« À l’origine, je devais rester trois jours ici mais je suis restée plus longtemps pour écrire ». Assise sur les chaises rouges métalliques de la terrasse du café Cantata de Haight Street, Lola Lafon profite du soleil californien de novembre avant de repartir en France.
L’écrivaine d’origine franco-russo-polonaise distinguée par dix prix littéraires dont le Grand prix de l’héroïne Madame Figaro en 2014, est installée depuis deux semaines dans un appartement de la Résidence de France, quelques blocs plus haut, sur une colline de la ville.
Les bribes de son futur roman
En tournée promotionnelle pour la version anglaise de La Petite Communiste qui ne souriait jamais, son best-steller vendu à plus de 100 00 exemplaires, Lola Lafon a participé au festival Gender in Translation, au San Francisco Art Institute, consacré au dialogue franco-américain sur les études du genre. Elle a également rencontré ses lecteurs lors de deux lectures publiques. Le reste du temps, l’écrivaine s’est penchée sur son prochain livre : « J’écris une fiction qui se passe en France mais qui a un rapport avec San Francisco ».
Sans vouloir faire de mystère autour de son futur roman, Lola Lafon a du mal à évoquer le rendu final. « J’écris toujours de multiples versions étalées dans plusieurs dossiers de mon ordinateur, dévoile-t-elle. Ce qui m’intéresse c’est de questionner. Très souvent, je change d’avis à la fin d’un roman ».
Le rapport à San Francisco réside dans l’un de ses personnages qu’elle « examine » qui n’est autre que Patricia Hearst, la jeune héritière du magnat américain de la presse, kidnappée à Berkeley en 1974. « Je travaille sur la notion de choix, sur la notion de radicalisation. J’examine une jeune femme de 19 ans qui va se convertir à la cause de ses ravisseurs. À l’époque, ce n’est pas la religion, c’est le marxisme. »
Sa lecture de San Francisco
Deux ans après un premier passage éclair dans la Fog City où elle avait rencontré des élèves du Lycée Français de San Francisco, Lola Lafon a eu « un coup de foudre esthétique pour la ville ». Le quartier de Haight Ashbury, berceau de la culture hippie, en contrebas de la Résidence de France, l’a particulièrement troublée. « Il y a des gens très jeunes dans la rue et on a l’impression qu’ils rejouent le film des années 70. Parfois j’ai l’impression de voir des gens sortir tout droit d’un clip de Nirvana ! »
C’est aussi dans ce quartier que l’écrivaine se trouvait le soir de l’élection surprise de Donald Trump. « Comme tout le monde, je me préparais à faire la fête. J’y ai assisté en direct avec une sensation de sidération, raconte l’auteure féministe. J’ai vraiment peur pour les Américaines quand je vois sa position sur l’avortement. C’est systématique, sous tous les régimes, du communisme à Donald Trump, notre corps est un enjeu pour les religions et pour les politiques aussi. C’est troublant à quel point l’utérus appartient à l’État et à l’Église ! »