Un bonhomme de neige dans un avion, un taxi new-yorkais, une montgolfière et, bien sûr, des sapins… Voici quelques-unes des surprenantes créations de lumières installées sur la mythique Cinquième Avenue depuis début décembre.
Derrière ces décorations, autour desquelles les passants s’agglutinent pour faire des selfies, se trouve une entreprise familiale d’Apt, dans le Vaucluse : Blachere Illumination. Fondée en 1973 par Jean-Paul Blachère, la société de 400 employés dans le monde est une référence dans le domaine de l’illumination des lieux publics. Elle est notamment à l’origine des rideaux de LED qui ornent les Champs-Elysées ou encore du scintillement de la Tour Eiffel pour le passage à l’an 2000.
Au total, cette PME dynamique a illuminé 150 pays et 60% des villes de France. « Notre métier est similaire à la mode. Dans notre catalogue, nous proposons des décors que l’on pourrait comparer à du prêt-à-porter. Nous faisons du sur-mesure. En outre, nous faisons beaucoup de travail manuel, notamment pour tisser les LED sur les structures. En cela, notre démarche s’apparente à de la haute-couture », explique Johan Hugues, le PDG du groupe et neveu du fondateur.
Comme manager des ventes à l’export entre 2001 et 2010, le dirigeant, qui a rejoint l’entreprise aptésienne il y a trente ans, a flairé très tôt le potentiel du marché américain. « J’ai pris mon bâton de pèlerin. J’étais allé quelques fois aux États-Unis et, déjà, je voyais très peu de choses de la qualité de ce que nous faisions. Nous sommes arrivés avec des lumières colorées que les Américains n’avaient jamais vues, se souvient-il. Pour moi, c’était un eldorado ». Une filiale est montée en 2003.
Un tournant majeur se produit quatre ans plus tard. L’entreprise est sélectionnée pour recouvrir de LED le château du parc Disney d’Orlando. « C’était un projet gigantesque. On a dû le faire en quatre mois alors qu’on en demandait douze. Cela a été un succès commercial parce que personne n’avait fait ça jusqu’à présent. Ça nous a apporté d’autres projets, comme Disney Paris, dit-il. Nous sommes devenus les petits Frenchies qui ont réalisé quelque chose d’inédit ! ».
Lors des premiers pas de l’entreprise aux États-Unis, il fait une rencontre qui s’avérera déterminante pour le futur : l’actuel président de l’association de promotion de la 5ème Avenue, le Français Jérôme Barth. Plusieurs années après s’être perdus de vue, ce dernier le recontacte pour lui faire part du projet de décoration de la légendaire avenue new-yorkaise. Blachere Illumination remporte l’appel d’offres et installe ses trésors lumineux sur le trottoir pour la première fois en décembre 2020.
La pose de ces objets a nécessité « une vraie performance technologique», explique le chef d’entreprise. «Il a fallu créer des illuminations autonomes en électricité, alimentées par batterie, car on ne pouvait pas suspendre des câbles. Cela n’avait jamais été fait sur la 5ème Avenue. »
Situés entre la 50th et la 59th Street, ces créations ne sont pas les seuls bébés de Blachere Illumination en ce moment sur le sol américain. Depuis l’an dernier, elle a tapissé le complexe de Hudson Yards (bâtiment du centre commercial, The Vessel, les arbres…) de « millions de LED ». À Downtown Houston, elle a notamment monté un tunnel de 100 000 lumières le long de Bagby Street. L’installation sera visible jusqu’au 2 janvier.
Les décorations sont produites dans une usine de l’Illinois. « Il y a certainement un désir de la part des Américains de sortir des codes trop traditionnels des décorations de Noël, comme les couronnes vertes avec des rubans rouges », poursuit Johan Hugues.
Son arme face à la concurrence : des investissements soutenus dans les activités de recherche et développement, qui représentent aujourd’hui 4% du chiffre d’affaires de l’entreprise. Et la moitié de ce budget est consacrée à des innovations éco-responsables. « Notre activité est saisonnière. Nous ne vivons donc pas pépères en se tapant le ventre. Nous misons sur l’innovation pour ne pas rester statiques. Cela fait partie de notre ADN, explique Johan Hugues. La compétition aime bien faire des produits standardisés. Nous, nous aimons le défi du sur-mesure. »