Perdu pendant plus de 200 ans, le tableau « Nature morte au vase d’albâtre rempli de fleurs avec sur une table plusieurs espèces de fruits, comme ananas, pêches et raisins » de l’artiste française Anne Vallayer-Coster, vient d’être restauré par les ateliers de la National Gallery of Art à Washington. La toile sera exposée à partir de ce jeudi 22 août, dans l’aile Ouest, galerie 56.
Acquis l’année dernière par le musée américain pour 2,5 millions d’euros, la peinture, qui représente un opulent bouquet de fleurs et des fruits, serait selon certains, une célébration de Bacchus, le dieu grec de la fécondité et du vin. « L’une de nos priorités, à la National Gallery, est de refléter la diversité et d’inclure plus d’artistes oubliés dans nos collections, en particulier des femmes qui ont pu marquer leur époque comme Anne Vallayer-Coster », explique Aaron Wile, conservateur au département peintures françaises du musée.
Cette toile est considérée comme le chef-d’œuvre de cette artiste, méconnue du grand public, pourtant citée comme l’une des virtuoses de la nature morte. Reconnue jusqu’à la Cour de France – Marie-Antoinette comptait parmi ses mécènes -, Anne Vallayer-Coster aurait reçu ses premiers enseignements artistiques de son père, Joseph Vallayer, orfèvre à l’hôtel royal des Gobelins. Interdite de formation professionnelle avec modèle nu en raison de son sexe, c’est vers les natures mortes qu’elle se tourne. Sa capacité à reproduire les fleurs, leurs textures, leurs couleurs chatoyantes, est alors très vite remarquée.
Figurant parmi les rares femmes élues à l’Académie royale de peinture et de sculpture, elle aura l’honneur d’exposer ses œuvres lors du « Salon », une exposition réservée aux lauréats de l’Académie. Une consécration pour une femme artiste, alors âgée de 26 ans, dont on disait qu’elle était « habile comme un homme ».
Très attachée à cette toile qu’elle considérait comme l’une de ses meilleures réalisations, Anne Vallayer-Coster refusera toutes les offres d’acquisition et la conservera toute sa vie, dans sa collection privée. Après son décès en 1818, puis celui de son époux six ans plus tard, l’œuvre aurait été rachetée par un membre de la famille. On perd ensuite sa trace, jusqu’en 2022 où elle réapparaît presque miraculeusement. Ignorant sa valeur et son histoire, son propriétaire avait conservé le tableau pendant toutes ces années dans ses affaires personnelles.
Vendue aux enchères à Paris l’an dernier, c’est désormais à Washington que l’œuvre va éblouir les visiteurs en rejoignant les collections permanentes de la National Gallery of Art. « C’est vraiment une œuvre extraordinaire que nous avons hâte de dévoiler au public. C’est l’une de ses plus grandes toiles et, aussi, l’une des plus complexes », précise Aaron Wile.
Malgré un état remarquable de conservation, la restauration aura nécessité huit mois de travail dans les ateliers du musée, où deux personnes se sont occupées de lui redonner tout son faste. « Il y avait deux déchirures, l’une en bas du tableau et l’autre en haut à gauche qui avaient été réparées de façon très amateure. Nos restaurateurs ont dû enlever ces réparations avec minutie pour les refaire de façon plus précise. Ces interventions sont désormais totalement invisibles. Nous avons aussi refait le vernis qui avait terni avec les années. Les couleurs ont retrouvé tout leur éclat », se réjouit Aaron Wile.
National Gallery of Arts, Constitution Ave. & 6e St. Washington, D.C. 20565.Ouvert tous les jours de 10am à 5pm – Entrée gratuite.