Blouse blanche, bottes et charlotte sont de rigueur dans l’usine de Kite Hill, à Hayward. Ici, on pasteurise, on caille, on égoutte, on affine… « Les étapes classiques de la fabrication traditionnelle des fromages », commente Jean Prevot, directeur industriel de la start-up.
A un « détail » près : dans cette usine d’East Bay, pas une seule goutte de lait n’est utilisée. Même si les produits finis pourraient, à première vue, être confondus avec du cream cheese, du camembert, du yaourt et de la ricotta, ils sont garantis ‘dairy-free’ et fabriqués à partir d’un lait d’amandes – également produit par Kite Hill.
Dans l’une salle d’affinage, on goûte l’un de ces ‘fromage’ frais, rond, blanc, humide. Première surprise, il n’a presque pas d’odeur. Très crémeux en bouche mais consistant, sa texture surprend, à mi-chemin entre un chèvre frais et du tofu soyeux. Quant au goût, c’est l’inconnu ; on peut y trouver, parmi d’autres, des notes qui rappellent le tofu, justement, mais aussi la pâte à pain et la peau des amandes.
Aux manettes de cette usine de fromages new-age, un Français, Jean Prevot. Il a rejoint l’équipe de Kite Hill en 2012 pour assurer leur passage à l’échelle industrielle, alors qu’un partenariat se dessinait avec Whole Foods.
L’entreprise avait été fondée un an plus tôt par Patrick Brown, un biochimiste, Tal Ronnen, chef réputé de la scène vegan de Los Angeles qui travaille avec des stars (Oprah ou Ellen DeGeneres), et Monte Casino, chef et enseignant.
Ingénieur diplômé des Arts et métiers en 2001, Jean Prevot confesse : « J’ai toujours eu une attirance pour la nourriture, celle qu’on mange, bien sûr, en tant que consommateur, mais aussi en tant que produit industriel ». Au point de presque regretter « de ne pas avoir fait l’Agro ».
Son penchant l’amène à travailler pour Danone, puis Bongrain, en passant, avec sa femme et leurs jeunes enfants, de la France à la Hongrie en 2006, puis à la Californie en 2010 où il rejoint l’entreprise Laura Chenel’s, à Sonoma.
Le projet de Kite Hill le convainc : « à l’époque, (ce fromage végétalien) était un produit jamais fait au monde ! Et on me donnait carte blanche pour la création de l’entreprise, la responsabilité de démarrer un site de production et de lancer ces produits, à un moment où on commençait à parler de ces start- ups qui faisaient de la ‘nouvelle food’. » L’opportunité « était trop belle ». Et sur le plan personnel « le moment n’était pas encore venu de me poser ».
Il n’en aura d’ailleurs pas vraiment l’occasion. Une fois opérationnelle, l’usine créée par ses soins distribue les produits Kite Hill dans neuf magasins de la Baie, puis 30, puis à Los Angeles et Portland, avant un lancement national, en septembre 2014. « En 2015, on a lancé 16 références et ce n’est qu’une étape vers la suite de l’aventure ! »
Kite Hill compte aujourd’hui 55 employés, travaille « sur quatre prochains produits » et entend convaincre d’autres distributeurs du segment ‘naturel’.
Malgré l’enthousiasme, point de militantisme chez Jean Prevot. Sa famille, constate-t-il, a réduit progressivement la plupart des produits animaux, d’abord « pour des raisons sanitaires et de qualité », puis pour des raisons de santé.
Pourtant, Jean Prevot en est convaincu : « quels que soient les motifs, le développement de la ‘food tech’ (et celui des produits végétaliens) n’est pas une vague de surface, mais vraiment une lame de fond. »
0 Responses
Super intéressant!
Pour l’auteur, L’East Bay n’est pas une ville, mais une région; on dit Dans la East Bay.
Ludo
Innovant, intéressant et dans la mouvance de notre époque où la qualité est recherchée . Déjà en bonne place sur le marché américain, à quand la France car ça m’a l’air intéressant à tous les niveaux ?