Les lecteurs de French Morning nous soumettent régulièrement leurs problèmes liés à l’expatriation. Deux fois par mois, Vie d’Expat essaie de les aider en ouvrant sa bibliothèque de livres sur l’épanouissement personnel.
Aujourd’hui, le récit de Stéphane qui a laissé derrière lui deux enfants.
« J’ai divorcé il y a 12 ans. C’est ma femme qui a pris l’initiative : elle avait rencontré quelqu’un et ne voulait pas d’une double vie. Tout s’est passé rapidement, sans grande souffrance. Je n’étais presque jamais là, toujours en déplacement. Elle a gardé la maison et nos deux enfants. Je les prenais les week-ends et pendant les vacances. Nous avons retrouvé un équilibre.
Puis j’ai rencontré Eva qui, à 40 ans, avait passé plus de la moitié de sa vie dans un autre pays que le sien. C’est elle qui m’a aidé à me détacher de la France, ce pays que j’aimais, mais pas pour y vivre, manifestement, puisque j’étais incapable d’y séjourner plus de deux semaines consécutives. Nous avons déménagé en Espagne, d’abord, pour ne pas trop m’éloigner des enfants, puis aux États-Unis, à Miami.
C’était facile, pour moi, de retourner à Lyon et pour eux, mes enfants devenus grands, de venir me voir. Et c’est ce qui s’est passé, les deux premières années. La mer, les plages, Disney et les Keys. Ils sont venus à Noël et aux vacances d’hiver. Et puis, ils ont arrêté de venir. La Floride, c’était mon choix. Pas le leur.
Mon fils a une petite amie en Suisse. C’est compliqué pour eux de passer du temps ensemble et ils ne veulent pas se retrouver chez leur père… Ma fille est venue toute seule une ou deux fois, mais c’est quand même fatigant. Les vacances sont rarement les mêmes.
J’ai continué à passer quelques jours en France, une semaine, parfois deux. On s’entend bien les enfants et moi. Il n’y a vraiment pas de problèmes majeurs. Mais ils s’éloignent. Inexorablement. Ils s’éloignent de moi pour se rapprocher de leur mère et de son mari. C’est un type super. Sincèrement. Ils l’aiment beaucoup et c’est vrai qu’il fait beaucoup pour eux. Il a hérité d’une maison à Biarritz qu’il leur laisse pour les vacances. Il a un petit bateau aussi, qu’ils peuvent utiliser. C’est plus simple, plus facile.
Évidemment, je ne mesure pas l’attachement de mes enfants à une maison ou à un bateau. C’est juste que je suis loin et que j’ai peut-être, par mon absence, laissé une place vide dans la vie de mes enfants. La place du père qui ne me revient plus. »
La réponse de French Morning
Merci pour ce témoignage, Stéphane. La distance fait partie de la définition même de l’expatriation et vous n’êtes pas le seul à en souffrir car elle touche à peu près toutes nos relations qu’elles soient amicales ou familiales.
Qu’en dit Michelle Larivey dans La puissance des émotions ?
Que signifie être distant ?
Nous ne pouvons pas nous « sentir distant » pas plus que nous ne pouvons sentir l’autre distant, car la distance n’est pas un sentiment. La distance est la concrétisation d’attitudes et de comportements qui s’expriment par de l’éloignement: la personne est plus froide, elle se tient à distance, elle est plus difficile à atteindre ou se montre réservée; cela de différentes façons qui sont propres à chacun.
À quoi sert d’être distant ?
L’attitude ou le comportement distant traduisent des émotions. En général, il s’agit d’un mécontentement quelconque dont l’intensité varie de la simple contrariété à la vraie colère. La bouderie est un bel exemple d’éloignement chargé d’émotions que nous refusons d’exprimer.
L’idée d’emprisonnement évoque la liberté perdue.
Que dit la distance?
Révéler les émotions qui amènent à prendre ses distances, c’est assumer davantage la position de chacun dans cette relation. Si vous souhaitez une relation qui soit en mouvement, comme l’est une relation vivante, révéler ses émotions est le meilleur choix que vous puissiez faire.
Nous vous invitons donc, Stéphane, à évoquer votre ressenti avec vos enfants.
Pour compléter ces définitions, nous vous proposons le livre du célèbre maître bouddhique, Thich Nhat Hana, Prendre soin de l’enfant intérieur.
« Si, par le passé, nous avons souffert ou fait souffrir d’autres personnes, surtout ne nous laissons pas décourager par la prise de conscience que nous avons aujourd’hui ! Si nous savons comment prendre soin de notre souffrance, elle pourra nous enseigner beaucoup. Bien sûr, nous avons fait des erreurs. Bien sûr, nous n’avons pas toujours été très adroits. Certes, nous nous sommes fait du tort à nous-mêmes et nous avons même fait souffrir des personnes autour de nous. Mais rien ne nous empêche de prendre un nouveau départ et de faire bien mieux l’année prochaine et, pourquoi pas, tout de suite… Posons un regard neuf sur notre souffrance, et nous pourrons la transformer en un élément positif. Nous avons tous commis des bêtises, des maladresses, mais, désormais, nous pouvons faire le choix de progresser, de recommencer et de nous transformer.
Généralement, dès que quelque chose va de travers, nous cherchons à ce que cela s’arrange immédiatement. Nous voulons que la douleur et la souffrance, tout ce qui ne va pas, disparaissent au plus vite. Et pourtant, quand nous sommes confrontés à une difficulté, la toute première étape est justement de ne pas chercher à la résoudre.
Avant toute chose, il s’agit de la reconnaître, simplement pour ce qu’elle est. Ensuite, quand nous aurons pu rester quelque temps avec nous-mêmes, il sera beaucoup plus facile de nous rapprocher de la personne avec laquelle nous sommes en conflit.
Bien souvent, nous avons manqué de vigilance à l’égard de nos enfants, ignorant leurs difficultés, leur souffrance, la colère et la douleur qu’ils portaient en eux. Tout parent devrait être capable de parler à son enfant avec les mots du cœur. C’est le langage coulant directement du cœur qui permet de rétablir la communication et de faire la paix avec l’enfant, permettant alors au processus de réconciliation de s’amorcer.
Nous savons tous que la paix commence par nous-mêmes. Mais nous ne savons pas toujours comment nous y prendre. Si nous parvenons à générer l’énergie de pleine conscience* et que notre souffrance se transforme ainsi en compréhension et en compassion, alors la réconciliation pourra s’amorcer beaucoup plus facilement. Avant cela, c’est quasiment impossible. La fierté, la colère et notre peur de souffrir nous barrent la route.
Mais avec la pleine conscience, la compréhension peut pénétrer le terreau de notre cœur, laissant alors jaillir le nectar de la compassion. »
*La pleine conscience, aussi connue sous le terme de mindfulness en anglais, est une pratique qui consiste à être pleinement conscient de l’instant présent, en portant une attention particulière à ses pensées, émotions, sensations corporelles et à l’environnement qui nous entoure.
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