Casquette, lunettes, costume bleu et chaussettes rouges. Jacques Audiard s’avance, les bras en l’air victorieux, sur la scène d’une salle de projection du Museum of Modern Art. “On veut me faire croire que c’est un moment normal, mais ce n’est pas un moment normal : on est au MoMA!”, lance-t-il, jouasse, ce jeudi 20 septembre. Le réalisateur français est venu présenter, en compagnie du producteur et acteur John C. Reilly, son dernier film, “Les Frères Sisters”. Il sort ce vendredi 21 septembre en salles.
Un film un peu spécial à plusieurs titres pour le célèbre réalisateur français. Il s’agit de son premier long-métrage en anglais avec un casting américain, constitué de Joaquin Phoenix, John C. Reilly et Jake Gyllenhaal. Pour l’occasion il s’est essayé, avec brio, au western. “Mais c’est aussi la première fois de ma vie professionnelle que je fais quelque chose dont je n’ai pas été à l’origine”, explique Jacques Audiard, qui vient de remporter le Lion d’argent de la Meilleure réalisation à Venise.
Brutes épaisses avec un esprit raffiné
Le film est inspiré d’un roman de Patrick DeWitt, publié en 2011. L’histoire est celle de deux frères, les Sisters (joués par Joaquin Phoenix et John C. Reilly), tueurs à gage redoutables qui se lancent aux trousses d’un chimiste chercheur d’or (Riz Ahmed) dans les Etats-Unis des années 1850. On y retrouve des thèmes chers au cinéma de Jacques Audiard : les personnages masculins y sont violents et virils mais également sensibles et en proie au doute. “Ce sont des brutes épaisses mais ils ont une pensée raffinée et douce. C’est ce contraste que j’ai trouvé intéressant”, explique le lauréat de la Palme d’or en 2015 pour “Dheepan”.
L’idée de transformer ce roman en film est née dans l’esprit de John C. Reilly, qui raconte avoir dévoré le livre en quelques heures. Il a aussitôt pensé à Jacques Audiard pour prendre les rênes du projet, même si les deux hommes ne s’étaient jamais rencontré. “Jacques Audiard voit ce qui est vrai, ce qui est juste. C’est le plus grand détecteur de ‘bullshit’ que j’aie jamais vu”, s’explique John C. Reilly en riant. “Il est donc capable de mettre la vérité en face d’une caméra.”
Le MoMA ne s’y est d’ailleurs pas trompé en consacrant, jusqu’au 20 septembre, une rétrospective au réalisateur d’“Un Prophète”, “De Rouille et d’os” et “De battre mon coeur s’est arrêté”. “Quoi? C’est le dernier jour de l’exposition?”, s’étrangle en plaisantant Jacques Audiard, 66 ans. “Il était indiqué que c’était une rétrospective de mi-carrière. Cela veut alors dire que j’en ai encore autant devant moi!” On l’espère.