C’est à San José, à 80km au sud de San Francisco, que réside la plus grande communauté au monde de Việt Kiều, les Vietnamiens de l’étranger. 108 000 au recensement de 2010, on estime qu’ils seraient à présent 180 000. Et leur histoire est étroitement liée à l’essor de la Silicon Valley.
Pourtant, localiser précisément le coeur du quartier vietnamien est une gageure… Même pour les locaux ! Les lieux emblématiques des Vietnamiens sont dispersés sur une poignée d’enclaves éloignées les unes des autres. Et contrairement au Chinatown de San Francisco, Little Saigon n’est pas une destination touristique. Pas de boutiques à souvenirs ici, ni d’édifices folkloriques. Pas même de grande porte à l’architecture traditionnelle signalant l’entrée d’un village dans la ville.
Boat-people
1975. L’armée communiste marche sur Saïgon. Cette année-là et les suivantes, des centaines de milliers de Vietnamiens fuient leur pays. Nombre de ces réfugiés prennent la mer amassés par dizaines sur des embarcations de fortune. Le Viet Museum, situé au History Park de San José, retrace le périple de ces boat-people, de la guerre jusqu’à l’exode massif, et explore leur vie et celle de leurs descendants aujourd’hui.
Début des années 80. L’ère des smartphones est encore loin mais la Silicon Valley est déjà la capitale mondiale de l’informatique. Celle du silicium d’où elle tire son nom, le matériau indispensable à la fabrication des circuits intégrés. Apple, Atari, IBM… Les entreprises de la région embauchent à tour de bras. Elles désirent notamment faire monter en puissance leurs chaînes de montage de composants électroniques.
Des milliers de travailleurs vietnamiens répondent à l’offre. Puis certains de leurs compatriotes ouvrent épiceries et restaurants où la communauté pourra retrouver les saveurs de leur pays natal. Attirés par les loyers dérisoires, ces derniers s’installent dans le centre-ville de San José et ressuscitent des quartiers entiers laissés à l’abandon. Ils étendent ensuite leur présence sur l’Est de la ville, lui aussi passé en désuétude. En 2005 cependant, les autorités déplacent la majeure partie des commerces vietnamiens hors du centre-ville pour construire un nouvel hôtel de ville.
Lion Plaza et les malls
Envie d’acheter un pot de Mắm Tôm (pâte de crevettes fermentée), de déguster un Bò 7 món (sélection de 7 plats à base de boeuf) ou de se faire tailler sur mesure un Áo dài (tunique traditionnelle) ? C’est à l’Est de San José qu’il faut donc se rendre.
Au croisement de Tully Road et de King Road se trouve Lion Plaza, la partie la plus ancienne – et la plus authentique selon certains habitants – de Little Saigon. Dans une cour à deux pas du Lion SuperMarket, la scène semble tirée d’un marché à ciel ouvert de Hô-Chi-Minh-Ville. Semaine comme weekend, les hommes (âgés) du quartier enchaînent conversations, cigarettes et parties d’échecs traditionnels, ou Cờ tướng. Puis ils satisfont leurs petits creux aux gargotes du coin, très populaires aussi auprès des visiteurs venant de toute la région et au-delà.
Si Lion Plaza correspond à l’image d’Epinal, le Grand Century Mall et Vietnamtown sur Story Road sont des complexes de commerces à l’allure plus américaine tu meurs. L’ambiance un peu kitsch n’est pas dénuée de charme cela dit. Dans ces galeries, la sono braille de la musique vietnamienne en boucle. On y trouve aussi bien des restaurants à Phở (soupe typique) que des bars à jus de canne à sucre et des officines à herbes médicinales.
Pagode
Il y a prés d’une dizaine de temples bouddhistes vietnamiens installés dans la Silicon Valley. Le plus populaire est celui de Đức Viên, situé à l’angle de Tully Road et de McLaughlin Avenue. Fondé par une nonne au début des années 80, cet oasis de spiritualité dans un quartier bruyant est tenu uniquement par des femmes. Des repas végétariens sont servis tous les dimanches aux visiteurs, moyennant des donations libres. De quoi méditer le ventre plein !