Katrin Bennhold, du New York Times, s’est rendue dans la ville de Sochaux pour rencontrer les ouvriers de l’usine automobile Peugeot. Leur verdict est clair, tout comme celui de cette journaliste: l’action des syndicats est devenue inutile, à l’heure de la crise et de la mondialisation. Elle effectue un parallèle entre la France des années 30 et celle d’aujourd’hui: même marasme économique, mais actions syndicales diamétralement opposées. A l’époque du Front Populaire, en 1936, tout était à espérer et tout restait encore à gagner: les congés payés, la semaine de 40 heures, la protection des droits des travailleurs. En 2008, les syndicats sont ironiquement “victimes de leur succès“: les Français ont déjà des conditions de travail rêvées, que peuvent-ils demander de plus? s’interroge la journaliste.
Avec cynisme et désillusion, elle renchérit: lorsque les entreprises en sont réduites à mettre en chômage technique leurs employés faute de travail, les grèves, en plus d’être inefficaces, arrangent le patronat. Avec le recul, elle dégage trois raisons qui expliquent le déclin des syndicats: la pression compétitive de l’Europe de l’Est, la fragmentation du mouvement salariale, et enfin l’action de Sarkozy depuis son arrivée au pouvoir. A la fin de son article, Katrin Bennhold ne manque pas de rappeler que les syndicats français, loin de perdre espoir, continuent d’appeler à la mobilisation nationale, et ce, dès la fin janvier.
Dans l’édition U.S News du 24 décembre, Eduardo Cue se penche sur un sujet tout aussi polémique, mais quelque peu plus féminin: Rachida Dati. En trois pages élogieuses, il revient sur le parcours de cette dernière, avant de s’indigner de la tempête médiatique dans laquelle elle se trouve aujourd’hui embarquée. De sa biographie, le journaliste retient surtout les mots “conte de fée“, “courage“, “mérite“, “succès époustouflant et remarquable” et au final qualifie Mme Dati de “Cendrillon” des temps modernes. D’une naissance “dans le ghetto” à une robe Dior lors d’un dîner officiel à la Maison Blanche, la ministre de l’Intérieur prouve que les self-made women existent aussi de l’autre coté de l’Atlantique: “C’est la version française de “Yes, We Can” explique Eduardo Cue. Et pourtant, se désole ce dernier, Rachida Dati est en train de se faire torpiller par la classe politique française. Obscurantisme et sexisme de l’oligarchie politicienne vont avoir raison de la réussite de cette fille d’immigrés. A l’appui de son propos, il souligne que les Français sont bien plus interressés par la grossesse de Mme Dati que par ses accomplissements politiques. A croire que nous suivons l’exemple de la politique-scandale dont sont friands les Américains depuis déjà de longues décennies.
Rachida Dati a d’ailleurs été récemment mise en difficultés par l’affaire du mariage annulé de Douai, sur laquelle revient Edward Cody, correspondant en France du Washington Post. Celui-ci s’étonne qu’une dispute privée ait pris une telle ampleur, jusqu’à en devenir une polémique nationale. Dans son article, il insiste ainsi sur le coté parfaitement logique et banal de l’annulation, soulignant que c’était pour les deux protagonistes la solution la plus rapide et la plus discrète pour effacer un engagement matrimonial malencontreux. Il rappelle aussi que pendant de longs mois, ce dossier a trainé dans les couloirs des tribunaux sans soulever d’interrogations particulières. Mais c’était sans compter l’indignation des féministes et d’une classe médiatico-politique bien pensante qui a soudainement déferlé sur l’affaire, continue le journaliste. Il s’indigne qu’au nom des grands principes de la laïcité française, personne n’est ici pensé à respecter la vie privée de ces deux personnes, “qui n’avaient rien demandé“. Dans ce qui est devenu une bataille judiciaire, la France est allé trop loin, conclut-il, et montre une nouvelle fois son incapacité à considérer les membres de la communauté musulmane comme des citoyens français, et non des fils et filles d’immigrés.
L’intégration des Français issus de l’immigration est aussi en question dans un article du New York Times, qui s’intéresse de près à la ville de Marseille. Steven Erlanger, le correspondant du journal, se fait le porte-parole de deux visions contraires. D’un coté, celle partagée par Samia Guéli, maire socialiste d’un des arrondissements les plus pauvres de la ville, qui cède au catastrophisme: trop de pauvreté, trop de ressentiment parmi les immigrés, cela risque de mener à des révoltes urbaines. De l’autre, Jean-Claude Gaudin, maire UMP de Marseilles, vante le cosmopolitisme de sa ville et explique qu’ici plus qu’ailleurs, les étrangers sont les bienvenus. Le journaliste du Times se rallie à ce dernier point de vue, et comme preuve de cette mixité culturelle, décrit le succès de l’Alhambra, une salle de cinéma récemment rénovée d’un quartier sensible de Marseille. Vantant les mérites de l’argent publique (chose impensable aux États-Unis, seulement 20% du budget de l’Alhambra provient de la vente de tickets), Steven Erlanger explique qu’il ne manque que la bonne volonté des pouvoirs publics, et des initiatives de ce type, pour faire s’épanouir la mixité sociale en France.
Last, but not least, vous pouvez retrouver sur le Daily Intel (un blog d’actualité, filiale du New York Magazine) les tenants et les aboutissants de l’affaire du faux Delanoë critiquant Caroline Kennedy dans le New York Times. Les journalistes du Daily Intel se moquent de la crédulité de leurs confrères du Times, qui ne semblent pas avoir douté une seule seconde de l’authenticité de ce papier. D’où leur interrogation: pourquoi les Américains sont-ils si aptes à croire que les Français sont là pour les blâmer? Seraient-ils encore plus francophobes que les Français ne sont américanophobes? Au jeu du plus gros cliché, le vainqueur n’est pas forcément celui qu’on croit…
A retrouver aussi dans le New York Magazine, dans la rubrique people: un post sur la mise en image de la romance Carla Bruni/Nicolas Sarkozy.