En 2010, à son arrivée à New York pour étudier à Columbia, Julien Bonneville a connu les galères de tout arrivant sans “credit score”. “La plupart des buildings n’acceptaient pas mon dossier. Je ne remplissais aucune de leur case alors qu’au fond de moi, je savais que j’étais peu susceptible de faire défaut sur mon loyer” .
Le Français a transformé cette galère en opportunité. Quatre ans plus tard, son MBA en poche et quelques expériences dans le conseil aussi, il a lancé TheGuarantors, une start-up florissante qui permet aux locataires sans “credit score”, cette note utilisée aux US pour juger de la santé financière d’un individu, de se trouver une location. Comment ? Elle vend aux locataires potentiels une solution d’assurance qui leur garantit de remplir les critères financiers requis tout en assurant au “landlord” le versement du loyer en cas de défaut de paiement ou de rupture du bail.
Le marché est important: étudiants internationaux, expatriés, retraités, entrepreneurs sont des clients potentiels. “On abaisse les deux barrières que sont l’absence de credit score et l’obligation d’avoir un revenu annuel quarante fois supérieur au loyer mensuel” , résume Julien Bonneville, assis dans les étages du 4 World Trade Center, où ses bureaux sont installés. On travaille avec sept des quinze plus gros landlords de New York et sommes disponibles dans environ 40.000 appartements. Notre service est particulièrement adapté aux nouveaux développements immobiliers car on étend significativement leur pool de locataires potentiels” .
Quand Julien Bonneville s’est lancé dans l’aventure, il ne connaissait pas grand chose à l’immobilier ou à l’assurance. Mais cet ex-consultant à McKinsey, qui avait monté une entreprise de données de marché en Afrique, a fait ses devoirs. “J’avais de fortes aspirations entrepreneuriales. Je cherchais un business avec des hautes barrières à l’entrée, pas trop fancy, assez complexe, et profitable. Je ne voulais pas être en concurrence avec les start-ups de la Silicon Valley qui sont dans la “consumer tech”, trop concurrentielle” , explique-t-il.
Il y avait peu d’acteurs sur le créneau qu’occupe aujourd’hui TheGuarantors, même si “j’ai rencontré des dizaines de personnes qui avaient eu envie de le faire, glisse l’entrepreneur. La plus grosse barrière, ça a été de convaincre une compagnie d’assurance de porter le risque et d’utiliser leur balance sheet. On avait vu d’autres boîtes émerger sur ce segment, mais sans compagnie d’assurance pour les soutenir, ça rendait leur service illégal.” Après d’innombrables démarchages, Julien Bonneville a fini par nouer un partenariat avec l’assureur américain Hanover, fournisseur de la solution vendue par TheGuarantors.
Côté locataire, le fonctionnement est simple: il doit remplir un questionnaire destiné à évaluer sa santé financière. “Par exemple pour les étudiants étrangers, on vérifie juste leur lettre d’admission dans leur université et nous validons qu’ils ont suffisamment de réserves, à l’étranger ou localement, pour couvrir leurs frais. De manière générale, on prend aussi en compte les actifs à l’étranger ou le revenu des parents, énumère le jeune patron. Les algorithmes que nous avons développés prennent en compte qualitativement et quantitativement les situations individuelles et le risque de chacun.” Ils reçoivent leur certification dans les 12 heures pour ne pas ralentir le processus de location.
Pour Julien Bonneville, le service n’avantage pas que les futurs locataires: il permet aux landlords de remplir leurs appartements et aux “brokers” d’élargir leur clientèle.
Les investisseurs aussi applaudissent. TheGuarantors a complété une levée de fonds “significative” auprès de Partech, Alven et White Star notamment. La PDG de Christie’s Patricia Barbizet a également mis des billes dans la petite affaire, qui emploiera bientôt huit personnes. La start-up, soutenue par Tal Kerret, président de Silverstein, vient également de rejoindre le très sélectif accélérateur du promoteur immobilier, propriétaire notamment du World Trade Center. “Notre métier, c’est de concevoir des produits d’assurance innovants en immobilier. Dans le monde du Venture Capital, on est dans la catégorie “insurtech”. On travaille actuellement sur un produit immobilier commercial. Le marché pourrait être plusieurs centaines de fois plus gros” .