Si on vous donnait le choix entre continuer votre vie actuelle ou tout réinventer, que feriez-vous ? Avec la pandémie, la question n’a jamais autant été d’actualité. Dans sa comédie « Le Monde d’Après », l’auteur et metteur-en-scène Guillaume Roper-Sirvent pose avec humour et irrévérence la question des choix de vie, du champ des possibles et de l’utilisation de notre temps sur terre.
En 2020, alors que le monde tournait au ralenti, Guillaume Roper-Sirvent s’est senti titillé par les discours des gens se promettant un changement de vie radical au bout du tunnel : « J’étais sceptique vis-à-vis de cette idée du “monde d’après” dans lequel tout serait différent. Je me suis beaucoup demandé si, confrontés au choix de tout changer, on changerait en réalité tant de choses. » Il a donc écrit une comédie qui égratigne le fantasme de tout plaquer pour élever des chèvres dans le Larzac. « Le Monde d’Après » met le spectateur face à ses petites mesquineries et contradictions, mais surtout à son rapport à l’instant présent.
Une écriture à la Jaoui
Le texte est aussi drôle que pertinent et actuel. Il aborde la question du bonheur, et même de la santé mentale à travers le sujet de l’indécision, de la peur de mal vivre sa vie ou peur d’en changer. Les neuf personnages dont on effeuille tour à tour les hypocrisies et angoisses pour toucher à l’humanité sont attachants et hauts en couleurs. Les disputes familiales imbibées tant d’amour que de non-dits rappellent les pièces d’Agnès Jaoui et Jean Pierre Bacri. Dans ses inspirations, l’auteur cite également Yasmina Reza pour son sarcasme face aux relations humaines, autant que la série Dix pour Cent dont il adore le personnage de Laure Calamy : « j’aime les personnages décalés et un peu fous ».
Pour ce qui est de rire de notre angoisse existentielle, Guillaume Roper-Sirvent est attaché aux mots de Pierre Desproges qui font de l’humour la « politesse du désespoir ». Il constate que beaucoup de personnes sont toujours à deux doigts du burnout et ajoute, malicieusement : « C’est tragique, mais ça peut aussi être très drôle ».
Une production made in French New York
La pièce est présentée par L’Atelier Théâtre de New York, une association française de théâtre amateur qui réunit depuis 2014 les expatriés francophones attirés par le jeu, les planches et la camaraderie. L’Atelier, dont Guillaume Roper-Sirvent anime les cours au côté de sa directrice Laura Elkeslassy et de Remy Souchon, produit une pièce chaque année. Adaptation de Molière, Marivaud, Tchekhov, Jaoui et Bacri ou texte original comme « Le Monde d’Après » : il fait bon d’entendre la langue française sur une scène new-yorkaise.
« Il faut une dose de culot à une compagnie d’amateurs pour produire et jouer une pièce en français, à New York, et qui surprenne par sa qualité », sourit Guillaume Roper-Sirvent. Outre le culot, c’est surtout l’expérience et la rigueur des metteurs en scène ainsi que le talent et travail assidu des acteurs, qui assure le succès des pièces de L’Atelier chaque année. Pour du théâtre amateur, ça fait toute la différence entre un niveau de kermesse scolaire et ce que propose Le Monde d’Après : une belle production qui promet un moment de rire et réflexion au spectateur.
« Le Monde d’Après », une comédie originale écrite et mise en scène par Guillaume Roper-Sirvent et produite par L’Atelier Théâtre NY. Avec Julie Abbas, Benjamin Auzimour, Nicolas Becquet, Fiona Dalmier, Marion Hérouard, Cécile Lopez-Mora, Benjamin Nadal, Claire Obry, Anne Urbain.