Ce sandwich, au nom faisant référence à la France, se trouve à la carte d’un grand nombre de restaurants aux États-Unis. Minetta Tavern en serait le spécialiste du genre à New York. À San Francisco, le restaurant de chaîne Hillstone dégaine une version courue par toute la ville. Et à Los Angeles, Philippe The Original et Cole’s French Dip en ont fait leur emblème.
Préparé généralement à partir d’une baguette servie chaude, garnie de tranches de rosbif finement coupées (parfois d’agneau ou de porc), le fameux sandwich se trempe (dip), au fil de sa dégustation dans un bol de jus de viande. D’autres versions varient le principe en proposant une cuisson du pain directement dans le jus. Certains endroits l’accompagnent de coleslaw, d’autres du traditionnel cornet de frites.
À Los Angeles, le restaurant Philippe The Original, situé à la limite de Downtown LA et du quartier de Chinatown, en serait, selon ses propriétaires, bel et bien l’inventeur. On le devrait à un immigrant français, Philippe Mathieu, fondateur de ce restaurant en 1908. Proposé pour la première fois en 1918, le sandwich serait né par accident, de la chute d’une tranche de pain dans une rôtissoire, remplie du jus de viande. Un client policier le trouvant à son goût, aurait ainsi lancé la mode. Un article du Los Angeles Times daté de 1951, varie légèrement l’explication, racontant l’expérience d’un client qui, à la vue, de la sauce au fond d’une casserole, aurait demandé au chef d’y tremper un côté du pain. Quoiqu’il en soit, la gourmandise devient rapidement un best-seller.
Mais à Los Angeles, un autre acteur, n’ayant rien de français, revendique lui aussi la recette originale. Au cœur de Downtown, dans le quartier des théâtres, le Cole’s French Dip, genre de pub à la new-yorkaise, ouvert en 1908 (lui aussi), aurait servi à tous les cols bleus du quartier les premiers French Dip. Le poète Charles Bukowski, fidèle du lieu – et dont une plaque à sa mémoire « Charles Bukowski pissed here » se trouve dans les toilettes – en dévorait, dit-on, à répétition.
Pour prouver son authenticité, le restaurant Cole’s raconte que son cuisinier, Jack Garlinghouse, aurait trempé en 1908, dix ans avant Philippe, le pain dans du jus pour l’assouplir et le rendre plus facilement mangeable par les clients souffrant de problèmes de gencives et de dentition. Une version que la ville de Los Angeles confirmait en 1974, attribuant à Cole’s French Dip l’origine de la recette, réduisant à néant l’hypothèse d’une origine française dans l’histoire.
Engagé dans une recherche précise sur les origines du sandwich, le site Thrillist confirmait en 2017 l’absence probable de toute référence française à la recette. À la même époque de la naissance du sandwich, le terme « French Dip » qui s’utilisait fréquemment dans l’univers de la mode, décrivait un style de robe à taille basse populaire à l’époque. Une expression qui aurait été détournée dans le monde de la cuisine. Le site met également en avant l’absence, chez Cole’s French Dip, de menu indiquant l’existence du fameux sandwich avant 1930, semant un peu plus de trouble à l’affaire…
Pour ceux qui n’auraient jamais goûté au sandwich, ne pas prendre de petit-déjeuner ce jour-là permettra d’apprécier pleinement l’expérience. Un classique américain à consommer avec modération, la bête assurant (sans les frites) une charge de 500 à 600 calories.