Mike et Julie sont ensemble depuis sept ans. Pourquoi se marier alors que depuis leur rencontre fortuite lors d’une soirée entre amis downtown, tout se passe très bien dans leur couple? Enfin, presque tout, puisque ce grand balaise assis en face de moi, à la mâchoire carrée et aux muscles saillants, me semble tout à un coup bien plus fragile qu’il n’en a l’air. C’est dans la langue de Shakespeare, et dans un accent traînant typique des Etats du sud, qu’il m’explique ce qui l’attriste et le rend si impuissant. «L’été arrive et comme à chaque fois, nous partons en France passer une quinzaine de jours dans la maison de famille de la femme que j’aime. J’ai déjà le cafard rien que d’y penser. C’est là où tout le monde se retrouve…Sauf moi».
C’est par le biais d’une amie de Julie avec qui j’ai travaillé il y a quelque temps, que Mike a entendu parler de moi. Je le sens hésitant à se livrer, mais je le rassure tout de suite sur l’aspect 100% confidentiel de tout ce qui se dira entre nous. Une bonne relation coach-client est basée sur une confiance totale et sur une honnêteté qui peut même parfois s’avérer brutale. Et pourquoi tout simplement ne pas la laisser aller seule en France cette fois ci ? Ma question a le mérite de le surprendre. «Ce n’est pas une option, cela sonnerait la fin de mon couple, vous ne croyez pas?». Je n’en ai vraiment aucune idée, ce qui tombe bien d’ailleurs car mon avis importe peu. Je suis un coach et non pas un conseiller. Je cherche à comprendre, je creuse la où parfois cela fait mal, l’idée étant de vous aider à trouver la solution qui est en vous. «Je sais, cela peut paraître stupide comme dilemme, qui n’aime pas aller en France ? Mais c’est pourtant douloureux à vivre car je n’arrive pas à trouver une solution satisfaisante pour nous deux».
Mike doit se concentrer sur quelle est la solution idéale pour lui d’abord, et voir ensuite comment elle peut s’appliquer à Julie. Être égoïste dans sa façon de penser lorsque l’on se retrouve perdu, paralysé ou confus, et donc incapable de prendre une décision, est à mon avis, primordial. «Au début, cela m’a sincèrement intéressé de découvrir une nouvelle culture et les gens qui comptent dans la vie de Julie. Je me suis hélas très vite rendu compte que cette façon de vivre, que certains appelle un art, ne ressemble pas du tout à la mienne. Au fil des ans, ce qui devrait être une joie est devenu une véritable corvée. J’aime Julie et je veux faire un effort pour elle, mais je ne sais pas du tout par où commencer». Mais de quoi parle-t-il ? «Les déjeuners qui n’en finissent plus, les discussions sur tout, sur rien et ou tout le monde donne son avis en même temps. Les bises à tout va, la fumée des cigarettes, les blagues que je ne comprends pas même quand on me les explique trois fois. La façon dont les hommes s’habillent que je trouve efféminée mais qu’eux trouve au contraire très mode, tellement plus mode que moi qui ne voyage qu’en shorts et en baskets. Je n’y connais rien en vin, en parfums, en fleurs et en jardin. Mon français est si approximatif que le temps que je comprenne le sujet d’une discussion, ils en sont déjà passés à une autre ! Bref, durant ces quinze jours, je suis le vilain petit canard. Je n’ai rien d’intéressant à dire, j’ai l’impression de retomber en enfance, de ne plus appartenir au monde des adultes».
Malgré toute la conviction que Mike essaye de mettre dans l’étalage de ses complaintes, tout cela sonne bien faux, je n’arrive tout simplement pas à le croire. Il est temps de le recentrer sur ce qu’il ressent vraiment, au lieu de se focaliser sur une espèce de monstre qu’il s’est créé au fil des ans. «Cela m’a fait un bien fou de pouvoir vous en parler sans avoir le sentiment d’être jugé. M’entendre à travers l’effet miroir que vous me renvoyez me fait aussi réaliser à quel point tout ceci est ridicule, basé sur rien. Pourtant, je ne crois pas me mentir quand je vous dis que cela me fait vraiment mal». Quelles sont vos options alors ? « Devoir être encore plus français qu’eux?». OK, je crois avoir compris d’où vient le malaise et je propose à notre ami de nous revoir dans une semaine, mais cette fois ci avec sa chère et tendre accrochée à son bras.
Julie se tient devant moi, visage fermé, les bras croisés sur ses genoux. Mike écoute. «Quand je suis dans sa famille, je fais tout pour m’adapter et je ne pense pas que cela soit déraisonnable de lui demander qu’il en fasse de même chez moi. Dans la vie, il faut parfois se forcer un peu et faire des choses tout simplement car on le doit». Et essayer de voir si on peut faire ces mêmes choses dont vous parlez mais parce que l’on en a vraiment envie, cela vous paraît t’il tout aussi déraisonnable ? C’est peut-être mieux que d’y aller en traînant les pieds et en souffrant le martyr, vous ne croyez pas ? Est ce le ton de ma réplique, son fondement, ou le fait que je lui ai répondu en anglais, ou alors tout à la fois, mais je vois bien qu’une ampoule vient juste de s’allumer au-dessus de sa tête. «La solution est tellement simple que je n’arrivais pas à la voir. J’ai toujours pensé pour Mike, ce qu’il devrait faire et comment il devrait se comporter avec ma famille vu qu’il ne connaît pas ma culture et mon pays. Jamais je n’ai pensé a lui demander ce qu’il voulait vraiment lorsque l’on projette d’aller en France». Et bien Julie, allez-y, c’est le moment !
Oser exprimer ce dont on a vraiment envie, d’une façon très égoïste, et essayer de l’appliquer dans sa vie avec les autres du mieux que possible est la plupart du temps la clé qui permet de faire les premiers pas hors d’un dilemme dans lequel on se trouve figé. Ils l’ont vite compris, chacun de leur côté, et pour le bien de leur couple.
«Ne pas t’accompagner chez toi aurait trop le goût d’une défaite et tu sais bien que les cow-boys ne baissent pas les bras aussi facilement. Ce dont j’ai vraiment envie est de découvrir ton pays avec les mêmes yeux d’Américain, parfois pas trop malin, qui t’ont découvert au fond d’un bar sombre du West Village. Je veux tomber amoureux de ton pays avec le même cœur d’Américain, parfois un peu maladroit, qui est tombé amoureux de toi il y a sept ans. Je veux aller dans ta famille en étant moi-même au lieu de prétendre que je suis ce que je ne serais jamais. Voilà ce que je veux vraiment. Et peut être qu’eux aussi tomberont alors sous le charme de ton John Wayne favori ! ».
Pour en savoir plus sur ce qu’est le coaching avec Nicolas Serres-Cousiné, visitez www.monlifecoach.com
0 Responses
s’il vous plait, evitez- nous ce genre de reportage on ne peut plus nul.
Merci
Je me suis trouvé dans ce genre de situation avec mon ex femme et je peux vous dire que cet article est plutot bien vu. Je detestais aller dans sa famille en Californie et cela a été a la source de nos problemes. A l’epoque, nous aurions du demander de l’aide, mais nous etions jeunes….
Perez, avec un commentaire aigri comme le votre, vous etes sur que vous etes parti de france? 🙂
Excellent article qui s’applique a n’importe quelle nationalite! Pour moi c’etait le Maroc, essayer de devenir une personne qu’on ne sera jamais pour “faire plaisir” ca ne marche pas. Comme le dit Jacques tres justement quand on est trop jeune, on ne sait pas…
Merci pour cet article qui s’applique à beaucoup d’entre nous! Je suis Française, et je vis avec un Américain depuis un peu plus de cinq ans. Cette histoire pourrait être la mienne mot pour mot. La solution que nous avons trouvée est que je rentre en France le plus souvent seule. Mon partenaire part voir sa famille de son cote. Au retour nous sommes heureux de nous revoir et ravie d’avoir passé d’excellents moments sans aucune frustration.
Passer des vacances longues chez n’importe qui est difficile, et encore plus chez la famille du conjoint, qui plus est n’est pas de la même culture. La seule solution que j’ai trouvée après quelques années, c’est d’y aller avec mon conjoint, mais m’absenter le plus souvent possible pour aller visiter le pays ou voir des amis, ou y faire une visite guidée de quelques jours avec ma propre famille! Et pendant une semaine ou plus, nous partons tous les deux visiter le pays. Depuis, ça va beaucoup mieux!