Les lecteurs de French Morning nous soumettent régulièrement leurs problèmes liés à l’expatriation. Deux fois par mois, Vie d’Expat essaie de les aider en ouvrant sa bibliothèque de livres sur l’épanouissement personnel.
Aujourd’hui, l’histoire de Sophia pour qui l’expérience de la solitude fait partie de sa vie new-yorkaise.
« Entre 2022 et 2023, j’ai vécu une période de grands bouleversements personnels. Après la fin d’une relation de longue durée, il était temps de changer d’air. New York avait toujours été un rêve pour moi. Plusieurs de mes meilleurs amis y vivaient déjà et m’ont encouragée à venir. Je me suis lancée.
La vie à New York m’a rappelé ce que j’avais déjà expérimenté en vivant en Asie, notamment en Corée du Sud et à Hong Kong : le sentiment d’être étrangère et loin de chez soi. Il y a une certaine mélancolie, surtout en pensant à ma famille, notamment ma mère, que j’ai eu du mal à quitter.
Mais vivre ici m’a aussi offert une liberté nouvelle. Les relations sont plus spontanées et éphémères. On rencontre sans cesse de nouvelles personnes, ce qui donne un souffle d’air frais et une énergie différente. Cela me pousse à sortir davantage, à essayer de nouvelles activités, comme si chaque jour apportait un nouveau dynamisme.
Vivre à New York n’est pas non plus sans poser de nombreux problèmes, notamment sur le plan professionnel. Ne pas avoir trouvé du travail tout de suite m’a plongée dans une série de questionnements sur mon avenir : devrais-je suivre une voie plus créative, sortir du chemin traditionnel que j’avais emprunté jusque-là ? Cette liberté que New York offre, où l’on rencontre des personnes qui vivent de leurs passions, pousse à se demander : “Et pourquoi pas moi ?” Mais c’est aussi une source d’angoisse, surtout avec l’incertitude financière.
Le risque le plus grand que j’ai identifié serait de me perdre. C’est une ville qui offre une énergie incroyable mais qui peut aussi être très drainante. À mon âge, 29 ans, je pense que je suis suffisamment alignée avec mes valeurs pour ne pas oublier qui je suis. Mais cela demande un travail constant. On est sans cesse sollicité. Il y a toujours quelque chose à faire, des gens à rencontrer. Il est essentiel de savoir qui l’on est, sinon le risque est grand de se laisser absorber par tout ce que la ville offre.
En même temps, j’apprécie cette liberté infinie que New York propose, notamment l’absence de jugement, qui contraste énormément avec Paris. Mais cette liberté peut aussi mener à un épuisement de soi. Surtout en voulant vivre chaque expérience à fond. Le risque est de ne plus avoir de temps pour soi, de ne plus prendre le recul nécessaire pour réfléchir à sa propre vie.
C’est la raison pour laquelle je me réserve de grands moments de solitude. J’aime me perdre seule dans les musées ou les rues de la ville. J’ai le luxe d’avoir du temps pour ça, et c’est une expérience qui me fait grandir. Je sais que c’est un moment que j’ai choisi, où je suis toute seule parce que j’ai besoin d’être seule.
Cette solitude n’est pas pesante, car elle n’est pas subie. C’est un moment que je choisis consciemment, une parenthèse où je peux me retrouver. Le simple fait d’habiter en colocation fait que je ne suis jamais vraiment seule. Ma solitude est aussi ma liberté. »
La réponse de French Morning
Merci pour votre témoignage, Sophia. Nous avons trouvé le texte qui correspond exactement à votre définition de la solitude, telle que vous la vivez !
« Rêver, pouvoir s’écouter, prendre de la distance avec une société qui vous dicte en permanence ce que vous devez dire, penser, comment agir, vous comporter. Oser vivre la vie dont vous rêvez et vous en donner les moyens. Regarder loin en soi. Prendre des risques. Assumer de ne pas savoir pour pouvoir apprendre. Découvrir en soi des ressources méconnues. Savoir douter de soi pour se dépasser. Accepter ses limites, réajuster ses projets à la réalité sans se dévaloriser. Face à un problème, ne pas rester dans l’attente d’une aide extérieure, mais se donner les moyens de le résoudre. Se prendre en charge et assumer ses actes, poser ses priorités et les exprimer, quitte à déplaire. Oser faire des choix de vie qui blesseront parfois les proches. Choisir ses amis, s’entourer de personnes responsables qui nous aiment, pouvoir mettre de la distance avec ceux que l’on n’apprécie pas, savoir être tolérant envers son prochain. Être capable d’être seul avec soi-même et continuer de s’aimer, de croire en soi alors que les contraintes de la vie s’opposent à nous. Savoir apprécier le calme, le silence et écouter les messages de notre corps. Prendre soin de soi. Se préoccuper de soi.
Apprendre à se respecter : oui tout cela s’apprend dans la solitude. Car la solitude nous révèle à nous-même. La solitude nous incite à nous connaître plus profondément, à être juste et authentique envers nous et à nous accepter.
Pour parvenir à une existence authentique, se saisir comme unique, il nous faut avoir traversé et dépassé l’angoisse de solitude. Au cœur de la solitude se découvre notre richesse.
Même si notre besoin de l’autre est très grand, il ne peut remplir totalement notre vie et nous apporter la sécurité que nous recherchons. Cette sécurité, il faudra la trouver en nous-même. Avec l’âge et l’expérience de la vie, nous sommes de plus en plus conscients que les déceptions et les joies sont des réalités de la vie. Acceptée comme telle, la solitude devient source de créativité, de dépassement de soi-même. À mesure que nous avançons en maturité, la solitude devient positive. Elle contribue à élargir notre conscience d’être, à consolider notre sentiment d’identité et à enrichir notre vie. C’est pourquoi elle est pour certains une démarche intérieure voulue, choisie et s’associe alors à un sentiment de plénitude, d’harmonie, de bien-être. »
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