Les lecteurs de French Morning nous soumettent régulièrement leurs problèmes liés à l’expatriation. Deux fois par mois, Vie d’Expat essaie de les aider en ouvrant sa bibliothèque de livres sur l’épanouissement personnel.
Aujourd’hui, le témoignage d’Astrid, de retour en France cet été, qui nous parle de l’idée qu’elle se faisait d’une vie d’expat à New York confrontée à la réalité.
« Nous sommes arrivés à New York en septembre 21. Je venais d’accoucher de mon troisième enfant un mois auparavant. Autant vous dire que je n’avais pas vraiment eu le temps de me préparer à notre expatriation. La boite de mon mari s’occupait de (presque) tout. Je connaissais New York. J’y avais passé quelques mois pour un stage en me disant « J’y reviendrai un jour », mais sans enfants. La ville m’apparaissait comme particulièrement inadaptée pour eux, pas du tout kids friendly. J’étais de retour avec deux petites filles et un nourrisson.
Je ne m’étais pas vraiment projetée. Quelqu’un m’avait prévenue que « la vie était intense et chère ». Mais ça, je le savais déjà. Rien d’insurmontable. Sans vraiment y avoir réfléchi, je pensais dupliquer ma vie parisienne en l’adaptant à New York. Évidemment, je me suis pris un mur.
D’abord, mon mari a disparu pendant nos cinq premiers mois, absorbé par son nouveau job. Il quittait la maison quand les enfants se réveillaient et rentraient quand ils allaient au lit. Mes parents n’étaient plus là pour m’aider. Les siens non plus.
Bien sûr, je savais que l’école finissait à 2h40. Mais je ne l’avais pas vécu. Je ne savais pas ce que signifiait une journée réduite au seul moment que j’avais de libre : 1h30 de sieste le matin. Et les after schools ? On s’y était pris trop tard. La nounou ? Euh… Vous voulez qu’on parle argent ? J’avais abandonné ma boite, non sans douleur, à mon associée. Mais j’allais retrouver du boulot, pour sûr ! On m’avait prévenu que ce serait difficile, mais on ne me connaissait pas !
Un bon paquet de CV plus tard, j’ai du me rendre à l’évidence : la petite frenchy n’avait pas grand-chose à apporter de différenciant à la grande Amérique.
En fait, je m’étais complètement trompée : NY était définitivement kids friendly. Et même entièrement centrée sur les enfants. Les New-Yorkais dépensent tout leur argent dans l’éducation et les distractions de leurs enfants. C’est très généreux, mais comment fait-on quand on en a trois ? On donne de sa personne.
Tout était compliqué. Je ne veux pas faire ma Parisienne, mais, où était mon Monoprix ? Je devais faire quatre magasins pour trouver ce que je cherchais – et m’habituer à acheter du coca en pharmacie. Je faisais venir le lait des biberons d’Europe – aucune confiance dans le lait américaine. J’ai découvert avec horreur que mes enfants se nourrissaient exclusivement à la cantine de burgers, de pizzas, et de nuggets. Tous les jours et en vingt minutes. L’école n’est-elle pas censée être le lieu où l’on oblige les enfants à manger des légumes ? En même temps, j’avais le droit de m’habiller comme je voulais, c’est-à-dire n’importe comment. C’était bien, mais ça ne m’a pas vraiment motivé pour retrouver ma taille de la guêpe – que j’ai quand même fini par récupérer, je vous rassure.
J’étais complètement déprimée. Je me sentais si seule et désemparée que le seul fait que l’on me dise systématiquement bonjour dans l’ascenseur me remplissait de joie. Au playground, une maman américaine que je ne connaissais pas m’a donné son numéro de téléphone. Les gens vous laissent passer en souriant dès que vous avez une poussette. Tout le monde est si sympa, si positif, que j’ai commencé à remonter la pente. J’ai pris ma place dans cette incroyable diversité de visages, de corps et d’apparences. J’ai créé ma vie.
Je retourne à mon ancienne vie cet été avec la ferme intention de n’être plus (jamais) une Parisienne. Même si je suis si heureuse de retrouver ma famille, je sais que nous pouvons repartir, que nous repartirons un jour. Nous en avons déjà envie. Finalement, ce n’était pas si difficile.»
La réponse de French Morning
Merci pour votre témoignage, Astrid. Nous sommes sûrs que beaucoup se reconnaîtront dans vos débuts, notamment dans ce sentiment de solitude que vous avez connu. Pour en parler, nous convions Michelle Larivey et son inépuisable La puissance des émotions.
Lorsque cet article sera publié, vous serez probablement à quelques jours de votre départ. Aussi, nous vous souhaitons un bon retour, Astrid !
Qu’est-ce que la solitude ?
« La solitude n’est pas une émotion, c’est un état de fait. Lorsque nous employons ce mot, c’est toutefois pour traduire autre chose qu’une situation de fait ; à savoir, un sentiment. Souvent, il s’agit de tristesse ou d’ennui. Mais cette signification ne se déduit pas auto-matiquement, car être seul peut s’avérer agréable. Cela dit, l’expression Je me sens seul a toujours une connotation de manque, de privation.
À quoi sert le sentiment de solitude ?
L’expression « se sentir seul » fait image. Cette image est une forme d’approximation de nos sentiments qui peut revêtir diverses significations. Ainsi, Je me sens seul aujourd’hui (exemple 1) peut être une façon de dire Je suis triste, car je n’ai d’importance pour personne, ou j’ai besoin de contact. Et Je me sens seule dans la vie (exemple 2) peut vouloir dire Je n’ai personne dans la vie sur qui m’appuyer ou Je n’ai pas de contact réellement nourrissant, Je n’ai pas d’ami intime, Je n’ai pas la relation amoureuse dont j’ai besoin… et cela m’attriste.
Le manque affectif engendre la tristesse. Se sentir seul peut être considéré comme l’antichambre de la tristesse ou comme une manière voilée de parler de sa tristesse. Mais la solitude n’est pas toujours empreinte de peine. Je me sens seule dans cette foule (exemple 3) peut avoir toutes sortes d’autres sens comme Je ne connais personne et j’ai peur, Je suis étrangère à tous ces gens et cela me déplaît, Je n’arrive pas à établir des contacts et cela me déçoit ou, au contraire, Personne ne fait attention à moi et cela fait bien mon affaire !
Le sentiment de solitude s’accompagne toujours d’émotions. Ce sont ces dernières qui permettent d’identifier ce que l’état de solitude traduit vraiment.
Que faire avec la solitude ?
Il est impératif d’identifier les émotions vécues dans cette solitude. Ce sont elles qui me permettront de cerner mes besoins et de voir à les combler.»
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