Il a pris son temps, Jacques-Antoine Granjon (en photo ci-contre), mais il en est content. “J’ai toujours dit qu’on ne viendrait aux Etats-Unis qu’avec un partenaire américain solide. Le marché est trop complexe, et trop compétitif pour y aller tout seul”. Ce partenaire ce sera American Express. Le géant de la carte de crédit cherche à se diversifier et c’est lui qui a contacté Vente-privée.com il y a quelque 18 mois. “Ce domaine des ventes privées est un marché gigantesque, qui fait déjà 2 milliards de dollars aux Etats-Unis et probablement trois fois ça dans cinq ans”, argumente Dan Schulman, le patron de la diversification chez American Express.
Côté à côte, Jacques-Antoine Granjon et Dan Schulman ont annoncé officiellement jeudi à New York le lancement de la branche américaine de vente-privée.com, leader mondial des ventes en ligne de produits haut de gamme à prix dégriffés. Même dégaine décontractée de l’entrepreneur qui a réussi (avant d’arriver chez Amex, Schulman avait créé VirginMobile aux US), même goût pour les santiags ultrapointues, les deux hommes racontent leurs ambitions: prendre leur temps pour finalement tailler en pièce les vilains copieurs qui se sont emparés du secteur aux Etats-Unis.
Jacques-Antoine Granjon est un pionnier et il en est conscient: “C’est la première fois dans le secteur des technologies qu’une compagnie française invente un business model qui est copié aux Etats-Unis” dit-il à un parterre de journalistes majoritairement américains, tout en assurant qu’il veut se garder “de toute arrogance”. Et il est vrai que son succès fulgurant en France puis en Europe (près de un milliard de chiffre d’affaires en 2010, 1400 employés, le tout en tout juste dix ans) a créé des centaines d’imitateurs. Le leader américain Gilt.com, fondé par deux américaines, s’inspire ouvertement du modèle créée par Granjon, tout comme MyHabit, lancé cette semaine par Amazon ou encore RueLala, racheté récemment par eBay. Mais il n’y a pas de quoi impressionner Granjon. “Nous avons 400 clones et pas un ne gagne de l’argent, dit-il. Gilt a levé 138 millions de dollars, et ils ne sont toujours pas rentables aux US! Nous nous gagnons de l’argent depuis 2004, sans avoir jamais levé de l’argent et sans aucune dette”.
Du coup, pour s’implanter aux Etats-Unis, vente-privée.com a écarté l’idée d’acquérir un de ses concurrents locaux. “C’est nous qui avons le savoir-faire, les process, les technologies que nous avons développés en France. On n’a donc aucun intérêt à acheter. Sans compter la bulle qui s’est formée sur les compagnies technologiques, qui fait que c’est beaucoup trop cher”. C’est donc une start-up que vente-privée va lancer aux Etats-Unis, à 50/50 avec American Express. Mais une start-up qui va bénéficier instantanément des 40 millions de membres de la compagnie de crédit.
Le lancement du site est prévu d’ici à la fin de l’année. “Ou peut être début 2012, dit Jacques-Antoine Granjon. On n’est pas pressés: nous n’avons pas de pression d’investisseurs, de banquiers, c’est notre luxe!” Le site ne portera ni le nome de vente-privée.com ni celui d’American Express. Un nom est actuellement testé auprès des consommateurs. Un nom qui pourrait “avoir une connotation française” confie un membre de l’équipe fondatrice. “L’image française, c’est pas mal pour vendre des vêtements”.