Quarante et un dessins du peintre néo-expressionniste Jean-Michel Basquiat, exposés dans le très classique hôtel particulier du service culturel de l’Ambassade de France à New York ? Au premier abord, la superposition a de quoi surprendre. Squelettes, crânes, précis d’anatomie qui semble sorti de l’imagination d’un enfant de quatre ans, combinaison de mots sans sens apparent, traits de couleurs violents, l’œuvre de Basquiat, artiste graffitiste des rues de New York, puis peintre provocateur, parfois insolent, souvent obscur, mort d’une overdose à 28 ans, se fiche pas mal des conventions. Mieux, elle les invente et fixe la règle. Ne venez donc pas chercher le calme et l’apaisement chez le peintre enfant et rebelle. Basquiat irrite, trouble, interroge, étonne, amuse, séduit… fâche. Il fait tourner les talons de certains qui voient dans son œuvre une imposture, qui mettent sa gloire sur le compte de son amitié avec Andy Wahrol, ou sur celui d’une mort tragique dans la fleur de l’âge.
Fouteur de m… de son vivant (il signe ses graffiti du nom de Samo, diminutif pour « same old shit », même vieille merde ), ce prince noir à New York aurait sans doute aimé le débat qu’il provoque près de 20 ans après sa mort survenue en 1988. C’est comme si l’artiste disparu continuait à exister, à créer, et parvenait à se manifester au-delà de son sommeil éternel. Car chez Basquiat, l’œuvre est dans le détail, et les détails sont nombreux, autobiographiques, jamais anecdotiques et continuent de provoquer l’attention. Le jeune new-yorkais d’origine haïtienne s’inspirait de la rue, de l’Afrique, des peintres expressionnistes comme Paul Klee ou Dubuffet. Ses maîtres sont des peintres dessinateurs comme lui: Vinci, Michel Ange, Picasso.
Celui qui n’a pas connu le 21ème siècle n’en est pas moins un artiste contemporain. «Le tageur de métro entré dans les musée. Basquiat, cela a déjà été dit, peint comme les musiciens rappent, mélangeant, samplant figures africaines et signifiants américains sur la même toile. Son succès préfigure celui de la génération rap et tag, artistes le plus souvent issus des populations démunies d’origine africaine, qui, faute de conservatoire et d’école des beaux-arts, ont longtemps dû prouver leur talent dans les rues des grandes villes. A ce titre, à elle seule, la vie de Jean-Michel Basquiat est une petite histoire de la francophonie », écrit Jérôme Neutres, du service culturel de l’Ambassade de France aux Etats-Unis, dans l’introduction de l’ouvrage de l’expositions, Basquiat, French collections.
La relation de Jean-Michel Basquiat à la France est forte et spéciale. D’origine haïtienne, l’artiste était francophone. Des galeristes et collectionneurs français se sont intéressés très tôt à son travail et le new-yorkais a exposé plusieurs fois en France. Une partie importante de son œuvre appartient à des collectionneurs français, qui ont prêté les dessins et toiles de l’artiste exposés jusqu’au 27 avril à New York. L’exposition Basquiat, French collections, a été mise au point par Enrico Navarra, galeriste et passionné de Basquiat, pour célébrer le mois de la francophonie à New York.
Jean-Michel Basquiat
French Collections
972 Fifth Avenue (entre la 78ème et la 79ème rue)
Jusqu’au 27 avril, du lundi au vendredi de 13H00 à 17H00
Entrée gratuite