Situés à Glendale, au nord de Los Angeles, les vastes quartiers généraux de Dreamworks, de style hispanisant, abritent un Starbucks, un restaurant gratuit, des terrasses paysagées qui donnent sur une vaste mare où s’ébattent de magnifiques poissons koï. Un cadre de travail idyllique, qui figure au palmarès des « 100 meilleures sociétés » du magazine Fortune, comme le rappellent des autocollants sur les portes d’entrée. Lucas Janin fait fièrement faire le tour du propriétaire à ses visiteurs. « J’ai le sentiment d’être dans le top de ce qui se fait ».
Le Lyonnais d’origine est un des « animateurs effets » de la compagnie californienne depuis 3 ans. Recruté par Dreamworks à Montréal où il réalisait des effets spéciaux pour le cinéma (300, Fantastic Four ou Scoubidou 2), il reconnaît préférer l’univers du « Seigneur des Anneaux » ou de « Avatar », mais éprouve le sentiment d’être privilégié dans ce secteur du divertissement. « En animation, on dispose de plus de temps que dans le cinéma live. Les projets sont longs et c’est agréable d’avoir du temps, y compris celui de se tromper et de recommencer ».
La durée de conception d’un film d’animation s’étire généralement sur deux ans, entre la première ébauche du script et la « touche de peinture » finale. Arrivé sur « Kung Fu Panda », Lucas collabore à « Monsters versus Aliens », avant d’embarquer dans l’équipe du dernier Shrek. Avec ses millions d’entrées et son Oscar en 2001, l’ogre vert est devenu l’emblème de Dreamworks qui continue d’exploiter ce fantastique filon. « Faire une suite peut paraître facile, mais cela garantit un box office minimum. Ce qui permet de financer des films originaux » estime Lucas.
En plus de mettre un point final à la série, « Shrek Forever After » (titré en France « Il était une fin » sortie le 14 juillet) change de registre. Plus sombre, il met en scène notre ogre vedette mal à l’aise dans sa condition de bête de foire. Une crise existentielle qui va l’amener à conclure un pacte avec un lutin diabolique…
Dans l’immense open space qui abrite l’équipe des « effets », l’imagerie du film s’affiche sur de nombreux murs, où l’on retrouve les iconiques oreilles vertes et les décors peints du Royaume de « Far Far Away ». Là, Lucas a œuvré de longs mois sur deux plans du dessin animé : la conception des armes des sorcières, pommes fumigènes et citrouilles explosives et la scène où Shrek détruit le mur de sa maison de terre. Chaque projection de terre ou jaillissement de fumée nécessite de très longs calculs pour que les images de synthèse approchent de la perfection réaliste. « Les outils techniques sont tellement riches maintenant, il faut trouver la manière de procéder, se remuer les méninges. J’aime ça ! ».
Diplômé d’un DUT Génie Industriel, Lucas Janin n’a pas le profil typique du jeune animateur maison. Adolescent, il découvre comment contrôler ses trains électriques avec un Amiga puis se met à la 3D avec passion. « Ceux qui ont fait des écoles arrivent ici rapidement, moi j’ai mis 15 ans ! », reconnaît-il. La fameuse « french touch », ce sont ces formations reconnues, l’école des Gobelins à Paris ou Supinfocom à Valenciennes, qui constituent un vivier pour les studios d’animation américains. Avec un rythme de 2,5 films par an, Dreamworks recrute de façon exponentielle. Régulièrement amené à conseiller de potentiels expatriés, Lucas tient un blog en français. « J’y mets ce que j’aurais aimé lire il y a dix ans, des infos sur les visas ou sur les techniques d’effets spéciaux ». L’occasion d’y découvrir ses images de Los Angeles, bien réelles cette fois mais tout de même patiemment retouchées.
Photos: Shrek Forever After ™ & © 2010 DreamWorks Animation LLC. All Rights Reserved.
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