Comme on ne fait plus la queue pour les brunches, autant le faire pour les tests d’immunité.
En ce matin de mai, il y a une petite foule devant les portes du Manhattanville Renaissance Health Center, un centre médical près de Morningside Heights. Ce site fait partie des cinq désignés par la ville de New York pour effectuer des tests sérologiques conçus pour déceler les anticorps générés par la Covid-19. Début mai, le maire Bill de Blasio a annoncé le lancement d’une grande campagne de dépistage dans les cinq “boroughs” en partenariat avec le laboratoire médical BioReference. Chaque site peut tester jusqu’à 1 000 personnes par jour. L’objectif de la Ville: tester 70 000 personnes en mai, puis 70 000 autres début juin. Contrairement à d’autres sur le marché, ces tests sont gratuits, même pour les non-assurés.
Ce matin-là, une bonne soixantaine de personnes attendent donc sagement leur tour, séparées de deux mètres, sous le soleil du début d’après-midi. Dans la file, des jeunes, des vieux, des couples, des personnes seules, des Noirs, des Blancs, des amis venus à deux ou trois à qui l’on demande de se séparer, “social distancing” oblige… Une petite tranche de New York. Dehors, quelques gardes de sécurité veillent au grain. “Avez-vous bu de l’eau ce matin ? Avez-vous mangé“, demande une infirmière, tout en contrôlant les réservations. Les “walk in” ne sont pas possibles pour les tests de la ville: il faut avoir réservé sa place.
Par ailleurs, il est conseillé d’attendre au moins deux semaines après la fin des symptômes pour passer ces tests d’anticorps. J’étais dans ce cas. J’ai eu presque tous les symptômes de la maladie, y compris le perte de goût et d’odorat, à la fin du mois mars. Comme beaucoup de New-Yorkais, je n’avais pas passé de test de dépistage de la Covid à l’époque. Au début de la pandémie, les autorités ne conseillaient qu’aux malades présentant des symptômes sévères de se faire tester, ce qui n’était pas mon cas heureusement.
Après une quarantaine de minutes, on pénètre enfin dans le bâtiment du centre médical, sous les yeux de plusieurs agents chargés de faire rentrer les patients au compte-goutte et de veiller à l’application des règles de distanciation physique et de port du masque. Des gants sont distribués dans l’entrée. Avant de se rendre à l’étage, dans l’une des dix petites salles où ont lieu les prises de sang, chacun est invité à remplir un questionnaire pour aider la ville à établir des statistiques sur l’exposition à la Covid-19. Là est tout l’intérêt de la chose. Les tests d’immunité, décrits comme la clef pour rouvrir les commerces et relancer l’économie, ne donnent en réalité que très peu d’informations sur les anticorps présents dans l’organisme. En revanche, ils permettent aux autorités d’évaluer la part de la population ayant été touchée par le virus. Selon des données préliminaires, un cinquième des New-Yorkais ont pu être infectés.
Le questionnaire comporte des questions sur les symptômes, la date où ils se sont manifestés, l’activité professionnelle… Il n’est pas obligatoire de le remplir. Direction ensuite l’une de salles pour la prise du sang. Dans chacune des dix pièces, “entre 20 et 30 personnes” se succèdent par jour, estime une infirmière. Celle-ci nous rassure : “Les tests que nous faisons sont très fiables. Je le sais car j’en ai passé beaucoup après être tombée malade !“. En quelques minutes, c’est plié. Le personnel nous remercie. Les résultats arrivent dans les 48 heures. Sans surprise, ils sont positifs. Le test ne vous dit “que” si vous avez des anticorps ou non, mais pas leur quantité ou le niveau de protection que vous possédez. Un résultat positif ne signifie donc pas qu’un.e guéri.e ne peut pas contracter le virus de nouveau et qu’il n’est plus vecteur de la maladie.