Quand on entend le nom “Los Angeles”, on pense directement aux studios de cinéma, au soleil et… aux palmiers. Et pour cause, ils sont partout : ces arbres peuplent et surplombent les rues et boulevards iconiques de la ville, mais aussi les parcs, les musées et le cimetière du Hollywood Forever. Bref, ils symbolisent la cité des anges. Cela paraît donc évident qu’ils ont toujours été là. Et si c’était faux ?
Asseyez-vous, car ce que vous allez lire va vous déconcerter : l’omniprésence des palmiers à L.A n’est ni historique, ni naturelle. Comme le rappelle l’historien Jared Farmer dans son livre Trees in Paradise, l’arbre local typique était le Schinus molle, communément appelé “faux-poivrier”. Mais ils ont été arrachés au début du XXe siècle car ils abritaient de nombreux insectes endommageant les arbres à agrumes. Quant à la seule espèce de palmier originaire de Californie, c’est l’arbre “à jupon” dit Washingtonia filifera (dont le stipe est épais et les feuilles larges et palmées).
Les autres espèces, les longilignes que tout le monde a à l’esprit, ont été importées il y a plusieurs décennies. Ce sont les missionnaires franciscains du XVIIIe siècle qui ont ramené pour la première fois des palmiers (souvent mentionnés dans la Bible) sur le territoire semi-aride de la Californie du Sud. Il faudra attendre 1931 pour que le département des forêts de la ville de Los Angeles décide de planter plus de 25.000 palmiers de type mexicains -les moins onéreux, à 3,60 dollars chacun-, pour arborer les grands boulevards et rues. Un investissement destiné à embellir la cité pour les Jeux olympiques de 1932, et à créer de l’emploi. Sans compter qu’ils ne risquaient pas de perdre leurs fruits sur les piétons (même s’ils ne courent pas les rues à L.A).
S’inspirant de la French Riviera, cette culture a permis de transformer le sud de la Californie en “littoral méditerranéen de l’Amérique”, comme le décrit Kevin Starr dans Inventing the Dream. Et les palmiers ont naturellement prospéré, la mairie en recensant jusqu’à 75.000 en 1990 à Los Angeles.
Mais ce mythe (horticole) n’aura pas de “happy end”. De nombreux palmiers plantés dans les années 1930 sont en fin de vie, quand d’autres sont malades en raison de champignons et de la prolifération d’insectes. Face à cette hécatombe, le Département de l’eau et de l’énergie de la Californie a fait savoir que la plupart d’entre eux seront remplacés par des arbres plus résistants, moins consommateurs d’eau et adaptés au climat de la région -excepté sur Sunset et Hollywood Boulevard, qui ont obtenu une dérogation. Une bonne nouvelle pour l’écrivain Victoria Dailey, qui considère que ces “intrus” ont été “kidnappés et castrés” par la ville. Los Angeles devrait subir une révolution de son paysage dans les années à venir.