Quand on est Français, on se doit de savoir cuisiner: qui n’a jamais ressenti cette injonction aux Etats-Unis? Comme si le boeuf bourguignon était dans notre ADN! Comme ce n’est pas mon cas, je décide de prendre le taureau (braisé) par les cornes.
Je m’inscris donc au “boot camp” de la prestigieuse école américaine, la Culinary Institute of America (CIA). L’institution a formé la crème des chefs américains, d’Anthony Bourdain à Charlie Palmer, Steve Ells, le fondateur de Chipotle restaurateur de génie, et un certain Jérôme Bocuse.
Fondée en 1946 par des vétérans de la Seconde Guerre mondiale, elle propose deux cycles majeurs : un programme de base de deux ans et un niveau Bachelor. Et des séjours de formation – dits ‘boot camps’ – pour les professionnels et les “enthousiastes”.
Je ne manque pas d’enthousiasme. La brochure des “boot camps” est appétissante : stages de pâtisserie, oenologie, cuisine française et italienne, pains, etc. (formules entre 2 et 5 jours). Et le campus a de quoi faire rêver : à deux heures au nord de New York, Hyde Park, l’un des quatre sites du Culinary Institute of America (les autres sont à Greystone et San Antonio en Californie, au Texas et à Singapour) a vue sur la rivière Hudson. Elle dispose d’une salle de sports avec piscine, de terrains de tennis et cinq restaurants…
Je choisis le ‘boot camp’ de techniques de cuisine sur quatre jours. Direction la gare de Grand Central et c’est parti pour ma semaine de vacances culinaires. Du moins, c’est ce que je croyais…
Jour 1 : lever à 5 h 30
Réveil à 5 h 30 pour se présenter au réfectoire à 6 h 30. Il ne manque plus que le clairon. La cafétéria située dans une ancienne chapelle est tenue par les élèves (toute la production de l’école est consommée sur place). Au menu, une grande variété de pains- préparés par les élèves de la filière boulangerie-pâtisserie -,des muffins, omelettes, bouillie d’avoine, salades de fruits.
Puis vient le premier cours. Le chef Phil Crispo forme les brigades et répartit les recettes à exécuter. Nous enfilons les uniformes fournis par l’école. Il est interdit aux élèves de déambuler dans les couloirs sans l’uniforme et le port de la toque est obligatoire en cuisine. On me rappelle à l’ordre car j’ai oublié de boutonner le dernier bouton. S’ensuit l’entrée en cuisine, une vaste pièce avec une dizaine de “stations” et un équipement de pointe : des étagères entières de mixers ultra-puissants, des trousseaux de “cups” et “spoons” de toutes les tailles. Bref, pas comme à la maison… Le garde-manger rempli avec des produits de la région de l’Hudson. Première étape : la mise en place. S’ensuit la progression des recettes. Ma caponata d’aubergine brûle. C’est Hell’s Kitchen. 12 h 30, c’est le “coup de feu”. Nous présentons les plats sur un grand buffet. Nous sommes notés sur la présentation aussi. Malheureusement ma caponata souffre de la concurrence des plats de mes camarades de brigade qui se révèlent être des professionnels. Aucun doute, je suis le maillon faible!
Dégustation des mets. C’est le bon côté d’être entourés de pros…Tout est délicieux. Puis, retour en classe. Le chef passe en revue les plats et émet ses critiques. Je me cache sous la table. L’après-midi se poursuit par un cours théorique intitulé ‘physiologie du goût’, durant lequel le chef fait découvrir les cinq goûts, dont l’umami, une saveur produite par la stimulation des papilles par l’acide glutamique.
Jour 2 : Do you speak “Kitchen French”?
Introduction aux techniques appliquées de cuisson : pocher des filets de turbot, le saumon, cuisson “à la nage.” Le groupe se tourne vers moi. Ils semblent affligés quand je leur dis que je ne connais même pas la signification de “mirepoix”, “concassé” ou “brunoise”. No I don’t speak “kitchen French”!!
Jour 3 : la cuisine saine
Après une introduction aux techniques de ‘cuisine saine’, nous devons exécuter des plats en version traditionnelle et en version ‘saine’. Au menu, thon grillé sur lit de salade assaisonnée d’une marinade au vinaigre balsamique. Je remplace une portion d’huile dans la marinade par une portion de bouillon de légumes et de l’arrow-root, un épaississant alimentaire. Exercice de style autour des pâtisseries aussi, exécutées de trois façons : sans gluten, végétalienne (sans oeuf ni lait), et sans sucre.
Jour 4 : après l’effort, le réconfort
Au programme, la technique du pilaf et du sous vide. Toutes les demi-heures, le chef fait des démonstrations, comme le turbot poché sauce estragon, beurre et vin blanc, le poulet rôti, mirepoix (il s’agit donc d’une préparation à base d’oignons, carottes, céleris, taillés en gros dés).
Je décide d’aller piquer une tête dans la piscine avant de repartir. Une affiche géante de Paul Bocuse “chef du siècle” recouvre la façade du complexe sportif du campus. La force de Bocuse reste avec moi!
Guide pratique
CIA : Liste de boot camps, prix et dates : ICI
Y aller : 1 h30 de train depuis New York 32 $ aller-retour avec Metro North depuis la gare de Grand Central, ou environ 50$ avec Amtrack depuis Penn Station jusqu’à la gare Poughkeepsie.
Où résider : Le Petit Château Inn. Un bed & breakfast charmant. On se croirait en France, avec ses 4 chambres baptisées Rhône ou Bordeaux, et une propriétaire importatrice de vins qui parle français. Environ $200 la nuit. Les autres options pour séjourner sont le Holiday Inn et le Roosevelt Hotel (environ $100 la nuit)
Où manger? On déguste toute la journée. Alors pas besoin de dîner, enfin si mais bon, si on veut découvrir la vie nocturne de Poughkeepsie…
–Crew, tenu par des anciens élèves du CIA
–Half time: une séléction de 15000 bières
-American Bounty, l’une des meilleures tables de la région, tenue par des élèves qui sont dans les deux derniers mois de leur cursus. Le restaurant réalise 100 couverts par jour $200.
Que visiter?
Eleanor Roosevelt National Historic Site (Val-Kill).
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et c’est combien le “boot camp” ?