La question que la blogosphère commence déjà à poser: Fabrice Tourre est-il un bouc émissaire? Le jeune Français est la seule personne physique citée dans la plainte de la SEC (Security Exchange Commission), alors que sa position dans la banque était relativement subalterne. Ni ses patrons directs, ni les patrons de la banque ne sont poursuivis. Ni même le principal bénéficiaire de la fraude alléguée, John Paulson, le célèbre manager de hedge fund, qui aurait, selon la SEC, gagné 1 milliard de dollars dans l’opération (au total, la crise des subprimes et un judicieux pari sur l’explosion de la bulle immobilière auraient rapporté à Paulson 4 milliards de dollars).
Employé de Goldman Sachs depuis 2001, Fabrice Tourre est de ces jeunes matheux français très prisés de Wall Street pour leur habileté à concevoir les produits financiers complexes devenus indispensables à la finance mondialisée. Après la prestigieuse Ecole Centrale, il passe par Stanford avant d’entrer en 2001 à Goldman Sachs. Là, il devient spécialiste des produits dérivés. C’est là qu’il participera à la création de “CDOs” (Collateralized Debt Obligation), ces produits financiers exotiques qui furent au coeur de la crise des subprimes.
Ce que la SEC reproche à Tourre c’est d’avoir menti aux clients auxquels Goldman vendait ces produits financiers, en omettant de leur dire que ces CDOs avaient été conçus à la demande d’un gros client de la banque, John Paulson. C’est, selon la SEC, Paulson qui aurait dicté la composition du CDO en question, en choisissant lui-même les actifs auxquels ils étaient adossés. Or John Paulson avait sélectionné ces actifs car ils pensait que leur valeur allait s’effondrer. Et pendant que Goldman les vendait à ses clients, Paulson lui prenait des positions inverses, pariant sur cet effondrement.
La SEC ne reproche pas à Goldman Sachs d’avoir permis à Paulson de profiter de la crise des subprimes, mais d’avoir caché des informations à ses clients, en omettant de leur dire qu’un patron de hedge fund était derrière la constitution du portefeuille dans lequel ils investissaient.
Fabrice Tourre (qui n’a pu être joint par French Morning) est sans doute victime d’avoir oublié un principe élémentaire que connaît tout banquier: ne jamais rien révéler dans un email qui pourrait être retenu contre vous. La SEC produit en effet dans sa plainte un email envoyé par Tourre à un collègue en février 2007, dans lequel il prévoit la crise à venir: «Plus en plus de leverage. L’édifice tout entier est sur le point de s’effondrer à n’importe quel moment maintenant. Seul survivant potentiel, le fabuleux Fab, debout au milieu de toutes ces transactions complexes, à fort effet de levier, exotiques, qu’il a créées sans forcément comprendre toutes les implications de ces monstruosités!!!”
Mais le supérieur direct de Fabrice Tourre, Jonathan Egol, n’est lui pas mentionné dans la plainte de la SEC. Il était pourtant désigné comme le principal auteur du plan dans un article du New York Times de décembre dernier qui révélait l’affaire et a vraisemblablement déclenché l’action de la SEC. Depuis, Egol a été promu au titre de “managing director”. De son côté, Fabrice Tourre avait quitté New York il y a quelques mois pour travailler au bureau de Londres de Goldman Sachs.
Quant à John Paulson, le grand bénéficiaire de l’affaire, il n’est pas poursuivi car, selon la SEC, ce n’est pas lui qui a menti aux investisseurs. Il s’est contenté d’empocher un milliard de dollars en silence…
0 Responses
Bravo pour cet article
Tu devrais continuer l’enquete… Essayer d’interviewer Paulson… Bon courage!
Bon article, bonne explications de l’embrouille. Par contre le “pov fabrice. Bouc Emissaire” faut arrêter. Le gars aurait été américain on aurait dit “voila un autre pourri de la finance” si le mec est coupable de ne pas avoir su présenté les pro et contre d’un produit dont il était conscient il est coupable point (B-A-BA des series 65) même si ce n’est pas le seul, C peut être ce que l’article voulait dire
Vers un nouveau Breton Woods et le Glass-Steagall
Ce nouveau scandale bancaire, nous rappelle l’urgence d’agir politiquement afin de répondre efficacement à l’effondrement du système bancaire et monétaire internationale.
Suite à la crise de 2008, ainsi que la dégradation de la situation économique de notre pays ( destruction d’entreprises, destruction d ’emplois, augmentation de la dette souveraine…). Il est inacceptable de continuer à constater qu’une exception soit faite en faveur des excès d’une profession.
La responsabilité de nos hommes politiques est de défendre l’intérêt général et le bien commun contre l’empire fou de la finance et des marchés. Nous devons retrouver notre souveraineté économique afin de pouvoir financer les besoins de notre population avec une banque nationale et du crédit productif public, en demandant un nouvel ordre économique international avec un Nouveau Bretton Woods ainsi qu’un retour à Glass-Steagall , afin de séparer les banques de dépôt, des banques d’affaire et des assurances, pour ramener les banques à leur métier, prêter de l’argent afin de soutenir l’économie physique et non de se gaver sur le casino des marchés financiers de la City de Londres ou de Wall Street de New York.
Une nouvelle commission Pécora : Nous devons sauver les gens et non les marchés !
Depuis plus d’un an, le mouvement politique Solidarité et Progrès propose aux citoyens de prendre position en signant la pétition : « Appel à constituer sans délai une Commission d’enquête parlementaire sur la crise financière » à l’image de la comission Pécora ordonné par Franklin Delano Roosevelt afin de déterminer les causes de la grandes dépression de 1929 ainsi que d’exposer, aux yeux de tous les citoyens américains, l’emprise mafieuse des intérêts financiers de son temps sur la République américaine, afin d’ouvrir la voie au véritable changement de système économique : Le New Deal.
Citoyens ! Nous devons refuser la tyrannie des banques, nous devons donc exiger une telle commission aujourd’hui !
le blog de David C.
david.cabas.over-blog.fr
Que les coupables soient punis ou nous ne serons pas à l’abri d’un désastre à dimension planétaire. Que les politiques (honnêtes) se réveillent et agissent en hommes responsables pendant qu’il en est encore temps.