Des voitures qui carburent aux algues ? Ce ne serait plus qu’une question d’années.
Aux Etats-Unis principalement (mais aussi au Japon, en Israël ou encore en Europe), on s’intéresse de très près à ce nouveau type de biocarburant comme alternative au pétrole. Le ministère américain de l’Energie soutient plus d’une trentaine de projets visant à produire ce nouvel or vert, soit au total 85 millions de dollars d’investissement. Selon un rapport de ce même ministère paru en 2011, les micro-algues pourraient en effet, à terme, remplacer jusqu’à 17% des importations pétrolières américaines. « Ces dix dernières années, de nombreuses entreprises qui parient sur le succès de ce nouveau biocarburant, se sont créées, notamment en Californie dont l’état d’esprit est propice à ce genre d’innovation» explique le chercheur français Laurent Pilon, professeur à UCLA, invité du Café des Sciences à l’Alliance Française de Los Angeles, le 4 octobre prochain. Les deux premiers essais sur une voiture et sur un avion en 2008 et 2009, ont d’ailleurs été effectués avec des carburants à base d’algues produits par deux entreprises californiennes Solazyme, et Sapphire Energy dans laquelle Bill Gates a notamment investi.
Bien que cet engouement soit relativement récent, l’idée d’un tel carburant n’est pas nouvelle. «Elle est née dans la foulée du choc pétrolier, en 1978, sous l’administration Carter, qui a créé l’Aquatic Species Program, pour l’étude des plantes aquatiques comme source nouvelle d’énergie. Le projet a été abandonné en 1996, probablement en raison du faible coût du pétrôle à cette date». Elle a été remise au goût du jour ces quatre dernières années, avec l’arrivée au pouvoir de Barack Obama dont la politique environnementale « encourage beaucoup les énergies durables».
30 fois plus de litres/hectare que le colza
Et pour cause, les qualités des micro-algues seraient nombreuses : « Elles ont quatre avantages considérables sur les biocarburants de première génération, comme le maïs et le soja par exemple. Contrairement à ces derniers qui consomment beaucoup d’eau potable, les micro-algues peuvent pousser dans les eaux usées ou salines et ne nécessitent donc aucun apport supplémentaire d’eau potable pour leur culture». Elles peuvent aussi « produire 30 fois plus de litres de carburant par hectare » que certaines céréales ou oléagineux, comme le maïs ou le colza. Par ailleurs, à l’inverse des biocarburants issus du blé, du soja ou de la canne à sucre qui font augmenter le prix des denrées alimentaires cultivées pour la consommation humaine, « l’utilisation d’algues pour les bio-carburants n’a aucun impact sur la production alimentaire». Enfin, elles auraient aussi l’avantage de « démocratiser l’accès à l’énergie puisque ces micro-algues peuvent pousser n’importe où dans le monde», précise Laurent Pilon.
Des prix encore trop élevés
De nombreuses questions restent toutefois en suspens : « On ignore aujourd’hui quel pourrait être l’impact environnemental de ce nouveau biocarburant, car il n’y a pas encore de production à l’échelle industrielle. Bien sûr, du fait de son caractère biodégradable, les risques sont sûrement moindres que ceux posés par le pétrole. Certains chercheurs travaillent à l’heure actuelle sur la question des résidus et de leur transformation (nouveaux matériaux, nourriture pour animaux, etc.)». L’autre obstacle majeur à la commercialisation est celui du prix : en l’état des recherches actuelles, un litre de biodiesel à base de micro-algues coûterait environ 8 dollars le gallon, soit deux fois plus que le prix de l’essence. « Les chercheurs travaillent notamment à identifier » la perle rare « parmi près de 200.000 espèces : elle doit contenir un maximum de lipides et grossir vite». Il faudra probablement attendre, au minimum, les années 2020 pour obtenir un biocarburant à base de micro-algues vraiment compétitif – aux environs de 2 dollars/gallon – selon certains chercheurs.
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