Chic et tout sourire, Lilo de la Passadière a soufflé sa 100ème bougie le 2 mars dans un restaurant de Midtown en compagnie de ses amis et du Consul général de France à New York Jérémie Robert. “Chère Lilo, votre beauté et votre talent vous ont menée du théâtre du Châtelet à [Broadway]; vous avez brillé en Amérique et êtes devenue une new-yorkaise. Aujourd’hui vous avez de nombreux amis qui vous adorent et ensemble ont organisé pour vous cette fête d’anniversaire”, a souligné le Consul pendant son discours en hommage à la centenaire.
Il faut dire que l’histoire de Lilo de la Passardière mérite d’être célébrée. Née à Paris en 1921, la Française débute comme ballerine au théâtre du Châtelet, poussée par une mère obstinée “qui voulait que je devienne quelqu’un de connu dans le monde du théâtre”. Elle est ensuite engagée à seulement 16 ans comme présentatrice au Théâtre de l’ABC, où elle va contribuer au développement du music-hall à Paris aux côtés des plus grands comme Edith Piaf et Charles Trenet. C’est en chantant et dansant dans une opérette sur la scène de Bobino qu’elle va ensuite faire la rencontre du marquis Guy Jourdan de la Passardière, qui deviendra son mari en 1947. “Je me souviens qu’il était venu avec sa petite amie de l’époque ce soir-là. Mais quand nous a présentés, nous sommes tombés fou amoureux l’un de l’autre”, se souvient Lilo de la Passardière. “Les coups de foudre existent encore. Notre amour aura duré jusqu’à sa mort”.
Guy Jourdan de la Passardière va aider Lilo à développer sa carrière. Il fait d’elle une célébrité à Londres comme meneuse de revue aux Folies Bergères. Mais c’est à son retour à Paris au théâtre du Châtelet, en jouant dans l’opérette de son ami Luis Mariano “Le Chanteur de Mexico” qu’elle va connaître la popularité en France… avant d’attirer l’oeil des producteurs américains. “Je crois que c’était en 1951 ou 1953. Un Américain est rentré par la porte d’entrée des artistes un soir au Châtelet et a demandé à me parler. Je ne comprenais rien car je ne parlais pas un mot d’anglais”, se rappelle Lilo dans un sourire. “Il m’a demandé si j’aimerais partir faire un essai à Broadway à New York. Il s’agissait en fait du célèbre compositeur Cole Porter”.
Très heureuse à Paris, Lilo de la Passardière accepte finalement la proposition de Cole Porter car “le dollar était une monnaie affectueuse à l’époque“. Elle est engagée en 1953 pour être la star de la nouvelle comédie musicale “Can-Can” à New York. Un tournant dans sa carrière puisque la Française ne quittera plus jamais la Big Apple, participant au succès du genre des comédies musicales aux Etats-Unis. Celle qui a gagné au fil des années le surnom de “marquise de Broadway” se sera produite plus de 900 fois sur une scène de Broadway dans sa carrière. “Je garde de nombreux souvenirs mais il y en a un qui m’a particulièrement marqué”, explique Lilo. “C’était le soir de la première de “Can-Can” à New York. Une Française s’est fait arrêter pour avoir envoyé un bouquet de fleurs sur scène en pleine représentation. C’était quelque chose qui se faisait à Paris, mais pas ici. On avait dû arrêter le spectacle en plein milieu”.
Impressionnante d’énergie et de bonne humeur, Lilo de la Passardière n’a pas apprécié la fermeture des théâtres il y a un an, en raison de la Covid-19. “Il n’y a plus rien pour s’amuser. Je trouve ça très triste, il faut qu’ils rouvrent très vite”, évoque celle qui continuait à aller voir des spectacles sur Broadway avant la pandémie. En un siècle, la comédienne a traversé nombre de guerres et crises, alors la Covid-19 ne va pas entamer son moral. “Le secret, c’est de bien choisir ses amis. Je ne m’entoure que de gens qui me font rire”, lâche la centenaire avant d’ajouter, hilare : “mon autre secret c’est d’être Française, d’embêter les gens autour de moi”.