« Patali dirapata, cromda cromda ripalo, pata pata Kokoko ». On croirait entendre «La Chanson des mammouths» dans les salles de la Morgan Library. Le musée expose croquis, esquisses, dessins et planches finales des premiers albums des Brunhoff père et fils : “Histoire de Babar le petit éléphant” (1931) de Jean de Brunhoff et “Babar et ce coquin d’Arthur” (1946) de Laurent de Brunhoff.
Ce dernier ne cache pas son émotion de voir revivre son travail et celui de son père. «Je suis extrêmement heureux. Ca me touche énormément de voir tous ces dessins, toutes ces créations.(…) Je suis fier parce que je trouve que ce sont des merveilles ces esquisses de mon père Jean. Et de les voir comme ça présentées, c’est vraiment quelque chose ! » se réjouit-il.
L’exposition retrace le processus de création dans sa totalité. De la première pensée couchée sur le papier, à la page d’album finale en couleur. Les méthodes diffèrent: crayon à papier pour le père, pinceau et couleur pour le fils. Les silhouettes prennent forme, s’animent, se colorent et se précisent, avant de se figer dans la séquence de récit que le lecteur connaît. Céleste, la vieille Dame, Arthur, Cornélius ou Rataxès prennent vie progressivement.
Au fil de ces 175 images, on peut aussi découvrir les changements qui ont lieu au cours de l’élaboration. Le charme suranné des aquarelles agit comme une petite madeleine. Et au milieu de la salle consacrée à “Histoire de Babar”, trône le premier prototype de l’album : un livret en papier avec des dessins pastels.
Comment Babar est-il arrivé à New York? Dès les années 1960, Laurent de Brunhoff est invité aux Etats-Unis par Random House, son futur éditeur outre-atlantique. Les albums sont alors publiés simultanément en anglais et en français. En 1965, “Babar en Amérique” voit le jour. Babar remporte un grand succès. «Les petits enfants dans le monde entier ont les mêmes besoins» explique Laurent de Brunhoff.
Marié à une américaine, Laurent de Brunhoff s’installe aux Etats-Unis en 1985. Il vit aujourd’hui entre New York et la Floride. Et en 2004, les fils Brunhoff donnent la collection de dessins à la Morgan Library, temple des manuscrits rares.
Cette exposition est aussi l’occasion de retracer la saga familiale grâce à laquelle Babar a vu le jour et bercé les soirées de plusieurs générations. Paris dans les années 1930. Pour endormir ses fils de six et quatre ans, Cécile de Brunhoff invente l’histoire d’un petit éléphant orphelin. Les garçons racontent l’histoire à leur père, peintre.
Jean de Brunhoff étoffe l’histoire de Babar, qui s’appelait simplement «bébé éléphant» au départ, et en fait un carnet de croquis. Six autres albums suivront avant sa mort. A 21 ans, Laurent reprend alors le flambeau. «Babar était mon copain, je voulais le faire vivre encore» se souvient l’auteur.
L’exposition coïncide avec la sortie de “Babar’s USA” de Laurent de Brunhoff, publié uniquement aux Etats-Unis. Céleste est invitée à New York par une amie et la famille y débarque au complet. Pom, Flore et Alexandre apprennent à utiliser la climatisation et le téléphone portable.
Sans récit véritable, l’album relève plutôt du guide touristique que de nouvelles aventures américaines. Même les dessins ne sont pas au rendez-vous : les personnages apparaissent sur des photos de paysage où les conduit leur visite des Etats-Unis : Time Square, Central Park, Los Angeles, la Floride, Washington,…
Ce carnet de voyage ne ménage pas ses louanges sur l’Amérique : « Les américains disent « pas de problème » même s’il y a un problème » note Arthur. Et parfois dérape douteusement : « Les Américains sont optimistes car c’est une démocratie. Durant leur vie, ils peuvent s’élever sans limite» explique Cornélius à Flore. Mais tout est bien qui finit bien : les éléphants qui ont trop mangé et trop bu de soda finissent par rentrer à Célesteville. Sans oublier de rapporter des iPod à tous leurs amis.
The Morgan Library Museum – Drawing Babar : early drafts and Watercolors
19 septembre – 4 janvier
The Morgan Library & Museum,
225 Madison Avenue at 36th Street, NY
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bravo et merci pour ce retour en enfance si bien écrit,il n’est jamais trop tard pour mieux connaitre l’histoire de ce petit éléphant que j’ai tant conté à mes enfants