Adopté par la Chambre des représentants ce vendredi, et signé par Donald Trump dans la foulée, le gigantesque plan d’aide (2.200 milliards de dollars) prévoit des aides directes aux individus, mais la plus grosse part de la dotation ira aux entreprises, et notamment aux petites et moyennes. Le point sur ce que vous pouvez espérer du CARES Act si vous dirigez une entreprise, ou êtes travailleur indépendant (et sans lire les 880 pages de la loi…).
La plus grande partie de l’argent “distribué” aux PME par cette loi le sera par le biais de “SBA loans”. Ces prêts de la Small Business Administration sont disponibles en temps ordinaire (ils sont connus sous le nom de loans 7(A)), mais ils sont là considérablement étendus et élargis sous le nom de “Paycheck Protection Program” (PPP). La somme de 350 milliards de dollars est prévue dans la loi pour financer ces prêts. La SBA a promis de publier les règles précises de mise en oeuvre dans un délai de deux semaines, mais en attendant, voici ce que l’on sait:
Quelles entreprises ont droit à ces prêts?
“Les critères d’éligibilité fixés par la loi sont particulièrement souples et dans les faits, la très grande majorité des entreprises de moins de 500 salariés pourraient y avoir droit”, note Antoine Guillaud, président fondateur du cabinet d’expertise comptable International Management Solutions. Pour pouvoir demander ces prêts, il faut:
-Avoir moins de 500 salariés (ce plafond s’applique par emplacement physique dans le secteur de l’alimentation et de l’hôtellerie, de manière à inclure notamment les chaînes de restaurants et d’hôtels). Pour certaines industries, le plafond peut aller jusqu’à 1500 employés (voir ici). Les travailleurs indépendants (self-employed, freelancers, sole proprietor) ont également accès à ces prêts.
-Etre en opération depuis le 15 février
-Avoir depuis le 15 février eu des employés ou fait travailler des indépendants (“independent contractors”).
–Avoir été impacté par le Covid-19 (la loi exige simplement un “certificat de bonne foi” pour satisfaire cette condition).
Il faut aussi être une société de droit américain, mais celle-ci peut être une filiale d’un groupe étranger (dans ce cas, le plafond de 500 employés est toutefois apprécié pour l’ensemble du groupe).
Comment obtenir ces prêts?
Comme les autres prêts SBA, ces prêts sont accordés par des banques, et garantis par l’administration. “Notamment en ces temps de forte demande et de difficulté d’accès à la SBA, il est donc recommandé de se rapprocher directement de sa banque”, conseille Antoine Guillaud. Les “guidelines” ne seront néanmoins pas publiées par l’administration avant au moins une semaine, voire deux. Les banques ne pourront pas émettre les prêts avant.
Aucune garantie personnelle ou collatéral ne peut être demandée par la banque.
Combien?
Les prêts couvrent en principe 2,5 mois de salaires de l’entreprise (moyenne des 12 mois précédents) et peuvent aller jusqu’à 10 millions de dollars, avec un taux d’intérêt qui ne peut pas dépasser 4%. Ils peuvent être remboursés sur un maximum de 10 ans. La banque doit différer tout paiement (principal, intérêt ou frais) d’au moins six mois mais pas de plus d’un an.
Faudra-t-il rembourser?
C’est la divine surprise du système: la majeure partie de ces prêts pourra se transformer en subvention pure et simple pour les sommes suivantes dépensées dans les 8 semaines suivant la mise en place du prêt:
-Salaires (et charges)
-Intérêt des emprunts immobiliers mis en place avant le 15 février 2020
-Loyer si le bail existait au 15 février 2020
-“Utilities” (eau, gaz, électricité etc..) pour les contrats entrés en vigueur avant le 15 février.
Pour pouvoir bénéficier de la totalité de cette subvention (sous forme d’abandon de créance), il ne faudra pas avoir licencié ni diminué les salaires de plus de 25 %. Si des licenciements ont eu lieu, la subvention pourra tout de même être perçue, mais elle sera diminuée d’autant. Par ailleurs, les employeurs qui auraient déjà procédé à des licenciements mais réembaucheraient ces mêmes personnes auront également le droit à l’abandon de créance.
Les “Economic Injury Disaster Loans” (EIDL), également gérés par la SBA, existent depuis longtemps pour couvrir les entreprises victimes de désastres, catastrophes naturelles ou autres. Depuis début mars, toutes les entreprises éprouvant des difficultés en raison de la crise du Covid-19 pouvaient y avoir accès. Le CARES Act en élargit encore le champ d’application.
Les entreprises qui ont droit aux EIDL: Il faut avoir moins de 500 salariés; être en activité depuis le 31 janvier 2020 et avoir subi des pertes directement attribuables à la crise du Covid-19.
Comment les demander: contrairement aux prêts du Pay Check Protection Program, ces prêts sont faits directement par la SBA. Il faut en faire le demande directement sur la section dédiée du site.
Combien: Ces prêts peuvent aller jusqu’à 2 million de dollars; le taux d’intérêt est de 3,75% (2.75% pour les non profits) ;le remboursement (intérêt et capital) est différé de 4 ans
Condition: En-dessous de 200,000$, les prêts peuvent être obtenus sans garantie personnelle. Par ailleurs, la SBA peut les accorder sur la seule base du “credit score” du demandeur.
Subvention (“grant”): La loi prévoit en outre que les demandeurs d’EIDL peuvent obtenir immédiatement (dans un délai de 3 jours) une aide d’urgence de 10,000$ qui ne devra pas être remboursée, même si le prêt était refusé.
Les deux catégories de prêts (PPP et EIDL) sont cumulables
D’autres aides sont prévues par le Care Act:
Payroll taxes: les entreprises touchées (et les “self employed”) peuvent reporter le paiement des charges de sécurité sociale (soit 6,2% du salaire brut) dues pour 2020 et les payer sur les deux années suivantes. Cette possibilité n’est pas cumulable avec les subventions (abandon de créance) prévues du Paychek Protection Program.
Crédit d’impôt: Les entreprises qui soit ont été fermées du fait d’un ordre de confinement ou ont perdu plus de 50% de revenus comparé au même trimestre de l’an dernier, peuvent bénéficier d’un crédit d’impôt de 50% des salaires dépensés entre les 13 mars et le 31 décembre 2020, dans la limite de 10,000$ par employé.
Pertes reportables: les conditions d’application des pertes reportables (“net operating loses”) sont assouplies -on peut désormais reporter 100 % des pertes des années précédentes, contre 80% auparavant.
Report de la limite du 15 avril: ce n’est pas seulement la date limite de dépôt des déclarations d’impôts qui est reportée au 15 juillet, mais aussi le paiement des impôts, ce qui permet aux entreprises de préserver leurs réserves de cash pour 3 mois. D’autres facilités sont accordées pour améliorer le cash flow (assouplissement des règles de “carry back”, possibilité de recevoir certains “tax refunds” en avance, etc).
Parmi les nombreuses ressources en ligne, les dossiers de la Chambre de commerce américaine sont particulièrement bien faits.