Yseulys Costes, CEO de Numberly, qui s’est installée à New York à l’été dernier, est une féministe engagée qui porte les valeurs de la parité et de la diversité avec passion depuis ses débuts d’entrepreneure. Elle a eu lieu de le démontrer à l’occasion d’un panel organisé par la French Tech New York sur le déficit de financement des startups de femmes. « Au début de ma carrière, j’étais naïve. Je pensais que les générations précédentes avaient fait le gros du travail, et que ces sujets seraient plus faciles dans la tech. Je me suis rendue compte de la réalité depuis », assène-t-elle devant un parterre très féminin.
De son propre aveu, Yseulys Costes n’aurait jamais pensé devenir une entrepreneure French Tech. Après avoir commencé sa carrière dans la recherche, elle lance un peu par hasard le site 1000mercis avec son associé Thibaut Munier. Nous sommes en 2000, en plein âge d’or d’Internet et juste avant l’éclatement de la bulle. Le site permet aux internautes de partager des listes de cadeaux avec leurs proches, et à 1000mercis de capitaliser sur ces précieuses bases de données. Avant tout le monde, Yseulys Costes et Thibaut Munier ont pressenti l’importance des données et du marketing digital. « Je n’avais pas de désir entrepreneurial, mais j’étais passionnée par la technique et la ‘matière molle’ de ce nouveau métier », explique-t-elle.
S’ensuit une croissance impressionnante de 1000mercis, qui entre en bourse en 2006 et devient une des rares success stories tech dirigées par une femme en France. Petit à petit, le domaine se structure et la société s’oriente vers le retail media et la data collaboration. Elle aide les annonceurs à optimiser leurs bases de données en anticipant et programmant leurs achats publicitaires, leur permet de mieux collecter et activer ces précieuses données. Une matière en mouvement permanent, dont elle parle toujours avec ferveur.
En 2013, le développement de 1000mercis incite sa fondatrice à déménager aux États-Unis, et Yseulys Costes décide de s’installer à Palo Alto, en Californie, l’eldorado mondial des startups techs. Un environnement porteur, qu’elle quitte juste avant le Covid. En 2019, 1000mercis se rebaptise Numberly pour mieux refléter son activité. Et celle qui aime « créer du déséquilibre » dans sa vie, décide de repartir aux États-Unis en 2024, mais ce n’est pas l’Ouest qu’elle choisit. « Il n’y a plus autant d’innovations dans la Silicon Valley, les tensions entre Amazon et Google sur les publicités pèsent sur l’écosystème », juge-t-elle.
Elle opte alors pour New York, un choix de raison. « Je venais souvent à New York avec un red-eye (vol de nuit, ndlr) de Californie et j’arrivais fatiguée, l’intensité de la ville me pesait. Mais depuis que je me suis installée ici, je m’y plais énormément. C’est une ville fabuleuse pour les workaholics », glisse-t-elle en souriant. Ici, elle apprécie les relations d’affaires très directes, simples et la possibilité de grandir (scale en anglais) plus rapidement, dans un marché immense : « Cette effervescence est porteuse, New York demeure la capitale du monde. » Elle aime néanmoins aussi la France et trouve « que les deux pays se complètent bien, ils ont chacun leurs avantages ».
Aujourd’hui, Numberly vient de fêter ses 25 ans en sortant de la cote. Une volonté de « s’enlever des contraintes et des coûts, et d’investir dans la transmission ». Le groupe, qui emploie 600 personnes dont 30 en Amérique du Nord (New York, Californie et Montréal) et y génère un quart de ses revenus, compte élargir son portefeuille de clients américains, qui compte déjà Procter & Gamble, Colgate ou Nestlé. Surtout, la dirigeante a à cœur d’avoir « un impact positif ». Cela passe par la Numberly Academy, qui offre des formations gratuites en marketing digital, ou par l’apport d’affaires à des entreprises dirigées par des femmes. Mais aussi en interne, en laissant de la place à ses équipes pour grandir et préparer l’avenir.