Voilà presque un an qu’il a annoncé son départ à la retraite. L’heure aura sonné à la fin du mois: «Ma décision de partir a été difficile. Je veux désormais me consacrer à de nouveaux projets. Il y a d’autres choses que je veux faire pendant que je suis en bonne santé en pendant que je suis encore capable de les faire», explique-t-il. Nommé officiellement le 4 décembre dernier, administrateur du Musée d’Orsay à Paris, il devrait par ailleurs enseigner à l’Institut of fine arts de New York. «Je veux enseigner, je veux penser, je veux m’impliquer dans d’autres choses. Il y a beaucoup d’histoires de musée, d’histoires de collection qui me fascinent et auxquelles je veux m’intéresser maintenant », ajoute-t-il.
Philippe de Montebello a grandi dans un milieu littéraire. Il est issu d’une famille aristocrate napoléonienne, sa mère descend du Marquis de Sade et son père est un portraitiste, critique d’art. Il décide de partir aux Etats-Unis pour étudier l’histoire de l’art à Harvard puis à l’Institut of fine arts de New York. En 1963, il obtient son doctorat sur ‘’la renaissance française’’. La même année, il entre au Metropolitan comme assistant conservateur des peintures européennes et en devient directeur en 1977. Durant l’ère Montebello, le Metropolitan est devenu le premier musée au monde devant Le Louvre, passant de 3,5 millions à 4,6 millions de visiteurs par an.
Sous l’ère Montebello, la surface du musée a doublé, les collections explosé; un travail unanimement salué par le monde de la culture. Et pourtant, il assure se «réjouir que toutes ces bonnes années soient derrière moi. Le monde a changé. Toutes les exigences, les demandes, les réglementations, les législations évoluent et rendent mon travail bureaucratique et administratif. Ce travail n’est plus en lien avec ma passion première qui est de travailler avec l’art, de travailler avec le conservateur. Je ne suis ni un administrateur, ni diplômé d’une école de commerce. Je suis un historien de l’art ». Il raconte souvent cette anecdote du jeune Philippe de Montebello qui postule au Met et qui n’obtient pas le poste car les contraintes sont plus importantes. Et de souligner : « peut être que le jeune Montebello ne voudrait pas non plus de ce poste ». Il a d’ailleurs refusé, il y a quelques années, de prendre la direction du Louvre. « C’est un musée d’Etat et toutes les décisions sont prises par le Ministre. J’avais beaucoup plus de responsabilité dans mes fonctions de directeur du Met».
A l’annonce de son départ en janvier dernier, le New York times « pleurait » celui qu’il a surnommé «le Roi soleil» pour avoir «fait du Met, ce que Louis XIV a fait de Versailles ». Le directeur reconnaît qu’il a toujours travaillé pour le bien du Met, sans jamais se soucier des critiques ou des commentaires. On lui a souvent reproché «son conservatisme à l’égard de l’art contemporain» et son «élitisme». A ce moment, le soleil pénètre dans le bureau de Philippe de Montebello, situé au dernier étage du musée, et balaie de ses rayons les milliers de livres d’histoire qui couvrent 5 000 ans d’histoire de l’art. Il reconnaît volontiers être élitiste. Il aime l’art et a énormément travaillé pour comprendre les subtilités de tel ou tel artiste. «Tout le monde est élitiste. L’élitiste est celui qui cherche à s’améliorer, à se cultiver, à élever son niveau». Philippe de Montebello reconnaît également ne pas apprécier «l’art contemporain à sa juste valeur», même s’il a ouvert, il y a quelques années au Met, une galerie consacrée à l’art moderne. Le directeur du Met a façonné le musée à son image, un mélange d’Europe, d’art Italien et d’esprit New Yorkais. «Le Met diffère des autres musées car il est le seul qui réunit à la fois toutes les périodes de l’histoire, les armures et les costumes, les arts décoratifs ou encore les arts primitifs», explique-t-il.
Brillant, passionné, amoureux du musée, Philippe de Montebello a passé les trente dernières années à parcourir les allées du Met. Il est le maître des lieux, connaît chaque endroit, chaque secret, il est le gardien du temple. C’est avec une pointe de tristesse qu’il cédera sa place dans quelques jours. Il avoue, d’une voix timide, que le Met va lui « manquer », mais que « c’en est assez pour le Met ».
-Exposition: « The Philippe de Montebello Years. Curators celebrate three decades of acquisitions » présente 300 des 84 000 pièces acquises par Philippe de Montebello au cours des trois dernières décennies. L’exposition est à découvrir au Metropolitan Museum jusqu’au 1 er février prochain.
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