Il fallait bien que le Met Breuer marque les esprits pour sa première saison. On peut dire que c’est chose faite avec l’exposition « Diane Arbus: in the beginning », qui occupe les lieux jusqu’au 27 novembre. Au total, une centaine de clichés pris au début de la carrière de la photographe a été réunie, dont les deux-tiers n’avaient jamais encore été montrés publiquement.
Aussi talentueuse que controversée, l’Américaine est considérée comme l’une des artistes les plus influentes du XXème siècle. La galerie du Met Breuer revient sur les sept premières années de sa carrière (1956- 1962) qui ont vu naître son style si singulier. La plupart des photographies ont été prises à New York, ville qu’elle a arpentée comme un territoire familier et étranger à la fois. Diane Arbus a su poser un regard aiguisé sur quelques-uns de ses quartiers de prédilection : Times Square, Lower East Side ou encore Coney Island. Des couples et des enfants, des forains et des travestis, des personnes âgées, des nudistes et des célébrités… La photographe a capturé l’excentrique et l’ordinaire, les personnalités atypiques, les situations déroutantes, voire dérangeantes comme son cliché de cadavre « Corpse with receding hairline and a toe tag » datant de 1959. « C’est un peu embarrassant pour moi de dire ça, mais je crois vraiment qu’il y a des choses que personne n’aurait vu si je ne les avais pas photographiées », assumait l’artiste, reconnue sur le tard.
Captivée par l’univers de la photographie, elle se fait offrir un appareil au début des années 1940. Au cours des quinze années qui suivent, elle travaille comme styliste dans une société de photographie de mode qu’elle partage avec son époux, avant de choisir de se consacrer pleinement à sa passion en 1956. Elle utilise à l’époque un appareil 35 mm, qui laisse un « grain » notable sur ses clichés. Elle supprimera cet effet dès 1962 en passant au format Rolleiflex, un choix déterminant dans sa carrière. A sa mort en 1971, ses archives sont léguées à ses deux filles mais de nombreux travaux restent au fond des cartons de sa cave de Greenwich Village. La première partie de son oeuvre demeure ainsi dans l’ombre des années durant. En 2007, l’Arbus Estate fait don de la totalité des archives retrouvées au Met : carnets, négatifs, correspondances, collections personnelles…
Le deuxième étage, où se trouvent les clichés, est conçu pour permettre au public de déambuler à sa guise : pas de galeries séquencées, ni organisées de façon thématique. Pas non plus de début, de milieu ni de fin: les visiteurs sont libres de suivre le chemin qu’ils souhaitent. « Pour l’anecdote, ce qui rend l’exposition encore plus particulière, c’est que les photos ont été imprimées par Diane Arbus elle-même », a précisé le directeur du Met, Thomas Campbell, lors d’une conférence de presse. Pour qualifier les premiers pas de l’artiste, le conservateur en charge du Département de la Photographie, Jeff Rosenheim, a parlé de « divin dans les choses ordinaires » . Venez vérifier par vous-même.