Tandis que l’amputé des quatre membres Philippe Croizon vient de boucler la deuxième étape de son défi de nager de l’Afrique à l’Asie via la mer Rouge, un autre Français s’apprête à se lancer dans une traversée océanique : celle du Pacifique.
Résidant au Texas depuis près de vingt ans, naturalisé américain, Benoît ou plutôt Ben Lecomte a déjà traversé l’Atlantique à la nage et à la dérive en 1998. Un exploit comparable à celui de Guy Delage, qui a rallié seul le Cap-Vert à la Barbade (4 000 kilomètres) avec un radeau en 1994. Benoît Lecomte a quitté Cap Cod, près de Boston, pour la presqu’île de Quiberon, dans le Morbihan (près de 5 300 kilomètres), sans planche, mais avec l’assistance des deux membres de l’équipage du bateau qui le suivait. Cette première aventure était dédiée à son père, qui lui a appris à nager et est mort de cancer en 1991. Elle a notamment permis de récolter des fonds pour lutter contre la maladie.
“Vivre sans regrets”
Depuis, Ben Lecomte a fondé une chaîne de spas avec sa compagne, passé un diplôme d’architecture et eu deux enfants, aujourd’hui âgés de onze et cinq ans. Mais il n’a jamais cessé de nager. « Je ne pensais pas que je repartirais, quand j’ai atteint la Bretagne en 1998, j’ai dit ‘plus jamais’. Mais la passion est toujours là », confie le quadragénaire, conscient que son projet transpacifique, prévu pour durer six mois, « affecte considérablement sa famille ». Mais il ne veut « pas vivre avec des regrets » et ressent le besoin de « repousser ses limites ».
Entre défi personnel et message universel
« Je ne tiens pas particulièrement à être le centre de l’attention, assure pourtant le sportif, qui a confié la gestion du “Longest Swim” à la société de production de films et de communication globale Ridgeline Entertainment. Je préfère qu’on me laisse nager ».
Pour Ben Lecomte, cette traversée du Pacifique à la nage (et sans dérive cette fois) doit avant tout permettre de démontrer qu’il ne faut jamais cesser de poursuivre ses rêves. « Du fait de la situation économique, beaucoup pensent que le rêve américain est mort, qu’il n’est plus possible de se fixer des objectifs. Mais moi, des personnes comme Gérard d’Aboville ou Loïck Peyron m’ont énormément influencé. Je n’aurais jamais trouvé l’inspiration sans eux. Et quand je faisais la traversée de l’Atlantique, je recevais des messages de personnes partageant leurs difficultés et j’avais l’impression de faire quelque chose de positif. Tout au long de notre périple dans le Pacifique, moi et mon équipage de marins et de scientifiques allons donc être en contact en continu avec le public afin de faire passer ce message de motivation et d’endurance ».
L’aventure maritime, spécialité française ?
En attendant le grand départ de Tokyo pour San Francisco, début août, le nageur s’entraîne quatre à six heures par jour, six jours par semaine, dans une piscine d’Arlington, tout en finissant de mettre au point les différents instruments qui permettront aux chercheurs impliqués dans le projet d’étudier son état de santé physique et psychologique. Quand on parcourt une telle distance à la nage, « il est plus aisé de penser à l’heure, car il est difficile de réaliser ce qu’il va falloir faire », explique Ben Lecomte, qui note que ce sont « bien souvent des Français » qui s’imposent des défis dépassant l’entendement.
Crédit photo : Gino Kalkanoglu.