C’est au Guatemala, dans une forêt luxuriante, qu’Eva Calonder a composé le dessin qui a changé sa vie. Un croquis en noir et blanc qu’elle a eu envie de voir imprimé sur du tissu. Installée aux Etats-Unis depuis six ans, cette Française fait grandir Printed Wild, sa marque de sacs, pochettes, torchons, coussins et bientôt papeterie. Tous portent fièrement le label « handmade in Washington DC ».
Eva Calonder a grandi sous le soleil d’Aix-en-Provence. Et s’est installée à DC pour suivre son compagnon. Mais, hasard de l’histoire familiale, elle venait déjà à Washington petite fille, pour rendre visite à son grand-père, un diplomate cubain en exil. « Mes grands-parents avaient une maison sur Massachusetts Avenue. Quand je repasse devant leur maison, ça me pince le coeur », raconte-t-elle.
Son bac en poche, la jeune femme étudie à l’école de dessin Emile Cohl à Lyon, une référence en France. Elle se serait bien vue devenir illustratrice de livres pour enfants. Mais le secteur est déjà saturé. Elle se tourne alors vers le graphisme. Mais « la pub, ce n’est pas mon état d’esprit, c’était frustrant », reconnaît-elle.
Sa profession aujourd’hui, c’est donc « designer textile ». Mais pour lancer sa marque, il lui a fallu apprendre la sérigraphie, la couture. Et comment faire tourner une entreprise. « Pour mon premier salon de créateurs, j’étais venue avec une amie qui m’a demandé en arrivant : ‘qu’est-ce que tu as pour décorer ton stand ? tu as de la monnaie ?’… Je n’y avais pas trop réfléchi, faire un ‘business plan’ ce n’est pas du tout mon truc. Mais aujourd’hui, j’essaie de structurer un peu les choses », explique-t-elle.
Au fil des années, Eva Calonder s’est aussi engagée à utiliser du coton biologique, à choisir du cuir dont le tannage ne nécessite pas de chrome, à travailler avec des ouvrières installées à Washington. « Quand je suis arrivée aux Etats-Unis, dans cette société de surconsommation, je me suis dit qu’on ne pouvait pas fermer les yeux », argumente la jeune femme qui attend son premier enfant.
Depuis quelques semaines, Eva Calonder a installé ses carnets à dessin dans un tout petit atelier du Heurich House Museum. Un lieu unique créé par un philanthrope à Dupont Circle, au calme, bordé d’un beau jardin. De l’inspiration à portée de main : « A Washington, il y a des arbres partout. Je suis arrivée dans cette ville au bon moment, quand la tendance ‘made-in-DC’ a explosé. A New York, c’est saturé. Ici, on peut se faire une place », raconte-t-elle.
L’année dernière, elle a produit presque un millier de pièces. Ses produits sont en vente dans la boutique Salt & Sundry. Eva Calonder le répète : elle se sent « vraiment française ». Mais « ici, il y a un tel enthousiasme, c’est une chance ».