L’Amour Fou de Pierre Thoretton diffusé en ce moment à l’IFC c’est un documentaire (sur l’art et la mode), un biopic (sur Yves Saint-Laurent), une histoire d’amour (celle qui unissait Pierre Berge à Yves Saint-Laurent). Au final c’est si beau à regarder que cela en devient une œuvre d’art à part entière.
Le film s’ouvre sur la fin d’une époque : le discours en 2002 par lequel Yves Saint-Laurent annonçait dans une vive émotion son retrait du monde de la mode. Les mots d’ Yves s’enchaînent comme des mannequins marcheraient sur un podium, rappelant l’influence de la littérature – et plus particulièrement de Proust – sur le créateur.
Le film rend d’ailleurs hommage à cette influence, à ce mariage des arts qui se fit entre les mots d’auteurs de chevets qui servirent de guides à Yves Saint-Laurent, la mode dont il définit le concept même et son extraordinaire travail de collectionneur. Le film est en effet centré autour d’un conteur – Pierre Bergé – venu raconter son histoire préférée, celle dont on ne veut pas trop vite connaître la fin, mais il est aussi peuplé d’images d’archives qui nous replongent dans la magie des défilés Saint-Laurent et centré autour d’un fil conducteur la vente de la collection de Pierre Berge et Yves Saint-Laurent.
Ce film est donc un véritable voyage stylistique : les images sont superbes et si la vie des deux hommes fut en demi-teintes l’expérience pour le spectateur n’est que calme, luxe et volupté entre Marrakech, Paris et New York. La voix et les mots de Bergé sont toujours justes et nous bercent, nous dévoilant avec pudeur et honnêteté une romance de quarante années.
Les intervenants sont peu nombreux et toujours justes. Quelques femmes – celles qui furent les muses d’ Yves Saint-Laurent – nous rappellent la part que joua le créateur dans l’appropriation d’une mode « égalitaire ». Jack Lang vient souligner le rôle déterminant du couple sur l’acceptation de la communauté LGBT.
Les images finales de la vente aux enchères sont envoutantes et cette valse des millions ramènent les spectateurs a la réalité financière du couple jusque la oubliée dans ce cocon de raffinement.