Lorsqu’il a repris l’entreprise en 2015, Lionel Giraud, PDG de Vuarnet, avait déjà le regard tourné vers les Etats-Unis, pays où la marque est née en 1957. Et comme promis, cette marque de lunettes de soleil que l’on retrouve sur le nez d’Alain Delon dans « La Piscine » (1969) ou plus récemment sur celui de Daniel Craig dans le dernier James Bond (« 007 Spectre », 2015), a fait son « come-back » outre-Atlantique.
Le samedi 14 juillet 2018, la première boutique américaine Vuarnet a ouvert ses portes au 39 Spring Street à New York. Lionel Giraud, lui, est resté à Paris. « Il y a notre usine de production en France et ça reste quand même une marque française », justifie le chef d’entreprise. Comment gérer une boutique quand on vit à 6.000 km de distance ? Voici ses conseils.
1. Choisir le lieu en personne
« Il faut absolument être sur place, commence le PDG. Le jour où j’ai décidé d’ouvrir une boutique à New York, je suis venu. J’ai fait 7 ou 8 voyages uniquement pour le repérage et j’ai dû visiter 80 emplacements avant de trouver la bonne boutique », estime le numéro un de Vuarnet.
« J’ai passé des journées entière à me balader dans les rues, à sentir l’atmosphère du quartier, à observer les gens, se souvient-il. Vous avez besoin de comprendre et de rencontrer vos clients, comprendre pourquoi et comment ils achètent ».
2. Choisir une équipe locale pour se connecter à la culture
Le patron a finalement jeté son dévolu sur un espace de 90 mètres carrés au cœur du quartier. Mais derrière la boutique, l’équipe locale est cruciale, témoigne Lionel Giraud, qui emploie 40 personnes en France et 5 aux Etats-Unis (dont 3 dans la boutique et deux basées au siège social à Valhalla, village à une heure de New York).
« On échange presque quotidiennement avec les équipes aux Etats-Unis », témoigne le chef d’entreprise, qui a recruté un PDG pour Vuarnet US. « Le marché américain est compliqué. On croit que c’est un fonctionnement proche du marché européen mais c’est en réalité très différent », avertit le Français.
« Vous gagnez un temps fou si vous avez quelqu’un sur place qui comprend ces codes et qui connaît la culture, constate-t-il. Par exemple, le CEO aux Etats-Unis nous a dit : “Attention, ne touchez pas au logo !“ On a toujours envie de retoucher l’image d’une marque en l’exportant et il nous a expliqué que le logo de Vuarnet avait été culte aux Etats-Unis dans les années 1980 et que les Américains le reconnaîtraient », raconte Lionel Giraud.
4. Adapter son produit au marché
Parfois, il faut au contraire être capable de changer pour s’adapter, observe le Parisien. «Aux Etats-Unis, les gens attendent des verres polarisés [équipés d’un filtre qui atténue les reflets parasites, ndlr] sur leurs lunettes de soleil, c’est synonyme de qualité, ce qui n’est pas du tout le cas en France. Je ne vends pas exactement les mêmes produits dans les deux pays », détaille le spécialiste, qui fait le même constat pour les coupes de vêtements.
5. Développer son réseau local
Pour garder un pied à New York, Lionel Giraud revient « environ une fois par mois pendant quatre jours », dit-il. Des visites qu’il consacre principalement à ses équipes (il rencontre notamment les candidats finalistes en cas de recrutement), aux clients et aux agences de communication, sans compter les voyages pour assister aux salons professionnels.
« Les associations comme le réseau FrenchFounders (pour les cadres et chefs d’entreprises français, ndr) sont utiles quand on est nouveau, conseille-t-il. Ça permet de gagner beaucoup de temps quand on cherche une bonne agence de communication, un agent immobilier ou un avocat. Il suffit de discuter avec les autres Français, on a rapidement des discussions informelles. » Le patron de Vuarnet regarde à présent vers la côte ouest, où il a mobilisé son réseau – « deux amis » – pour commencer le repérage. L’objectif : ouvrir une nouvelle boutique en 2019.