Vous connaissez la situation: vous donnez rendez-vous à un.e ami.e dans un bar ou restaurant et là, patatras, il y a tellement de bruit qu’il est impossible d’avoir une discussion sans s’égosiller. Pourquoi le volume est-il aussi élevé ? Ce n’est pas qu’une question de voix…
On en revient à l’éternel problème de New York: il y a trop de monde dans cette ville. Même si le nombre de bars et restaurants y est élevé (près de 45.000 en 2016 selon la National Restaurant Association), ils sont souvent bondés. « Les New-Yorkais n’aiment pas particulièrement cuisiner et, souvent, ils ne disposent pas du matériel adéquat chez eux», observe Paul Freedman, historien à Yale et auteur de Ten restaurants that changed America. Les appartements new-yorkais sont, en outre, souvent petits. Il est difficile de recevoir voire même de cuisiner.
Le design en priorité
Pour ne rien arranger, à New York, on fait monter les décibels avec des matériaux qui renvoient les bruits plutôt que de les atténuer. « La plupart des restaurants à New York ont été pensés pour proposer un cadre agréable à l’œil », poursuit Paul Freedman. La majorité des établissements ne dispose donc pas des revêtements nécessaires pour diminuer l’impact des sons.
Un argument appuyé par George Forgeois, propriétaire de plusieurs restaurants à New York (Jules Bistro, le Singe Vert, Bar Tabac): « les propriétaires de restaurants n’investissent pas dans l’isolement sonore car les baux sont courts. Certaines salles de restaurants et bistrots sont équipées de nombreux miroirs. Cela n’atténue pas les sons, au contraire! Ça part donc dans tous les sens. Le carrelage, placé au mur ou sol, n’aide pas non plus.»
Loin d’être anodin, le bruit dans les établissements serait devenu une technique commerciale. À partir des années 80, « beaucoup de restaurants faisaient tourner des playlists», explique George Forgeois. Le volume incitait les clients à dîner en vitesse, ce qui permettait d’accélérer la rotation de la clientèle.
On s’est également aperçu que lorsque le niveau sonore d’un restaurant atteignait un certain seuil, les clients consommaient plus de boissons. « Quand c’est plein, les gens parlent plus fort que la musique. On monte le son, les gens parlent encore plus fort et commandent des boissons, et tout le monde est content », explique George Forgeois.
Enfin, « les restaurants ont aussi moins la cote chez les jeunes s’ils ne sont pas bruyants», précise Paul Freedman. L’historien ajoute que les clients qui se plaignent de nuisances sonores “sont en général les personnes âgées”. Ou les Français.