Valérie est venue a New York pleine d’espoir, il y a trois ans déjà. Ses efforts ont été récompensés. Non seulement elle a décroché le job qu’elle voulait vraiment, elle vient aussi de recevoir sa carte verte. Avant de démarrer ses nouvelles fonctions, elle s’envole pour la France, pour ce qui sera ses seules vacances avant un an. Bref, tout devrait bien aller dans le meilleur de monde et pourtant plus son voyage approche, plus elle se sent mal à l’aise, prise d’une panique difficilement contrôlable.
Alors que l’on était proche de mettre un terme à notre relation après 5 mois passionnants axés principalement sur sa vie professionnelle, Valérie veut me faire partager ses doutes et comprendre d’où viennent ses craintes. Avant, retourner en France était un moment qu’elle attendait avec impatience, revoir sa famille, ses amis, Paris, la ville où elle est née. Elle adorait cet instant où, à peine arrivée à Charles De Gaulle, la douane enfin derrière elle et les bras chargés de cadeaux, elle découvrait qui était là à l’attendre tout sourire. Les jours défilaient à toute allure, pleins de joie et d’insouciance, et à la veille de son retour, elle ne pouvait contenir son excitation de rentrer « à la maison ».
«Mais qu’est ce qui te fait tant redouter d’aller en France cette fois ci?». Le sentiment qui prédomine chez Valérie est de réaliser que ce voyage ressemble plus à un retour à ses racines qu’a une escapade parisienne. Même l’idée de repartir ensuite à New York est vécue d’avance comme un déchirement. Est ce que sa place ne devrait pas être auprès de ses parents âgés? Partir à New York, était ce plus une fuite qu’un vrai projet ? Et ces dîners avec les amis où l’on rigole de tout et de rien, ou l’on se comprend si vite grâce aux mêmes références culturelles, cela s’arrêtera-t’il dès que la porte de l’avion se refermera sur elle ? A toutes ces questions sans réponses s’ajoute une culpabilité sous-jacente. Veut-elle vraiment passer ses vacances en France où se sent-elle obligée d’y aller ? C’est vrai, il y a tellement d’autres endroits qu’elle aimerait découvrir.
Toutes les questions que Valérie se posent sont tout a fait naturelles, surtout lorsque l’on est dans une phase de changement. Elles sont même primordiales afin d’assurer une transition souple et sans embûches, tant que l’on en trouve les réponses ! Après 4 séances passées à la questionner sur ce qu’elle ressent au plus profond d’elle-même et sur ce qu’elle aimerait qu’il se passe pour qu’elle se sente de nouveau en contrôle, Valérie fut capable de partir en France l’esprit libre et sans surplus de bagages.
Elle a réalisé qu’elle n’est plus dans le domaine de l’hypothèse. L’acquisition de ce job dont elle rêvait et de sa carte verte l’a fait passer du stade de «je fais tout pour rester» à «j’y suis j’y reste». Elle se sentait déstabilisée car elle pensait être habituée au changement après trois ans. Elle n’a pas tout à fait tort. Elle s’est plutôt bien habituée à l’aspect physique de sa nouvelle vie : déménagement, job, papiers en règle, amis. Mais elle n’en a jamais abordé l’aspect psychologique, ce que l’on appelle la transition: elle sait ce qu’elle quitte mais ne sait pas ce qu’elle gagne en échange. Et sa panique vient de là. A ma demande, elle dressa une liste de ce qu’elle perdait vraiment, liste beaucoup moins exhaustive que ce qu’elle pensait originellement, pour ensuite apprendre à en faire le deuil. Après des moments de colère et de tristesse, elle passa ce cap primordial. Et lorsque plus tard, elle lut à haute voix ce que ces trois dernières années lui ont apporté et ce que les années suivantes lui promettent, à New York mais aussi en France, son sourire, sa fierté et sa sérénité furent les meilleures réponses à toutes ses questions qui lui encombraient l’esprit.
Sans avoir fait l’effort d’accepter que certains aspects de sa vie faisaient maintenant partie du passé, Valérie ne pouvait pas avoir un regard honnête sur ce que sa nouvelle vie était en mesure de lui offrir. Accepter son statut d’immigrante en transition, c’est savoir renoncer aux choses que la vie a décidé de vous reprendre afin de mieux recevoir ce qu’elle a décidé de vous donner.
Posez moi vos questions sur www.monlifecoach.com, j’y repondrai dans cette rubrique.
0 Responses
J’adore les articles de Nicolas!! toujours super interessants , on y retrouve toujours quelque chose de vecu en tant que francais vivant a NYC.
Je n’ai pas l’habitude de faire des compliments , mais je voulais juste vous feliciter d’avoir des articles de si bonne qualitee dans votre journal!
C’est vrai, elles sont sympa vos “bafouilles” Nicolas, c’est bien ecrit et tres vrai.
Je me suis trouvée dans le meme etat d’esprit cet hiver qd je suis retournée chez mes parents pour Noel. Cette fois la, je savais que je n’allais pas revenir avant un long moment, et oui je n’ai qu’une semaine de vacances par an dans mon nouveau job. J’ai du dire adieu dans ma tete et ca a été dur…. Avec le recul je me rends compte que je n’ai rien perdue, c’est juste resté la bas… a m’attendre… 🙂
Bravo Nico, te lire est vraiment agréable et tu dis tellement vrai ! Car finalement, si l’on on pose le problème du racinement, que ce soit à des milliers de kilomètres ou quelques centaines, n’avons nous pas les mêmes craintes, les mêmes doutes en laissant tout derrière nous pour vivre ce que nous avons envie de vivre? Mais partir pour me mieux se retrouver …… n’est-ce pas cela le bonheur?
J’ai toujours cette impression d’etre assis le cul entre deux chaises. J’aime New York mais des que je rentre en Françe, ca me met une pression énorme. Tout le monde attend beaucoup de moi, je deviens le centre d’interet et je dois me diviser par 100 pour faire plaisir a tout le monde… et puis qd je rentre aus USA, j’ai l’impression que tout ce que j’ai donné n’a servi a rien car je laisse tout derriere moi…
Peut etre moi aussi ai je besoin d’un coach?…. Je plaisante mais parfois je me demande si cela pourrait m’aider.
En tout les cas , merçi pour vos articles sur french morning.
Jerome.
Je lis toujours les articles de Nicolas avec beaucoup d’intérêts car il arrive tout simplement à positiver nos appréhensions, nos craintes et nos peurs en les transformant en qualité potentiel ! Une belle leçon de vie et une belle leçon déhumanité ! Bravo Nicolas
Une nouvelle fois Nicolas touche a un sujet auquel bon nombre d’expats ont du se touver confronte. Meme apres plus de 20 ans a NY, la question se pose toujours. Merci Nicolas de ces reflections si justes.