Soixante ans plus tard, la Beatlemania s’apprête à déferler sur San Francisco. Le samedi 1er mars s’ouvre au De Young Museum l’exposition « Paul McCartney Photographs 1963–64: Eyes of the Storm », qui rassemble plus de 250 clichés pris par le bassiste des Beatles entre décembre 1963 et février 1964. Armé de son reflex Pentax 35 mm, McCartney chronique les débuts de la Beatlemania qu’il observe avec l’émerveillement d’un jeune homme d’à peine 21 ans.
« La passion de Paul McCartney pour la photographie a commencé très jeune, grâce à un appareil Kodak Brownie. Il baigne dans le milieu de la photographie toute sa vie » , rappelle Sally Martin Katz, conservatrice adjointe de la Photographie au Fine Arts Museums de San Francisco. « Son frère Mike, sa première femme Linda, mais aussi sa fille Mary, sont tous des photographes professionnels. L’exposition Eyes of the Storm permet de voir, pour la première fois, ces clichés pris il y a 60 ans et dont Paul McCartney n’a retrouvé les négatifs qu’en 2020. »
L’exposition est organisée de façon chronologique, et suit les Beatles dans leurs déplacements en Europe et aux Etats-Unis. On pénètre dans l’intime de leurs concerts, avec des photos prises en coulisses : on y voit un John Lennon nerveux, un Ringo Starr facétieux, ainsi que tous les gens, manager, chauffeur, roadies qui les accompagnent dans leur succès, et leurs familles, notamment Cynthia Lennon, la première femme de John, et les parents de George Harrison.
En janvier 1964, les Beatles se produisent à l’Olympia, dont ils partagent l’affiche avec Sylvie Vartan et Trini Lopez. Les 18 concerts qu’ils donnent à Paris leur donnent l’occasion de jouer les touristes de façon fugace, comme le montrent les photos de l’Arc de Triomphe prises à la sauvette depuis une voiture, ou des clichés du groupe prises dans les rues de la capitale. Comme le souligne Sally Martin Katz, « les photos de Paul McCartney capturent bien le style de l’époque : plusieurs de ces clichés en noir et blanc rappellent l’esthétique de la Nouvelle Vague, et pourraient avoir été prises sur un tournage de Truffaut. »
Dans une vitrine, les paroles manuscrites de « I want to hold your hand », première chanson des Beatles à être numéro 1 des charts américains le 18 janvier 1964, se trouvent près du journal de Paul McCartney qui relate son séjour à Paris, notamment la rencontre avec un certain Johnny Hallyday, qu’il admire.
Après Paris, ils s’envolent pour New York, afin de se produire au Ed Sullivan Show le 9 février 1964. Suivie par 63 millions de téléspectateurs, cette apparition télévisuelle marque un tournant dans leur carrière, la propulsant au niveau mondial du jour au lendemain. L’exposition montre des photos prises pendant les répétitions, mais des clichés saisis depuis leur voiture, montrant les paparazzis qui les poursuivent dans la rue et des centaines de fans qui se massent derrière un cordon de police sur la 5th Avenue.
Les Beatles se rendent ensuite à Washington en train. « C’est l’occasion pour Paul McCartney d’immortaliser “ses gens”, issus de la classe ouvrière pendant le trajet. Lui-même est issu de ce milieu, son père était un représentant dans l’industrie du coton. » On retrouve des clichés similaires lors de leur prochain stop, en Floride, notamment du personnel de l’aéroport qui se tient près de l’avion. L’un d’entre eux a remarqué que McCartney les prend en photo, et fait semblant de jouer de la guitare en réponse. Sur de nombreux clichés, le sujet regarde droit dans l’objectif. « Paul McCartney a réussi à créer une vraie connection avec les gens qu’il photographie à travers son appareil, que ce soit une petite fille dans la rue, ou un photographe qui lui fait face. »
Après le noir et blanc, la dernière partie de l’exposition passe à la couleur. Les Beatles sont en Floride, et Paul McCartney partage l’album de photos de vacances : plage, ski nautique, piscine, cigarettes et cocktails… Ils peuvent souffler et prendre un peu de distance avec cette Beatlemania dont ils sont autant acteurs que témoins.
L’exposition « Paul McCartney Photographs 1963–64: Eyes of the Storm » est vraiment riche, la muséographie est bien faite, et on peut facilement passer deux heures à détailler les photos pour replonger dans cette époque. À noter que l’audioguide permet d’entendre Paul McCartney parler de la préparation de l’exposition, ainsi que des historiens et des fans de la première heure. Le samedi 1er mars à 12pm, plusieurs groupes se succéderont sur la scène du Bandshell situé entre le De Young et la California Academy of Sciences pour interpréter des chansons des Beatles, et à 1pm, on pourra assister à une conférence gratuite sur l’exposition, présentée par Sally Martin Katz, conservatrice adjointe de la Photographie au Fine Arts Museums de San Francisco.
« Paul McCartney Photographs 1963–64: Eyes of the Storm », du samedi 1er mars au dimanche 6 juillet. De Young Museum, 50 Hagiwara Tea Garden Drive, SF. Infos et billets.