelsea Film Festival. Un an après avoir été récompensé pour « Les petits Princes » lors du rendez-vous new-yorkais, le réalisateur Vianney Lebasque voyait son film nommé aux César (dans la catégorie meilleur espoir masculin pour le jeune Paul Bartel, qui assure le rôle principal). Autre exemple : le film turque « Keeping the Bees », qui a été acheté par Netflix. « La réalisatrice l’avait soumis à la limite de la date butoir et quand je l’ai vu, j’ai été impressionnée… L’autre jour, je l’ai vu dans l’avion car il était proposé par la compagnie ! Ça fait vraiment plaisir », se félicite Sonia Jean-Baptiste.
En tant que programmatrice en chef, c’est elle qui a la lourde responsabilité de visionner toutes les œuvres soumises au festival – plus d’un millier chaque année. « Je les regarde toutes du début à la fin. Je pars dans les histoires… Il y a de vrais trésors dans le lot », ajoute-t-elle. « Les réalisateurs indépendants nous remercient. Pour eux, c’est parfois difficile d’entrer dans des festivals réservés à l’élite, reprend Ingrid Jean-Baptiste. C’est pour eux que nous nous devons d’exister ».
Chelsea Film Festival
Du 13 au 16 octobre
Regal Union Square (850 Broadway, New York) et en ligne